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«L’impact de la crise sur la santé mentale des jeunes est préoccupant»


D’après les différentes études menées jusqu’ici, le mal-être est très polarisé en fonction du milieu socioéconomique : sans surprise, les jeunes les plus précaires souffrent davantage de la situation actuelle que les autres. (illustration Isabella Finzi)

La crise sanitaire n’est pas sans conséquences sur le bien-être de la population, et tout particulièrement celui des plus jeunes. Une helpline vient d’ouvrir pour les soutenir.

Il y a plusieurs mois, dans son étude Regards, 8-2020, menée en collaboration avec TNS Ilres, le Statec avait déjà mis en lumière que «la pandémie de Covid-19 et sa lutte ont eu des dommages collatéraux importants sur la santé mentale» et que «les jeunes s’en sortent moins bien que les plus âgés». Après un an de crise, entre reconfinement et couvre-feu, la situation ne s’est guère arrangée, comme le constatent les professionnels du Centre psycho-social et d’accompagnement scolaires (CePAS), structure qui propose notamment un accompagnement psycho-socio-éducatif aux adolescents, jeunes adultes ainsi qu’à leurs parents ou tuteurs.

«L’impact de la crise sur la santé mentale des jeunes est préoccupant. Nous avions observé une accalmie en automne, mais la deuxième vague a généré à nouveau un sentiment d’insécurité. Au CePAS, nous recevons beaucoup de jeunes en consultation et force est de constater qu’ils vivent mal tous ces changements constants : ils ont du mal à se projeter, les angoisses sont grandissantes, l’estime de soi diminue, ils ressentent un sentiment d’impuissance, souffrent de troubles alimentaires, les violences physiques et verbales sont en augmentation… Et c’est un fait : le taux de suicide a augmenté au Luxembourg», fait savoir Veronica Rocha, chargée de communication au sein du CePAS.

Il faudra attendre cet été le «Rapport national sur la situation de la jeunesse au Luxembourg» pour obtenir des données et des analyses précises de la situation, mais les professionnels se voient bel et bien chaque jour confrontés à un mal-être grandissant.

Les liens sociaux, essentiels

Bien sûr, nous ne sommes pas en guerre et l’eau et la nourriture restent accessibles, mais les changements (de rythme, de cadre de vie, de travail), qu’ils soient positifs ou négatifs, sont malgré tout des facteurs de stress pour l’être humain, auquel vient s’ajouter l’isolement, souvent difficile pour l’«animal social» que nous sommes. Et le mal-être est d’autant plus grave que la situation socioéconomique du mineur est fragile : sans surprise, les études menées jusqu’ici relèvent que les plus précaires souffrent d’autant plus de la situation actuelle.

«La création et le maintien de liens sociaux et d’une proximité relationnelle est actuellement vitale pour nous tous et pour les jeunes tout particulièrement. Dans ce cadre, nous pensons qu’il est important de maintenir un contact permanent avec les jeunes. En tant que professionnels, nous pouvons contribuer activement à les aider ainsi que leurs familles à trouver les ressources dont ils ont besoin pour traverser cette période», estime Veronica Rocha.

Afin d’aider les jeunes à passer ce cap difficile et fournir des outils aux professionnels de la jeunesse, le ministère de l’Éducation nationale a donc récemment lancé la campagne #act4support, qui comprend une série d’initiatives parmi lesquelles la réactivation de la helpline 8002-9393, une ligne téléphonique que les enfants, adolescents et familles en situation de stress peuvent contacter de manière anonyme, gérée par le CePAS et l’Office national de l’enfance (ONE).

Au bout de la ligne, trois professionnels de l’administration et du personnel socio-pédagogique se chargent quotidiennement de répondre aux appels afin de fournir une première aide d’urgence et de rediriger les appels, notamment vers l’un des psychologues et psychothérapeutes du CePAS. Ils sont une dizaine de professionnels de la santé mentale à participer à ce travail.

Depuis la réactivation de la helpline, fin janvier, l’ONE affirme avoir déjà reçu une quarantaine d’appels, «la moitié des appels concernant des familles touchées par le surmenage parental, les autres concernant des demandes de jeunes liées au logement ou l’école à la maison». «Les jeunes qui allaient déjà mal avant la crise, ont augmenté leurs consultations. Ils préfèrent d’ailleurs le présentiel au distanciel. Quant aux autres, ils ont tendance à tarder à consulter, à faire le premier pas. D’où l’importance de détabouiser la santé mentale de façon à ce que les jeunes soient pris en charge rapidement et trouvent une écoute avant que les choses ne se compliquent davantage pour eux. Le fait qu’il y ait un retrait social, le fait d’être contraint à rester isolé, bloque aussi la demande d’aide», déplore Veronica Rocha.

Tatiana Salvan

La helpline 8002-9393 est accessible tous les jours ouvrables de 8h à 18h.

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