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Bob Jungels, 6e du Giro : « C’est assez incroyable… »


Bob Jungels : "Il était impossible de prévoir le scénario de ce Giro. J'ai tout donné jusqu'à la fin..." (Photo DR)

Le coureur luxembourgeois a pris la sixième place du classement final du Tour d’Italie et s’annonce comme un grand coureur du futur. Confessions.

Jusqu’au bout de ce Giro, on aura vu Bob Jungels (23 ans) sur le front de l’attaque. Dimanche encore, dans les rues turinoises, il s’est plié en quatre avec Gianluca Brambilla pour favoriser les desseins de Matteo Trentin, le finisseur italien de l’équipe Etixx. À l’image de ses trois semaines de course, où sa générosité et sa classe n’ont cessé de crever l’écran. Une chute spectaculaire de l’Italien Sonny Colbrelli à l’avant du peloton dans le dernier tour de circuit avait bien failli l’emporter alors qu’il menait énergiquement. C’était passé et c’était bien le plus important. Le Giro terminé, le moment était venu de faire le point.

Dans ce Tour d’Italie que vous venez de terminer sixième, où vous avez pris le maillot rose et remporté le maillot blanc de meilleur jeune, vous avez épaté les observateurs par votre capacité à suivre les meilleurs en haute montagne. Vous-même, vous êtes-vous surpris ?

Bob Jungels : Pas vraiment, même si je me suis découvert un peu. À la fin du compte, mon point fort dans ce Giro, c’est d’être resté calme, lucide. Par exemple, je n’ai pas fait une maladie de prendre six minutes dans l’étape des Dolomites où j’ai préféré grimper à mon rythme et limiter au mieux. Je savais que je serais fort en troisième semaine et si on regarde les deux dernières grandes étapes de montagne, je termine avec les meilleurs grimpeurs de ce Giro, quelques-uns des meilleurs grimpeurs du monde. J’étais forcément super content de moi, même si c’est difficile à dire comment je me sens.

Au départ du Giro qui vient de s’achever, vous auriez pu prévoir ce scénario ?

Pas vraiment, c’est venu au fil des étapes. On avait bien commencé avec les succès d’étapes de (Marcel) Kittel où j’étais vraiment content de travailler pour lui. Puis ce fut le tour de (Gianluca) Brambilla. J’ai toujours pris plaisir à faire le boulot et toute l’équipe a été extraordinaire. Il y a eu le maillot rose de Gianluca, mon maillot rose (qu’il porta trois jours dans les 11e, 12e et 13e étapes) ensuite et encore le succès d’étape de Trentin. Dans notre équipe, tout le monde a donné sa chemise pour les autres. C’était formidable. Et pour moi, c’était un test à la fin du compte. Mais c’était impossible de prévoir le scénario de ce Giro. J’ai tout donné jusqu’à la fin et je termine sixième du général. Oui, c’est assez incroyable…

Vous êtes plus fier de terminer avec le maillot blanc de meilleur jeune, d’avoir porté le maillot rose ou alors de terminer sixième ?

Si on regarde le classement final, je termine à environ huit minutes de Nibali (8’31) qui n’a pas été super par moments. Mon poursuivant au classement des jeunes, Sebastian Henao se retrouve à une trentaine de minutes de moi (29’3). J’ai été quelques jours leader, porteur du maillot rose (trois jours). Je pense que ma sixième place finale, ça vaut plus que le reste, même si évidemment, porter le maillot rose, monter chaque jour sur le podium pour le rose et pour le blanc (depuis la 4e étape, il était leader de ce classement annexe), c’est incroyable. Mais personnellement, je regarde ceux qui sont devant moi au classement final, comme ceux qui sont derrière moi. Et je préfère ça.

Votre style de rouleur-grimpeur est assez unique en ce moment dans le peloton. Même s’il convient bien sûr de se méfier des comparaisons, des observateurs, dont Andy Schleck, nous disaient qu’on retrouvait avec vous le style de Miguel Indurain…

Oui, j’ai entendu ça, comme aussi Jan Ullrich. Bon, je pense avoir un coup de pédale plus souple qu’eux. Mais c’est mon style. Sur les pentes pas trop raides comme celles de samedi, je peux aller longtemps à un rythme et une cadence élevés et je peux faire jeu égal avec les grimpeurs. C’est ainsi que j’ai repris Majka et Chaves dans le dernier kilomètre samedi dans l’avant-dernière étape. J’ai aussi beaucoup travaillé l’aspect mental avec un copain ostéopathe qui me suit depuis toujours (NDLR : il s’agit de Pascal Breitenberger). Je sais rester calme en toute circonstance et cela m’aide beaucoup. Cela me donne de la force et cela m’a aidé dans ce Giro. Je lui dois beaucoup.

Qui vous a impressionné dans ce Giro ?

Certainement Steven Kruijswijk. Sans sa chute, je pense qu’il l’aurait emporté. C’était le plus fort dans les montées jusqu’à sa chute qui, on le suppose, a changé la donne physiquement et mentalement. Ce n’est pas seulement un filet de sang qui coule sur la route, lorsqu’on chute, c’est beaucoup de petites choses qui se dérèglent. Mais auparavant, on sentait sa grande confiance en lui. Sa chute l’a fait perdre le Giro. Après, la deuxième chose qui m’a impressionné, c’est le retour de Nibali. Longtemps, on ne l’a pas senti dans le coup, mais sa fin de Giro a été extraordinaire. Il était vraiment impressionnant.

Quelle sera la suite de votre programme ?

Je reprendrai la compétition pour les championnats nationaux (23-26 juin), puis je préparerai le Tour de Pologne (12 au 18 juillet) qui sera un autre grand objectif pour moi. Puis il y aura le Tour de l’Ain (10-13 août) ou alors peut-être le Tour de République tchèque (11-14 août) que j’effectuerai sans doute, avant la préparation des championnats du monde au Qatar (9-16 octobre).

D’anciens coureurs luxembourgeois comme Kim Kirchen et Andy Schleck suggèrent qu’il serait bon de ne pas vous écarter des classiques. Qu’en pensez-vous ?

J’en ferai encore, comme je l’ai fait cette année. J’ai vu que je pouvais effectivement y avoir un rôle à jouer. J’aime également les grandes courses d’un jour.

Entretien avec Denis Bastien