Il a chatouillé les chevilles des attaquants pendant 10 ans? Adrien Portier a depuis ouvert… un centre de beauté. Et veut offrir des massages gratuits aux personnels soignants en fin de confinement.
Boucher et maintenant esthéticien… Portier devient cinglé!» L’intéressé lui-même se régale de la tournure curieuse qu’a pris sa vie après une décennie à faire passer des frissons dans le dos des avant-centres de la BGL Ligue, en défense centrale de la Jeunesse Esch.
Parti début 2018 faire un tour du monde et notamment du bénévolat en Amérique du Sud où, accompagné de sa moitié, Sarah Raghdi, il a rejoint son frère, l’intransigeant stoppeur découvre des trucs fous. La montagne des sept couleurs au Pérou, le salar d’Uyuni en Bolivie et… des centres de beauté pour enfants à Medellin, en Colombie. «On en avait déjà croisé en Floride : des spas entièrement consacrés aux petites filles. On s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire qui n’existait pas encore au Luxembourg», sourit Portier.
En Amérique du sud, c’est bling-bling. On a voulu européaniser le concept
Dans le petit cœur de ce garçon de 32 ans qui n’avait aucun sentiment pour les chevilles de ses adversaires, quelque chose naît alors. Une idée, un concept : «Bon, là-bas, en Amérique du Sud, les mœurs sont différentes. C’est bling-bling, avec du maquillage à l’américaine, vous voyez le genre. Nous, on a voulu européaniser le concept, le faire à notre sauce. C’est un beauty center qui met les enfants en avant. Tous nos produits sont bios, véganes donc non testés sur des animaux et on a créé un univers. Massages, soins, fêtes d’anniversaire et même cour de maquillage.»
Deux ans plus tard, le voilà réinstallé dans une routine quotidienne mais débarrassé de contingences footballistiques trop prenantes puisqu’il évolue désormais au Lorentzweiler de son pote, Christophe Diederich, 9e de Division 1 série 1, loin de ses objectifs parce qu’il joue sans doute un peu trop au ballon et se fait souvent contrer. Mais là n’est pas le sujet. La charnière un peu lente qu’il forme désormais avec Éric Hoffmann a beau souvent se faire prendre de vitesse, en affaires, Portier ne traîne pas et en février, Sarah et lui ouvrent à Merl le «Little Sparadise», entourés de deux employées.
Le rêve prend forme mais le timing est exécrable et cela, les deux tourtereaux ne le savent pas encore. Contraints de fermer pour cause de coronavirus et de confinement, les voilà déjà obligés de protéger leur investissement d’une crise majeure.
Ma sœur est infirmière au Luxembourg. Ils risquent leur vie
Et à l’heure d’envisager la réouverture, espérée pour «fin avril-début mai», ose espérer Portier, le couple tente de faire d’une pierre deux coups. En ce début de semaine viennent de sortir des flyers qui interpellent. Flanqués d’un grand «Merci!» sur fond rose, avec un stéthoscope en forme de petit cœur (on nous l’a changé, vous dit-on!), le prospectus propose à tous les personnels soignants du pays, tout aussi débordés que dans le reste du monde, de «venir reprendre des forces» au travers de «massages gratuits» d’une durée de 30 minutes sitôt que l’épidémie et le confinement seront enfin derrière le pays.
«Ma sœur est infirmière au Luxembourg, explique ainsi solennellement ainsi Adrien Portier. On sait très bien, Sarah et moi, les efforts que tous les personnels soignants doivent faire. Ils risquent leur vie et c’est assez touchant d’observer ce dévouement. Notre business est à l’arrêt et on cherche ce qu’on pourrait leur offrir. La seule chose que l’on sait faire, c’est ça : leur donner un moment de détente, de relaxation. Une sorte de petite récompense. Et on le fait de bon cœur!»
On peut le croire sur parole. Y aller de bon cœur, c’est finale ment son credo depuis toujours, à Adrien Portier. Les attaquants le savent bien. Les personnels soignants vont l’apprendre…
Julien Mollereau
Little Sparadise 332, route de Longwy, à Merl. Tél. : 661 03 68 18.