Alors que son équipe dames accueille ce mardi soir l’Angleterre devant seulement 2 000 spectateurs, la FLF et son secrétaire national, Joël Wolff, s’arrachent les cheveux.
Ce mardi, contre l’Angleterre, les dames de la FLF fêteront leurs grands débuts en éliminatoires du Mondial à domicile, dans l’intimité d’un stade de Luxembourg toujours placé sous jauge (2 000 personnes). Comme les hommes. Avec des dommages conséquents en termes d’image, puisqu’elles ne pourront pas plus que les Roud Léiwen surfer sur l’effet de nouveauté de cette nouvelle enceinte pour se créer un public, et financières pour la FLF, qui estime à la louche le manque à gagner du premier mois d’exploitation de l’enceinte à près de 500 000 euros.
Aujourd’hui, à Mondercange, l’incompréhension est ainsi totale. Après avoir attendu ce nouvel outil de travail pendant une quinzaine d’années, elle pouvait entendre l’argument sanitaire tant que le pays s’alignait sur ses voisins. Mais alors que le football remplit à nouveau les stades en Belgique, France et Allemagne, la frilosité du Luxembourg en matière de retour à la normalité dans le sport autant que le silence assourdissant des supporters et médias, interpellent en haut lieu. Le président Philipp s’en était fait le porte-parole juste avant l’inauguration de l’enceinte, face à l’Azerbaïdjan. Mais son secrétaire national, Joël Wolff, n’est pas moins irrité par la tournure des événements, qui entraîne la fédération vers un statu quo de plus en plus irritant.
Quelle était l’ambiance à la fédération après l’annonce de la prolongation des mesures interdisant d’espérer un afflux plus conséquent de spectateurs vers le stade de Luxembourg, ces quatre prochaines semaines?
Joël Wolff : En fait, on est très déçus. Les autres, chez nos voisins, peuvent jouer devant des stades quasi pleins, ou en tout cas avec des jauges bien supérieures aux nôtres. Nous pas. On a adressé une demande au ministère des Sports le 30 août, pour rappeler que partout ailleurs, on rouvrait, parfois même à 100 %. On a demandé à ce que, dans la nouvelle loi du 15 septembre, on en tienne compte, mais notre ministre nous a bien fait comprendre qu’on ne changerait pas la loi. Alors qu’on a bien compris, depuis le début de la pandémie, que notre politique était calée sur celle des pays limitrophes. Or là, voilà, tout le monde a rouvert, sauf nous.
Que vous a-t-il été répondu, en substance?
Qu’au Luxembourg, on reste plus prudent. Mais c’est incompréhensible : c’est un événement en extérieur. Et ailleurs, en France, en Belgique… les conditions d’accession au stade sont les mêmes que chez nous. Eux sont à largement plus de 50 %, voire à 100 % et nous, si l’on se rapporte à la capacité de notre stade, on en est à… 15 %! Et c’est d’autant plus dur à comprendre que ces 15 %, si on voulait, on pourrait les mettre tous ensemble derrière un but.
Vous n’êtes peut-être pas entendus, mais avez-vous l’impression d’être quand même écouté?
Je ne sais pas si on est écoutés. Mais on se rend compte d’une chose : dans ce pays, il n’existe absolument pas de lobbying pour le sport. Dans les médias, on n’en parle pas ou à peine. Imaginez un peu ce qui se passerait en Belgique, en France ou en Allemagne, sur les réseaux sociaux, si cela arrivait, des jauges de 2 000 personnes pour les matches internationaux. Voir qu’ici, personne ne s’énerve, ça me rend malheureux. On dirait que personne, gouvernement compris, ne pense que c’est grave.
Tout ce que j’entends, c’est de la frustration chez les gens. Mais personne ne dit rien…
Cela a un coût aussi. Le président a dit (NDLR : lire notre édition du 1er septembre) que cela nous coûtait entre 250 000 et 300 000 euros par match et c’est exactement ça dans le cadre d’un match à guichets fermés, maintenant qu’on a un business club. Contre le Qatar en amical, on peut partir du principe qu’on aurait encore eu entre 3 000 et 5 000 personnes. Mais avec l’Angleterre pour les dames, la Serbie à venir pour les hommes, on peut partir du principe qu’on approche largement les 800 000 euros de manque à gagner. De l’argent, on en a perdu pendant la pandémie à cause des huis clos, mais avant, tout le monde, dans tous les pays, était logé à la même enseigne. Cet argent, c’est au football luxembourgeois qu’il manque. Mais à la limite, ce n’est pas le plus grave, car l’État et les communes ont aidé les clubs pendant la crise et que nous, on a quand même reçu un stade qui aura coûté 76 millions d’euros. Donc on ne va pas se plaindre.
Quels sont vos espoirs pour le mois de novembre et la venue de l’Irlande, maintenant que l’on sait que la Serbie se jouera aussi devant une assistance minimaliste?
Pour l’Irlande, il faut attendre la nouvelle loi covid du 19 octobre. Impossible de passer au feu rouge. Cela nous angoisse énormément d’imaginer qu’il faille peut-être attendre maintenant 2022 pour voir ce stade plein. Personnellement, je ne vois pas le bout du tunnel et c’est tellement dommage. Cette équipe est populaire et le stade est neuf. Tout ce que j’entends, c’est de la frustration chez les gens, qui ne peuvent pas venir voir ce bijou. Mais personne ne dit rien…
La dernière fois, il y avait 800 personnes en ligne simultanément. Le système est tombé en panne
D’autant que les chiffres semblent indiquer que ce stade, vous pourriez le remplir presque à chaque fois en ce moment, alors que partout ailleurs, même si les jauges ont disparu ou sont « mieux« dimensionnées, cela a du mal à reprendre…
C’est un phénomène global, oui. Les gens reviennent moins facilement au stade à l’étranger. Avant, il y avait des endroits où c’était plein – en Bundesliga notamment – où ce n’est actuellement plein qu’à 60-70 %. C’est problématique, les gens ont peur de revenir au stade ou ne veulent pas s’embêter avec des tests ou des preuves de vaccination… Je pense que cela va durer encore quelques mois, le temps que la normalité revienne.
Quand la prévente de la Serbie (NDLR : match le 9 octobre) commence-t-elle?
On va attendre après le match des femmes contre l’Angleterre, je pense. Mais bon, comme la dernière fois, ce sera vendu en une heure. On vendra 1 500 billets et les gens vont se ruer dessus. La dernière fois, tout le monde voulait un billet, il y avait 800 personnes en ligne simultanément. Le système est tombé en panne… C’est pour ça que même une jauge à 50 %, cela nous ferait plaisir, on accepterait. Mais 2 000…
Entretien avec Julien Mollereau