Quelle est la situation concernant les boîtes et clubs de nuit ? Jean-Claude Colbach, de l’IKKI, en donne un aperçu. Il se montre très déçu de l’intervention du Premier ministre, qui n’a pas évoqué, mercredi, les difficultés du secteur.
Notoirement connu des noctambules et fêtards des Rives de Clausen, l’établissement IKKI explique souffrir gravement des restrictions sanitaires. Son administrateur délégué, Jean-Claude Colbach, fait le point et annonce qu’une ASBL rassemblant des acteurs du secteur de l’Horeca vient d’être créée afin de faire front commun (lire ci-dessous). Pour l’entrepreneur, la situation est proche de la catastrophe : «Ça va très mal. Nous avons rouvert l’IKKI fin mai avec la restriction horaire nous forçant à fermer à minuit. Or une discothèque travaille, en général, à partir de minuit… À part une petite clientèle fidèle que nous avons eue en terrasse durant les mois d’été, il faut bien se rendre compte que la clientèle de clubbing arrive à 23h. En clair, nous n’avons plus du tout d’activités de clubbing depuis cette réouverture de fin mai», explique-t-il.
Les affaires de Jean-Claude Colbach sont loin d’avoir été arrangées à la fin du mois d’octobre avec l’instauration du couvre-feu à 23h : «Avec un départ obligé des clients à 22h30, notre activité a carrément été réduite à zéro. C’est une débâcle et c’est très pénible.» Le responsable de l’IKKI déplore le fait qu’il n’y ait pas d’aides étatiques en conséquence, «mais juste de petites aides par rapport au chômage partiel». Le patron qu’il est rappelle qu’il doit toujours payer, depuis le mois de mars et le confinement, sa cotisation relative à la pension ou encore ce qui relève des impôts sur les salaires. De même, il indique que la charge patronale est toujours due. «Cela revient, au final, à un montant énorme, surtout lorsque l’on ne rentre aucun chiffre d’affaires.»
«Un Xavier Bettel très décevant mercredi !»
Mais le problème majeur, selon Jean-Claude Colbach, restera toujours le loyer qui lui revient à «plus de 20 000 euros par mois». Quant à son activité de restauration, elle est tombée à environ 50%. Il n’hésite pas à pointer du doigt les médias : «Beaucoup de personnes ont peur, entre autres à cause de la médiatisation qui est faite autour du Covid-19. Elle ne donne pas envie aux gens de sortir. Nous sommes énormément en souffrance», lance-t-il. Et pour couronner le tout, le patron a dû souscrire des crédits personnels pour s’en sortir. «Déjà pour sauver l’établissement.»
De manière générale, il déclare se sentir abandonné et estime que le secteur de l’Horeca est «le plus touché depuis le début et le gouvernement le sait». Le chef d’établissement rappelle qu’ «il n’y a pas plus d’aides pour le secteur» et que ce qu’il a perdu en termes de chiffre d’affaires de mars à fin mai, il l’a juste récupéré sous forme de chômage partiel. «Or il y a d’autres charges fixes : assurances, frais d’énergie, loyers, charges patronales, leasings, éventuels prêts bancaires…»
Malgré l’arrivée prochaine d’un vaccin, le patron dit avoir peur que «la vie nocturne ne reprenne pas avant très longtemps». Et quant aux annonces de Xavier Bettel de mercredi, il se montre catégorique et implacable : «Nous sommes au bord du gouffre et le Premier ministre ne prononce pas un seul mot par rapport à notre condition, alors qu’il avait annoncé un remboursement de nos frais il y a peu… C’est inimaginable de sa part et très décevant ! Tout le secteur reste dans l’inconnu… C’est un manque de respect !» À bon entendeur…
Claude Damiani
Une ASBL pour faire front commun
Face à cette situation interminable pour les acteurs du secteur Horeca et de l’industrie du divertissement et des loisirs, une association de défense vient de se créer.
Jean-Claude Colbach, le patron de l’IKKI, qui est le président de l’ASBL, et Claude Legrand (du bowling de Foetz), qui l’a rejoint, nous en expliquent les tenants et aboutissants. «Don’t forget us (Ne nous oubliez pas)» : tel est le nom de cette association nouvellement créée, laquelle a de fortes allures de syndicat. «Nous nous sommes rassemblés en vue de faire appel au gouvernement pour qu’il ne nous oublie pas», précise Jean-Claude Colbach. «De plus en plus d’entrepreneurs nous rejoignent, dont de grands restaurateurs du pays», ajoute Claude Legrand. Ils sont, à l’heure actuelle, une bonne quarantaine, voire plus, de membres actifs et une première affaire a récemment été portée devant le tribunal. «Nous attendons un premier jugement en janvier», rapporte Claude Legrand. Le patron de l’IKKI va encore plus loin : «Essayer de faire baisser les chiffres des infections au Covid-19 en fermant l’Horeca et, de l’autre côté, laisser ouverts les transports publics, les écoles et surtout inviter au shopping non essentiel de Noël à l’occasion du Black Friday, par exemple, nous semble disproportionné», juge Jean-Claude Colbach. «Donc, ce second lockdown n’a rien apporté et on nous prend pour les plus grands débiles», renchérit-il.
«Le commerçant ne doit pas payer pour la santé publique»
Une conférence de presse est d’ores et déjà planifiée par l’ASBL qui compte bien faire valoir ses droits. «Nous avons respecté toutes les consignes sanitaires pendant des mois, nous avons investi de l’argent, moi-même j’ai fait des sacrifices par rapport à ma future pension… et le shopping peut continuer à tourner… Ce sont deux poids deux mesures», estime le responsable de l’IKKI. «On voit que l’État ne fait rien pour nous et on a l’impression d’être ces petits cafetiers de m… qui sont remplaçables. Nous ne sommes pas vraiment considérés comme des acteurs économiques sur cette place luxembourgeoise et même peut-être européenne, mais nous n’y sommes pour rien et nous demandons de l’aide concrète», conclut Jean-Claude Colbach, pour qui «le commerçant ne doit pas payer pour la santé publique».
C.D
Hélas, c’est tout un secteur de l’économie luxembourgeoise qui pâtit! Et faut-il le rappeler en temps de réseaux sociaux, l’attractivité d’une destination pour des étudiants et des expats talentueux comme le Luxembourg en cherche vient aussi de la diversité culturelle et de l’offre nocturne!