Accueil | Politique-Société | Meurtre de Remich… combien de Sarah au Luxembourg ?

Meurtre de Remich… combien de Sarah au Luxembourg ?


Le nombre de cas de violence domestique poursuit son ascension au Luxembourg. (Illustration : Editpress).

Le meurtre à coups de couteau d’une jeune fille de Remich bouleverse l’opinion publique, sur les réseaux sociaux. La cousine de Sarah – la victime âgée de 22 ans- a publié un texte poignant. Et une affirmation demeure en lisant les commentaires : les violences conjugales qui touchent la jeune génération sont inquiétantes.

« Bonjour, je m’appelle Sarah. J’ai eu 22 ans ce dimanche 22 juillet 2018 et regardez comme j’ai l’air heureuse sur ces deux photos prises ce jour-là. J’ai une sœur jumelle, Sabina et une maman qui m’aime de tout son cœur… mais un père absent depuis ma naissance. Je suis belle, plutôt réservée, et j’ai un sourire à tomber.

Je m’appelle Sarah, j’ai un copain depuis 4 ans, je l’aime à la folie. Ma famille ne l’aime pas mais moi je sais que c’est l’homme de ma vie, d’ailleurs il vient de me demander en fiançailles. Je l’aime, donc je l’ai suivi. Je l’aime, donc j’ai décidé d’habiter avec lui, quitte à tourner le dos à ma famille pendant plus d’un an. Je l’aime parce qu’il me dit de belles choses. Je l’aime parce que je me sens en sécurité avec lui, puisque je n’ai jamais eu de figure paternelle.

Je m’appelle Sarah et j’ai été manipulée, j’ai été isolée, éloignée de tous mes proches sans m’en rendre compte. Je m’appelle Sarah, et ce mardi 24 juillet 2018 (2 jours après cette magnifique photo de nous) j’ai été poignardée à plusieurs reprises par mon bien aimé, jusqu’à ce qu’il mette fin à mes jours.

Je m’appelle Sarah, et je suis l’exemple même de l’expression « l’amour rend aveugle ».

Je m’appelais Sarah, c’était bel et bien l’homme de ma vie, puisque ça a été le seul. Je m’appelais Sarah, mais je pourrais m’appeler tout autre. »

Sarah (Photo publiée sur Facebook).

Sarah (Photo publiée sur Facebook).

Il n’y a rien à ajouter à cette douleur exprimée par la cousine de Sarah, morte sous la violence de son petit ami le 24 juillet, à Remich.

Des dizaines de témoignages affluent

En réalité, si, il y a bien des choses à dire : comment un meurtre d’une telle sauvagerie peut exister au XXIe entre deux jeunes gens ? Sarah avait 22 ans. On pensait que la domination masculine dans le couple n’était plus acceptée dans une société moderne, ou disons au moins en recule. Le machisme d’une « femme tenue » par son conjoint, la violence banalisée…jusqu’au pire. À lire les commentaires en dessous du post, on se rend compte que de nombreuses jeunes filles (belge, luxembourgeoises, portugaises etc.) déplorent la violence des hommes. Les témoignages sont sidérants.

« T’inquiètes… on passe tous par là mais y a des fils de p* qui vont jusqu’au bout et parfois ce sont nos potes qui doivent nous obliger a le quitter avant de se faire tuer… », écrit Shelley.

« Ton ex était ainsi, heureusement tu es partie à temps », lance une fille à une de ses copines.

Deux autres amies : « Heureusement que tu t’en es rendue compte avant, ton ex est aussi taré que lui (NDLR : l’assassin de Sarah) »

« Je hais les hommes de cette sorte, je suis d’une idée absolue et concrète selon laquelle ils font partie d’une secte pourrie qui détruit tellement de famille. Ça m’est arrivé mais je n’ai pas eu le malheur de cette jeune fille ! J’ai pu m’en sortir ! », confie Valentina.

« J’ai partagé (NDLR : la publication), ça me fait penser à mon premier (NDLR :mec) », lâche Ophélie.

« Ça aurait pu être toi » « – Oui ça aurait pu… mais je suis sortie de cela ma soeur », discute deux soeurs entre elles.

Quel choc de lire tous ces témoignages, où l’on comprend que la pression et la violence masculine est loin d’être passée.

Les statistiques au Luxembourg

Où en sont les statistiques au Luxembourg ? Au cours de l’année 2016 (statistiques les plus récentes trouvées dans notre base interne), la police grand-ducale a procédé à 789 interventions, dont 256 ont donné lieu à une expulsion. Ces dix dernières années, le chiffre moyen annuel des expulsions s’élève à 283. En clair, la violence conjugale stagne depuis des années, sans vraiment régresser.

En moyenne, tous les mois, la police grand-ducale intervient 65,75 fois et procède à 21,33 expulsions selon ses statistiques de 2016. Ce sont principalement les centres d’intervention de Luxembourg et d’Esch-sur-Alzette qui sont concernés. La majorité des interventions policières ont lieu le week-end avec des pics constatés pour la période de… mai à juillet.
Le Luxembourg dispose pourtant d’un arsenal répressif complet dans la lutte contre les violences conjugales (allant des mesures d’urgence d’expulsion temporaire du domicile aux poursuites pénales aggravées).

Il faut donc que les victimes parlent, avec la même force, avec le même courage peut-être que toutes ces jeunes femmes sur les réseaux sociaux.

Hubert Gamelon.

Contacts pour les victimes de violences conjugales :

• Police : 113

• Umedo (service médical pour conserver des preuves des violences, avant même de se décider à porter plainte) : +352 621 85 80 80 et https://umedo.lu/fr

• Femmes en détresse Luxembourg : Tel. 49 08 77-1.

• Liste complète des infrastructures d’aides et d’accompagnement (hébergement etc.) ici.

Et pour les auteurs de violences conjugales…

La Croix-Rouge luxembourgeoise assume le service Riicht Eraus, à destination des auteurs de violences conjugales. Il s’agit de profiter d’un esprit de culpabilité qui hante éventuellement l’auteur pour l’accompagner vers la non-violence, « trouver des stratégies concrètes qui permettent une modification durable du comportement » et « soutenir formellement la démarche de la personne qui veut changer »… sachant que tout cela peut contribuer à éviter un tel drame comme celui de Remich, en soignant les violences dès les premiers actes.

Contact : Tel 27 55-5800 et riichteraus@croix-rouge.lu

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.