Flacio Giannotte vient tout juste de décrocher son diplôme. Et l’épéiste grand-ducal ne sait pas encore s’il va privilégier sa carrière sportive. Ou sa vie professionnelle.
On l’a déjà dit, si pour certains, la période du Covid a été très dure à vivre, pour d’autres, elle est tombée presque à pic.
C’est notamment le cas pour Flavio Giannotte, qui devait initialement jongler entre sa préparation pour le tournoi de qualification olympique de Madrid, au mois d’avril et son master «en métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation en éducation physique et sportive», à l’université de Reims.
Avec l’arrêt de toutes les compétitions à partir du mois de mars, l’épéiste grand-ducal a pu se concentrer à fond sur ses études. Et plutôt brillamment : «Je suis fier de mon mémoire, où j’ai obtenu la meilleure note de l’école», se réjouit-il. En effet, avant de soutenir son travail vendredi, il est assuré d’avoir une note comprise entre 17,5 et 18,5 sur 20.
Visiblement, son travail sur «Le phénomène d’exclusion et de rejet d’un individu par un groupe au niveau scolaire – Impact de l’éducation physique et sportive et proposition d’un outil de classification» a beaucoup plu : «C’est le premier outil de ce genre et cela pourrait permettre de minimiser le harcèlement scolaire et l’exclusion», résume-t-il.
Plans initiaux chamboulés
Proche de détenir son master en poche, vient désormais le temps des questions. Avec le Covid, les plans initiaux ont été chamboulés. Et Flavio Giannotte sait qu’il arrive à un tournant dans sa vie de sportif. Et d’homme.
Très conscient de la situation, il pèse le pour et le contre de chacune des solutions qui s’offrent à lui. Et ce n’est pas évident : «Je ne dors que très peu en ce moment car ma tête est ailleurs. Je dois décider quelle direction prendre et ce n’est pas facile…»
Et de détailler : «Est-ce que je rentre à l’armée, je vis mon rêve et je vis à 100 % pour l’escrime ? Ou est-ce que je profite de mes études pour trouver une alternative qui me permettrait de m’entraîner à haut niveau et le plus professionnellement possible ?»
Passionné d’escrime depuis tout petit, Flavio Giannotte a pour rêve absolu, évidemment, de participer aux JO «ou de rentrer dans le top 20 mondial (NDLR : il est 68e au dernier classement)».
S’il reconnaît avoir fait énormément de sacrifices pour atteindre son niveau actuel, celui qui lui a permis de battre le n° 1 mondial Yannick Borel, de réaliser une poule parfaite aux Mondiaux ou encore de terminer 14e des championnats d’Europe l’an passé, il a toujours réfléchi à la suite : «J’ai souvent choisi le chemin le plus difficile, mais avec le plus de perspectives possibles à la fin. J’aurais pu tout mettre sur la carte du sport et vivre mon rêve dès le plus jeune âge, mais le problème c’est que l’escrime ne te permet pas de vivre correctement et surtout ce sport ne t’assure pas une après-carrière. J’ai toujours eu des visions à long terme.» Il a ainsi refusé d’intégrer le Sportlycée alors qu’on lui a proposé, tout comme il a décidé de ne pas rejoindre l’armée après le bac avec ce principe : «L’escrime oui, mais les études à côté.»
Et ça paie : «J’ai souffert pendant trois ans, mais finalement j’en suis sorti plus fort et avec un diplôme en poche. J’avais des résultats sportifs mais aussi scolaires.»
Flavio Giannotte sait mieux que quiconque à quel point une carrière sportive est fragile. Lui qui a bien failli voir la sienne s’arrêter il y a deux ans de cela, en mai 2018, quand sa lame s’est cassée et est venue se planter dans sa cuisse.
«Aucun des choix n’est mauvais»
Il sait donc combien il est important d’avoir un bagage au cas où tout s’arrêterait. Mais maintenant qu’il en dispose, il ne sait pas s’il doit l’utiliser immédiatement.
«Je m’étais dit que je pourrais enfin me concentrer à 100 % sur ma passion. Le problème, c’est que je ne sais pas si le service militaire et la carrière sportive à 100 % me permettent de profiter de mes choix antérieurs et de m’assurer un futur à la hauteur de mes attentes.»
La pandémie a également modifié ses projets : «Je voulais partir en Italie, mais je ne sais pas si ce sera possible. Si on va m’accepter comme partenaire d’entraînement. Et si c’est le cas, qu’est-ce que je ferai de mes journées à part m’entraîner ? Je me connais, j’ai besoin d’un challenge quotidien mental pour être productif. Et il y a aussi la question de la vie privée si je suis là-bas et ma copine au Luxembourg…»
Rester au Luxembourg, en tant que professeur de sport peut également être une solution qui lui permettrait de s’entraîner professionnellement tout en pouvant vivre correctement avec des infrastructures idéales.
Le revers de la médaille, c’est qu’il devrait voyager pour trouver des partenaires d’entraînement, ce qui demande beaucoup d’organisation. Et de moyens. Alors, l’armée pour être pro et se consacrer uniquement à l’escrime, ou un job qui lui permette de s’entraîner dans de bonnes conditions : «Aucun des choix n’est mauvais. À court terme, l’armée semble la solution évidente. Mais à long terme, la seconde option est la plus sûre. C’est un choix entre la passion ou la raison. Je suis entre chien et loup», conclut-il.
On l’aura compris, Flavio Giannotte se pose des questions. Et pour le moment, il n’a pas encore trouvé la bonne réponse.
Romain Haas