Ciel bas, pluie constante, pelouse déplorable… Aller déloger le Monténégro de sa place d’actuel leader du groupe se fera au prix d’un gros combat ce mardi soir. Le Luxembourg est-il armé pour ça ?
Les Roud Léiwen ont atterri à Podgorica dans une atmosphère triste au possible. Ciel bas, grisaille minante, gouttes de pluie qui ont juste cessé durant leur transfert à l’hôtel Hilton, le temps d’apprendre que leur entraînement prévu en soirée ne se déroulerait pas au stade Pod Goricom – comme le prévoit normalement le règlement UEFA – mais sur une autre surface, afin de ne pas esquinter davantage le «billard» sur lequel doit se jouer la rencontre.
Poussé autant par sa curiosité professionnelle que par l’angoisse de ce qui attend son équipe désormais façonnée pour le tiki-taka, Luc Holtz a donc attrapé un véhicule fissa pour se rendre au stade. Ce qu’il y a constaté l’a laissé sans voix : «J’ai vraiment des doutes sur le fait qu’on puisse jouer un match là-bas demain soir (NDLR : ce mardi soir) : la pelouse est à moitié inondée. À la limite, on pourrait presque y faire pousser du riz.»
«Avec six points, ce sera déjà réussi»
Pourtant, la seule chose que le sélectionneur voudrait cultiver, ce mardi soir, au Monténégro, ce sont les chances de son équipe de finir en tête de son groupe. Mais dans ces conditions, il préfère évidemment rester prudent. Un mois a passé et la démonstration face à Stevan Jovetic et ses coéquipiers, qui n’avait servi à rien au Barthel puisque le Grand-Duché avait fini par se faire voler dans les arrêts de jeu (0-1), semble déjà loin. Ce que Holtz craignait, c’est-à-dire une évolution insaisissable des états de forme dans cette période de coronavirus qui déstabilise tout le monde, est arrivé. Ses Roud Léiwen semblent moins costauds physiquement, moins fluides dans le jeu aussi. Sans préjuger de la façon dont se porte son adversaire du jour, on a le devoir de se dire que la marge de manœuvre sera moins grande qu’à l’aller.
Il y a pourtant là un match particulier à disputer. Battre le Monténégro, c’est, au moins, revenir à égalité. L’emporter en marquant plus d’un but, c’est la certitude de prendre la première place du groupe et d’entrevoir la possibilité de finir devant. En 2018, lors de la toute première campagne de Nations League, le Luxembourg n’était pas assez mûr pour aller contrarier le Belarus. Deux ans plus tard et un échelon au-dessus et contre des adversaires théoriquement supérieurs, il semble outiller pour aller jouer la gagne. Tiraillé entre le besoin d’atténuer la pression (qui avait joué un vilain tour lors de la précédente édition) et l’envie de dire que ses joueurs peuvent le faire, Holtz a livré un double discours assez logique. Sa position : il n’y a aucune obligation, mais il y a des opportunités. Puisque «Paul Philipp avait dit qu’avec six points dans ce groupe, ce sera déjà très réussi, or on les a déjà», mais aussi parce que «évidemment on veut le faire. Cela pourrait avoir son importance sur les prochains tirages».
«On a une équipe jeune et… intelligente»
Entre ces deux tentations, l’appel au calme et l’euphorie, il est forcément impossible de choisir. Un sélectionneur évolue toujours sur ce fil tendu au moment d’aborder un match comme celui de ce mardi soir. D’un côté, il faut «se rendre compte que oui, maintenant, on a un joueur (NDLR : Gerson Rodrigues) qui joue les phases de groupes de la Ligue des champions, mais en face, ils ont un joueur (NDLR : Stefan Savic) qui, lui, en a joué la finale. Les autres équipes aussi, ont des moyens», mais de l’autre «on a une équipe jeune qui gère de manière assez souveraine et intelligente et qui peut s’adapter».
Ni trop optimiste ni franchement pessimiste, Holtz ne promet rien, surtout qu’il se sait encore privé de beaucoup de joueurs clefs… Il se demande aussi si ce groupe taillé pour la possession et le jeu de passes peut réellement «s’adapter», comme il le dit, à des conditions qui s’annoncent épouvantables et qui pourraient avoir un impact fort sur ce match décisif. Pour une fois, ça nous évitera peut-être d’avoir à parler de l’arbitrage…
De notre envoyé spécial à Podgorica, Julien Mollereau
«Si on y met la volonté…»
Danel Sinani est venu fêter son doublé en conférence de presse, surtout pour dire qu’il était déjà prêt à remettre ça vite.
En inscrivant un triplé contre Chypre, vous seriez entré dans la légende du football international puisque aucun Luxembourgeois n’avait inscrit un triplé en match officiel depuis Ady Schmit en 1961. Heureux, samedi, ou frustré ?
Danel Sinani : J’ai été satisfait de mettre mon premier doublé en sélection. Il nous permet surtout de gagner et de rester dans le sillage du Monténégro. Après oui, il y a de la frustration parce que je ne comprends pas pourquoi il a sifflé hors-jeu. Mais bon, seule la victoire compte.
Comment vous attendez-vous à devoir vous adapter, ce soir, sur un terrain qu’on annonce très compliqué ?
On va déjà voir dans quel état il est vraiment. Après, comme dit le coach, si on y met de la volonté, les enchaînements techniques viendront tout seuls.
On ne savait pas dans quel état mental on vous retrouverait pour cette semaine internationale, après votre prêt-surprise de Norwich à Beveren…
C’est toujours un peu dur pour s’adapter, les deux ou trois premières semaines, dans un nouveau club. Arriver en Belgique, dans un club où je connais déjà quelques joueurs et où l’on parle le français, m’a pas mal aidé pour l’intégration. Ça aide. Après, évidemment, ce n’était pas dans mes plans de me faire prêter comme ça. Mais Norwich a décidé de faire comme ça. Ce n’est pas si dramatique. Le but reste toujours le même : faire son maximum pour s’imposer et peu importe le club dans lequel on se trouve.
Julien Mollereau