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[Basket] Delgado n’a plus de temps à perdre


Ivan Delgado est prêt pour lancer pour de bon une carrière pro longtemps ralentie par les blessures. (Photo : dr)

PAYS-BAS À 25 ans, après deux années plombées par les blessures, l’arrière ettelbruckois, qui vient de signer à Yoast United, veut vraiment lancer sa carrière pro.

Tous les observateurs disent de lui que c’est indubitablement un des plus grands talents au Luxembourg. D’ailleurs, alors qu’il n’avait pas joué depuis de longs mois, Ken Diederich n’avait pas hésité une seconde à coucher son nom quand il s’est agi de dresser une pré-liste pour les rencontres de la prochaine fenêtre FIBA. Lui, c’est Ivan Delgado!

Samedi dernier, après avoir fait une pige pour Etzella lors de la demi-finale perdue de la Coupe contre la Résidence (2 pts, 5 rebonds, 3 passes, 1 interception en 17’19« ), il effectuait ses premiers pas au sein de l’équipe néerlandaise de Yoast United. Des débuts réussis avec 14 pts, 3 rebonds, 2 passes et 3 interceptions lors de la large victoire sur le parquet de Limbourg (59-90) : «Ça fait plaisir. C’était une belle victoire. On a bien défendu. Bien joué ensemble. Le coach avec un gameplan, on s’y est tenu et c’est ce qui nous permet de battre le cinquième de trente points. J’ai pu montrer un peu ce que je savais faire. Je suis heureux d’avoir la chance de pouvoir retrouver les terrains au niveau professionnel. On va continuer comme cela!» On sent l’émotion du jeune homme de 25 ans. Il faut dire que cela fait longtemps qu’il attendait ça.

Petit rappel des faits : pendant 25 ans, la famille Delgado a toujours eu un représentant au sein de l’équipe première d’Etzella. Nelson, bien sûr, l’oncle, le parrain et mentor d’Ivan, Jairo évidemment. Et donc, Ivan. Arrivé sur la pointe des pieds en jouant quelques secondes dans les garbage time lors de la saison 2016/2017 au sein de l’effectif de Jan Enjebo, avec quelques kilos en trop et des dreadlocks, il se met au boulot, part courir avec «Nels» et fait de la muscu avec Jairo. Le gamin devient un athlète. À l’été 2018, il se coupe les dreadlocks. Et n’hésite pas à s’emparer du mythique n° 7 de «Nels», laissé vacant. Ce qui en dit long sur sa motivation. Et sa confiance en lui.

Ivan continue sa progression et décide de tenter sa chance. À l’instar d’un Alex Laurent, d’un Ben Kovac ou d’un Malcolm Kreps, il suit l’instruction de base pour devenir sportif d’élite de l’armée avant, il l’espère, de passer pro. Il patientera encore une saison à Etzella avant de prendre son envol – du moins c’est ce qu’il souhaite –, en 2021 : «J’étais resté une saison de plus à Etzella pour avoir de meilleures stats. Me focaliser sur mon corps. Devenir meilleur.»

Je pouvais jouer n’importe où. Je peux m’adapter rapidement

Contrairement à ses compatriotes passés par les Den Helder Suns : «Je n’avais pas le même agent (NDLR : lui travaille avec Rui Nunes et non Misch Engel)», lui avait opté pour une destination plus «exotique» : «Pendant la bubble FIBA, on avait joué avec l’équipe nationale contre l’Islande. Israel, un coach espagnol était en train de regarder le match. Les contacts se sont liés.» C’est ainsi qu’Ivan Delgado allait entamer sa carrière au sein du Sindri Höfn, ambitieuse formation de D2… islandaise : «Moi je voulais seulement voyager. Je pouvais jouer n’importe où. Je peux m’adapter rapidement.»

Mais ce qui devait être un rêve va rapidement tourner au cauchemar. Après une demi-finale de championnat contre le Basket Esch, il s’est fait deux entorses et a continué de jouer. C’est donc blessé qu’il a effectué le déplacement au Portugal pour affronter la Suède et leur hôte à deux reprises, à l’été 2021 : «À ce moment, je savais que quelque chose n’allait pas avec mon pied. Si j’enlevais ma chaussette, on pouvait voir que quelque chose ressortait.» Ses affaires ne vont malheureusement pas s’arranger en Islande où il jouera… un match : «J’ai fait beaucoup de physio, je faisais les traitements, je m’entraînais, je ne m’entraînais pas…» Avant de partir en Islande, il s’était entretenu avec un médecin qui lui avait expliqué que s’il avait les mêmes douleurs cinq ou six mois après, il faudrait passer par la case opération.

C’est ainsi que l’aventure islandaise tourne court. Il rentre au Luxembourg, se fait opérer. Et entame une longue période de rééducation. Il rebondit en ProB allemande, à Ehingen. Malheureusement, il n’en a pas fini de ses pépins physiques : «Il y a eu des complications. J’ai commencé à avoir mal au tendon d’Achille.» Après une saison à Ehingen, qu’il décide de quitter («C’était plus une académie qu’un club pour les pros») pour rejoindre Iserlohn («Le coach avait fait passer des try outs à huit gars. Moi, il m’a appelé. Il m’a dit qu’il était intéressé et que je n’avais pas à faire d’essais»), il part à Malte pour décrocher la médaille d’or aux JPEE. Puis rejoint pendant l’été la sélection lors de la fenêtre FIBA contre la Croatie et l’Irlande.

Et les choses ne vont pas s’arranger en Allemagne : «J’ai pris trois ou quatre jours de repos et je suis tout de suite parti en Allemagne. Dès la preseason, quand j’ai vu comment se passaient les entraînements je savais que ce serait impossible pour mon tendon d’Achille.» Avant même le début de la saison avec les Eagles, il sait qu’il ne restera pas longtemps : «L’entraîneur physique était fou. Il fait du crossfit. C’était vraiment trop pour mon pied. Certains matins, quand je me levais, je ne pouvais même plus le bouger.» Il fera quelques apparitions : «On a fait de bons matches de présaison, on a même battu une équipe de ProA. Mais en une semaine, on a joué trois fois. Après, c’était fini. Je sentais qu’il y avait un truc qui n’allait pas avec mon tendon d’Achille.» Business is business, le club n’a pas le retour sur investissement attendu. À l’automne, les deux parties se séparent.

De retour au Luxembourg, il suit un programme de réhabilitation avec le Luxembourg Institute for High Performance in Sports (LIHPS) et un entraîneur de la fédération. Et petit à petit, les choses se mettent en place : «Ça va mieux. Je sais mieux gérer ma situation. J’ai des exercices à faire tous les jours deux à trois fois par jour, je dois bien m’échauffer et ça va.»

Prêt à retrouver un nouveau challenge et à lancer vraiment sa carrière pro, il arrive finalement lui aussi aux Pays-Bas. Et c’est du côté de Yoast United que son histoire va continuer de s’écrire : «Ils avaient des problèmes de blessure. J’ai discuté avec le coach directement. Les Pays-Bas, c’est le niveau le plus relevé où j’ai pu jouer jusqu’à maintenant. C’est une bonne opportunité.»

Depuis tout petit, ma mère me dit qu’il faut toujours continuer. Aller de l’avant. Lutter pour ses rêves

Il est désormais installé à Bemmel, à deux pas de Nimègue. Et il a dû s’adapter à un nouveau style de vie : «Ils s’entraînent de 9 h à 11 h le matin et de 15 h à 17 h l’après-midi. Moi, j’avais plutôt l’habitude de m’entraîner de 10 h à 12 h et ensuite le soir, de 20 h à 22 h. Ça change, mais ce n’est pas plus mal. Ça permet de profiter du soir. Après, il faut aussi se coucher plus tôt. Il y a quelques jours, pour la première fois je me suis endormi avant 23 h», sourit-il.

Avide de montrer ce qu’il sait faire sur un parquet, Ivan Delgado le dit lui-même : «Je n’ai plus de temps à perdre. Chaque match est une occasion de prendre de l’expérience.» Après deux matches avec sa nouvelle formation batave, il sera donc dans les 16 qui se battront pour les 12 places au sein de la sélection : «Chaque jour, je dois prouver que j’ai ma place. Pourquoi je suis pro. Je veux avoir plus de minutes sur le parquet avec l’équipe nationale. Rien n’est gratuit.»

Ambitieux, motivé comme un gamin qu’il n’est déjà plus, Ivan Delgado ne s’interdit rien. Il veut aller le plus haut possible et compte bien sur les rencontres de BNXT League face aux formations belges, réputées bien plus fortes que les Néerlandaises, pour se faire remarquer. Avec, dans un coin de sa tête, le rêve de pouvoir un jour porter les couleurs de son club de cœur : le Sporting. «Ce serait vraiment génial si je pouvais y arriver. Je ne vais pas me fixer de limites. Depuis tout petit, ma mère (NDLR : la sœur de Nelson) me dit que peu importe ce qui se passe, il faut toujours continuer. Aller de l’avant. Lutter pour ses rêves.» Que maman se rassure, Ivan est bien décidé à suivre ses conseils!