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Racisme dans le foot : « Ça me rend juste triste », déplore Martins


«C'est dommage de ne pas jouer dans une telle ambiance, mais c'est peut-être bon pour qu'ils comprennent enfin...», dixit Marvin Martins. (Photo : Gerry Schmit)

Alors que les Roud Léiwen se déplacent ce jeudi à Belgrade (20h45) pour jouer devant un stade vide à la suite de faits de racisme lors de la venue du Portugal, Marvin Martins a été saisi par l’histoire survenue à un joueur du Shakhtar en Ukraine.

Tim Hall et lui étaient en train de rejoindre le Luxembourg quand leur coéquipier de sélection, Gerson Rodrigues, affrontait le Shakhtar Donetsk avec le Dynamo Kiev. Marvin Martins suivait la rencontre sur un live basique quand il a été surpris par une information à la 82e minute : expulsion pour le Brésilien Taison. «Alors que c’est un joueur respectueux qui ne provoque jamais. Je me demandais comment c’était possible, et puis j’ai vu. C’était dû à un acte de racisme.»

Des cris de singe très précisément. Qui ont vu le milieu de terrain offensif adresser un doigt d’honneur aux imbéciles qui s’étaient rendus coupables de la chose, tirer le ballon dans leur direction et sortir en pleurs, escorté par des coéquipiers et des adversaires de Kiev. Alors que Gerson Rodrigues était lundi dans l’avion avec ces funestes pensées dans un coin de sa tête (ce sont ses propres supporters qui ont commis l’irréparable), Marvin Martins a pris quelques minutes, à 72 heures d’un match en Serbie, pour évoquer ce phénomène qui l’inquiète.

Avez-vous déjà été confronté au racisme sur un terrain de foot depuis que vous êtes arrivé en Ukraine ?
Marvin Martins : Moi? Non, heureusement, je n’ai pas encore été victime de ça. Ce n’est jamais arrivé, mais on m’a prévenu que ça pourrait m’arriver. C’est quand même triste, en 2019… Voir ça et tout ce qu’il se passe à l’heure actuelle en Italie, où c’est encore pire avec Balotelli notamment (NDLR : l’attaquant de Brescia dit avoir été victime de cris racistes lors d’un match face au Hellas Vérone, la semaine dernière). Après, l’UEFA met des règles, des sanctions…

Assez fortes selon vous ?
Je crois oui. Encore faut-il parvenir à identifier ceux qui profèrent de pareilles insultes pour les bannir. Mais ça, je crois que c’est compliqué. Alors dans ce cas-là, je crois que c’est bien de bannir le responsable du groupe de supporters.

Balotelli avait voulu quitter le terrain, Taison s’est rebellé. Vous êtes-vous déjà demandé ce que vous feriez si cela devait vous arriver ?
Justement, après ce genre de choses, j’en viens à me poser la question. Comment je réagirais, moi, si ça m’arrivait? Je ne me l’étais pas posée parce que je n’ai jamais été victime, mais aujourd’hui, ça me rend juste triste et je me demande : comment continuer à jouer dans un tel environnement? La réaction de Taison, je la comprends. Celle de tous ceux qui l’ont soutenu aussi. Vinicius Junior, Willian… J’ai vu que Gerson avait aussi tweeté un « stop racism ». Mais que voulez-vous, dès qu’un match devient tendu… C’est comme ça le foot, ça peut être moche.

Mercredi, les Roud Léiwen et vous-même décollez pour Belgrade afin d’y affronter la Serbie dans un stade qui sera théoriquement vide après que des supporters locaux se sont rendus coupables de chants racistes durant le match contre le Portugal. Voir ce stade un peu mythique qu’est le Marakana à huis clos, c’est dommage ou, après tout, tant mieux ?
Tant mieux! En temps normal, je ne dirais pas ça, mais vu les problèmes du moment, c’est assez logique. Cet endroit, c’est un stade où les hooligans sont incroyables. J’ai vu leur match de barrage pour la Ligue des champions contre Christopher Martins d’ailleurs (NDLR : les Young Boys Berne s’y sont fait éliminer sans leur milieu de terrain récupérateur, déjà blessé à l’époque) et c’était le feu. Alors oui, c’est dommage de ne pas jouer dans une telle ambiance, mais c’est peut-être bon pour qu’ils comprennent enfin. Dommage qu’avec toutes les actions promotionnelles organisées par l’UEFA, il y ait encore besoin d’en arriver là à cause de quelques têtus qui ne comprennent pas.

Ça vous fait peur ?
Moi j’avoue, j’appréhende. Mais voilà, on est des joueurs de couleur et on joue à l’étranger, dans des endroits où l’on ne sait pas comment les gens réagissent. Il suffirait d’un mauvais geste, d’une faute bête pour que ça commence. C’est vraiment sensible…

Vous vous surveillez en match? Vos paroles, vos gestes… ?
Je ne provoque pas, je joue mon jeu. S’il faut faire une faute, je la fais, mais je n’en rajoute pas. Après, tout dépend des spectateurs…

Julien Mollereau