L’association SOS Parents apporte soutien et informations aux parents qui se battent contre leur ex-compagne ou compagnon pour la garde des enfants.
Au moment de la séparation ou du divorce, les déchirements à propos de la garde des enfants entraînent des situations douloureuses. (Photos : AFP/François Aussems)
Si 90 % des séparations ou divorces se passent pour le mieux avec deux parents qui s’entendent et qui ont pour objectif le bien-être de leur(s) enfant(s), pour d’autres couples, cela se transforme en guerre de tranchées. Ce sont ces parents qui se retrouvent à l’association SOS Parents qui tenait, lundi soir, sa réunion mensuelle. Quelque 18 personnes étaient présentes, ainsi que deux avocats et une médiatrice de l’ASBL Centre de médiation. Majoritairement des papas au bout du rouleau, broyés par un système qu’ils ne comprennent pas et une injustice qu’ils subissent, celle de ne pas voir assez leur enfant.
L’association a été créée par Elvis Breda, père de trois enfants qui ne supporte pas de les voir uniquement un week-end sur deux. La médiation avec son ex-compagne a échoué, car elle refuse la demande du papa d’obtenir une garde alternée. Chantage, menaces : les enfants sont devenus une arme légale. « Les juges privilégient de fait la garde des enfants par la mère, le papa devenant un visiteur, constate Elvis Breda. C’est une situation qui n’est pas acceptable, car ce qu’il y a de mieux pour l’enfant, c’est qu’il puisse voir ses deux parents. Je n’ai pas trouvé d’association qui écoute les papas dans mon cas, alors j’ai créé SOS parents pour soutenir les parents séparés en difficulté, mais aussi militer pour que la garde alternée devienne la norme. »
> En dépression faute de voir ses enfants
Au départ, chaque histoire démarre par une séparation ou un divorce qui se passe mal, très mal. Comme ce papa, en dépression depuis deux ans et demi, faute de voir suffisamment ses enfants de 6 et 8 ans : « Quatre jours par mois, ce n’est pas assez. La justice n’a pas compris que c’est moi qui ai élevé mes enfants. Mon ex-femme est manipulatrice, elle a quasi ligué mes enfants contre moi. Je ne comprends pas la justice, je suis cassé. Comme je travaille la nuit et les week-ends, les occasions sont rares où je peux voir mes enfants. Et pendant ce temps, la justice traîne. »
Les témoignages s’enchaînent, l’ambiance est pesante, et les histoires se ressemblent, comme celle de cet autre père : « Je suis en procédure de divorce depuis trois ans et demi pour arriver à une coparentalité, mais toute médiation a échoué. Je constate que si la maman n’est pas ouverte à plus de garde pour le papa, cela devient très difficile. Pendant ce temps, les enfants grandissent, des problèmes d’éducation surviennent, c’est un vrai champ de bataille. Le grand est en 7e, il manque la présence de son père, mais à quatre jours par mois, c’est insuffisant. Des activités périscolaires sont imposées, je suis arrivé à ne pas le voir pendant six semaines, c’est très dur! J’ai perdu tout espoir dans le système judiciaire. »
Ils sont tous là pour ne plus se sentir seuls, comme cette grand-mère portugaise qui se bat avec son fils pour la garde de son petit-fils après que la médiation a également échoué. Les services sociaux sont impliqués, mais, là encore, difficile d’avancer.
> La culpabilisation de la mère
Pour un autre papa, la situation est dramatique : « Je suis divorcé depuis cinq ans. Peu de temps après le divorce, mon ex-femme a déménagé en Californie avec notre fils, qui a 8 ans aujourd’hui. Cela crée évidemment des difficultés pour le voir, et ne serait-ce que pour garder contact. Je dois dire que, jusqu’ici, je m’en sortais assez mal », avoue-t-il, quelque peu réconforté de trouver une écoute au sein de l’association.
Deux mamans fraîchement séparées sont également présentes, les choses se passent pour le moment très bien. L’une d’elles évoque néanmoins un petit pincement au cœur quand elle laisse son enfant seule avec le papa : « Je sais bien qu’il s’occupe très bien d’elle et qu’il n’y a aucun problème, mais il n’y a rien à faire, je suis seule et je n’arrive pas à profiter de ces moments. Je culpabilise. » Cette culpabilité des femmes, Me Caroline Stirn l’évoque volontiers : « Nous sommes dans une société où il y a un vrai sentiment de culpabilisation de la mère. « Laisser » les enfants au père est vécu comme un véritable abandon, notamment aux yeux de la société. C’est la base du problème », explique l’avocate.
Pour la médiatrice Diane Meyer, dont le bureau gère environ 300 dossiers par an, il n’y a pas de secret. Pour que la garde fonctionne, il faut que les deux parents y mettent du leur et communiquent : « Les enfants ont besoin de voir leurs deux parents, c’est indéniable. Il faut faire en sorte que le lien soit maintenu, et trouver des solutions qui soient dans l’intérêt de l’enfant. C’est cela qu’il ne faut pas perdre de vue. Certains papas veulent tous les droits, mais quand ils ne sont pas disponibles, la garde alternée est impossible. »
Même son de cloche du côté de Me Bertrand Cohen-Sabban, avocat aux barreaux de Paris et Luxembourg, qui tempère à propos de la garde alternée automatique : « En France, le système se base sur la coparentalité, ce qui n’est pas le cas au Luxembourg, même si, dans les faits, la coparentalité est reconnue par la jurisprudence. Au Luxembourg, la majorité des divorces qui se terminent sans accord débouchent sur une garde de la mère avec droit de visite du père. Même si la chambre du tribunal est favorable aux droits du père. J’ai déjà obtenu des gardes alternées pour des papas qui travaillent de nuit, alors que ce n’est pas dans l’intérêt de l’enfant. La garde alternée est une bonne solution lorsque les parents réalisent que confier leur enfant à l’autre parent, ce n’est pas l’abandonner. »
De notre journaliste Audrey Somnard
Centre de médiation (gratuit) : www.mediation.lu