Deux joueurs dudelangeois auraient été victimes d’insultes racistes proférées par des supporters wiltzois lors du match en retard de la 1re journée, disputé le 18 août.
C’est un match dont on aurait aimé ne retenir que la suprématie dudelangeoise, mais dont on pourrait reparler ces prochaines semaines pour de toutes autres raisons, peut-être même dès demain au Tribunal Fédéral. Reportée au mercredi 18 août en raison de cas de covid au F91, et assez aisément remportée (3-0) par les hommes de Carlos Fangueiro, la rencontre entre Dudelange et Wiltz, comptant pour la 1re journée, aurait été émaillée d’insultes racistes, proférées par des spectateurs, vraisemblablement des supporters wiltzois, à l’encontre des deux latéraux dudelangeois Mehdi Kirch et Kevin Van den Kerkhof.
Les mots prononcés? «Bougnoule», un terme français extrêmement péjoratif désignant les personnes maghrébines, révèle le second, d’origine algérienne, comme Kirch, qui aurait lui aussi été injurié de la sorte en première période, d’où son attitude chambreuse après avoir ouvert le score à la 24e minute. «Il me l’a dit à la mi-temps», confie Van den Kerkhof, qui s’est plaint, après le troisième but dudelangeois, de ces insultes auprès de l’arbitre assistant officiant de ce côté du terrain, puis à l’arbitre central, interpellé par ce dernier. Habituel speaker du stade, le président du F91, Gerry Schintgen, a alors, à la demande du corps arbitral et du délégué du match, exigé au micro que ces insultes cessent, faute de quoi la rencontre serait interrompue. Un appel suivi d’effets.
L’arbitre n’a pas entendu
«Me faire insulter, encore, je m’en fous, assure le Français, mais des choses racistes, ça ne se dit pas. Mehdi et moi, ça nous touche particulièrement. Je connaissais des personnes à qui c’est déjà arrivé, mais à moi, jamais. Ces paroles-là, même si on sait qu’elles viennent de personnes très bêtes, sans aucune maturité, c’est dur de ne pas y réagir. C’était quand même des trucs choquants, surtout qu’ici au Luxembourg, il n’y a pas 10 000 personnes dans les stades. Ce que je ne comprends pas, c’est que les personnes de Wiltz autour n’ont pas réagi à ces propos. Personnellement, si je suis en tribunes et que j’entends des insultes racistes, je vais voir la personne. Mais là, non : les gens disaient des insultes, et les autres laissaient faire.»
Si je suis en tribunes et que j’entends des insultes racistes, je vais voir la personne. Mais là, non : ils insultaient, et les autres personnes de Wiltz laissaient faire.
Au moment de la brève interruption du match, Van den Kerkhof a tout de même trouvé un peu de réconfort auprès du directeur sportif wiltzois, Robert Jansen. «Il était énervé, et m’a dit de ne pas me préoccuper d’eux, de rester dans mon match, confie le numéro 3 dudelangeois. Sur le coup, ça blesse, et c’était un peu dur de nous faire redescendre. J’ai essayé de me sortir ça de la tête, parce qu’on doit être plus intelligents qu’eux et ne pas tomber dans le panneau, mais il faut faire quelque chose pour que ça ne se reproduise pas à l’avenir. D’autres joueurs pourraient réagir autrement, et ça pourrait dégénérer. J’ai quand même réussi à faire mon match, et on a répondu de la meilleure des manières, mais c’est désolant.»
A-t-il songé à quitter le terrain, comme cela se fait de plus en plus à travers l’Europe dans des circonstances similaires? «Il y a eu de l’hésitation, mais c’est la première fois que ça m’arrive et on n’est jamais préparé à vivre ça. Mais si ça se reproduit, je ne réagirai peut-être pas de la même manière. Et puis, on était en train de gagner, je ne voulais pas arrêter le match, je me suis dit qu’on règlerait ça à la fin, qu’ils seraient punis.» C’est d’ailleurs ce que lui aurait dit l’arbitre assistant : «Il m’a dit qu’il avait bien entendu, et qu’on règlerait ça à la fin du match.» Or si un rapport a bien été établi après le coup de sifflet final, il n’y est, selon nos informations, pas fait mention de l’arbitre de touche, seulement des insultes rapportées par Van den Kerkhof à l’arbitre central Ivo Torres, qui ne les aurait lui «pas entendues».
Identifier les auteurs? «Compliqué»
Difficile, donc, d’envisager des sanctions envers leurs auteurs. D’autant que leur identification, malgré les indications données par «KVDK» («Principalement des jeunes, âgés de 20 à 30 ans»), se révèle «très compliquée» selon Michael Schenk, le président wiltzois, pourtant présent au match mais dans la tribune opposée. «De mon côté, je n’ai rien entendu, mais si cela a été signalé, c’est que cela s’est produit, admet le dirigeant, qui s’est, dès le lendemain du match, excusé par téléphone auprès de son homologue Gerry Schintgen et Van den Kerkhof. J’ai passé la journée de jeudi à essayer de savoir ce qu’il s’est passé, mais je n’ai pas eu de vrai retour. Si des gens sont identifiés, des instances comme la FLF peuvent prononcer des suspensions, mais il faut être sûr à 100 % de qui c’était. On ne peut pas accuser sans preuves.»
À défaut, le FC Wiltz peut-il être sanctionné? Faute de pouvoir identifier les fautifs, le F91 n’a entrepris aucune démarche en ce sens. «J’espère que non, estime lui Michael Schenk. Le club fait des efforts au niveau de la société pour montrer le bon exemple : on a des Belges, des Français, des Allemands, des Asiatiques… tous les jours, on travaille avec des joueurs venant de partout sans faire de différence. Les insultes racistes, on ne peut pas accepter, mais c’est difficile de punir un club, je ne sais même pas si ce sont des Wiltzois. Si un club est puni dès que quelqu’un crie quelque chose, ça va être compliqué pour la suite. D’ailleurs, à mon avis, 99 % des gens n’ont comme moi pas compris le sens de ce mot. J’ai fait beaucoup de stades au Luxembourg et je n’ai jamais entendu cela.» Pourvu qu’on ne l’entende plus, à l’avenir.
Simon Butel
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