Approuvée en 1990 par l’Académie française, la réforme de l’orthographe a provoqué un tollé, jeudi. Au Grand-Duché, les professeurs de français sont en position d’attente.
Décidément, n’importe quelle réformette en France suscite une levée de boucliers. Dernier «scandale» en date, une réforme de l’orthographe vieille de 26 ans qui sera appliquée dans les nouveaux manuels scolaires à la prochaine rentrée scolaire. Au menu, notamment, l’accent circonflexe qui pourra désormais être abandonné quand il ne change pas le sens d’un mot (comme pour «sûr» et «sur»).
Une décision qui satisfait Jean-Claude Frisch, le président de l’Association des professeurs de français du Luxembourg (APFL) : «Souvent, l’accent circonflexe remplace un « s » qui a disparu avec le temps, comme pour le mot « fenêtre ». L’accent n’est donc pas indispensable dans certains cas de figure, mais il faut trouver une bonne entente sur ce sujet.»
Certains traits d’union et «ph» disparaissent avec cette réforme. On pourra désormais écrire «nénufar» ou encore «millepatte», «portemonnaie», ou «weekend», qui s’écriront désormais en un seul mot. Des changements qui témoignent de la modernité d’une langue française qui évolue sans cesse.
Pour Jean-Claude Frisch, des simplifications seraient en effet les bienvenues : «Je prends par exemple le verbe donner qui comporte deux « n », alors que le mot donateur n’en comporte qu’un. Cela serait bien d’adapter ce genre de chose.» Pour autant, le professeur veut garder son mot à dire sur ces réformes : «Des adaptations, oui, mais pas n’importe quoi.»
Mettre l’accent sur une orthographe soignée
Les principaux intéressés sont bien entendu les élèves qui vont découvrir dès la rentrée prochaine des manuels qui utiliseront cette nouvelle orthographe. Valentin, 15 ans, est en 3e au lycée Vauban (ou lycée français du Luxembourg) dans la capitale. S’il fait attention à son orthographe dans certaines circonstances, il ne regrettera pas l’accent circonflexe.
«Cela sera quand même plus facile avec la suppression des accents circonflexes, d’autant que sur internet je ne les utilise jamais ! Du coup, ça me va très bien. Par contre, autant j’écris très vite mes messages et ne fais pas du tout attention à l’orthographe, autant, lorsque je publie quelque chose sur les réseaux sociaux, je soigne mon orthographe. Tout d’abord, parce que je n’ai pas envie d’avoir la honte, et puis mes parents sont aussi sur Facebook et ils me surveillent. Si je fais des fautes, ils ne me ratent pas», explique l’adolescent.
Même chose pour son camarade Mallaury également en 3e, mais, lui, au collège d’Audun-le-Tiche, de l’autre côté de la frontière : «Pour les messages, c’est clair, je ne fais pas attention, mais le correcteur automatique du smartphone aide beaucoup !»
Reste que la réforme conduite et approuvée par l’Académie française a ses détracteurs et que les deux orthographes sont aussi légitimes l’une que l’autre. En effet, «aucune des deux graphies [ni l’ancienne ni la nouvelle] ne peut être tenue pour fautive», dit la noble institution dans une déclaration.
La confusion qui risque d’en résulter est susceptible d’aboutir à un véritable fiasco : «Ce n’est pas la première réforme de l’Académie française et, bien souvent, tout le monde s’en fiche, constate Jean-Claude Frisch. Si cette réforme n’est pas portée par tous, elle risque bien de ne pas être appliquée. En ce qui concerne le Luxembourg, le ministère de l’Éducation nationale devrait attendre pour prendre position. Et, en attendant, il faudrait que la France clarifie sa position au vu de la polémique suscitée.»
Audrey Somnard
On a d’abord supprimé le grec, pourtant à la base de beaucop de mots surtout médicaux ou techniques, puis le latin, à la base de presque tous nos mots. On veut maintenant supprimer tout ce qui fait le charme de notre belle langue.
Où donc s’arrêtera la décadence?