Le groupe parlementaire du Parti chrétien-social a lancé vendredi cinq convocations pour échanger avec six ministres sur la crise du Covid-19, non pas par viséoconférence mais selon le format classique : dans une salle de réunion de la Chambre avec au tour de la table les membres du gouvernement et les députés. Le LSAP fustige cette demande en période de confinement.
La Chambre des députés vient de vivre sa première semaine en confinement. La plupart des réunions de commissions parlementaires s’est déroulé par viséoconférence, une grande première. «Cela fonctionne bien», estime Georges Engel, chef de la fraction socialiste sur son compte Facebook.
Samedi, les députés avaient adopté à l’unanimité une motion initiée par le CSV. Le gouvernement a été invité «à informer au minimum hebdomadairement la Chambre des députés à travers la Conférence des Présidents, le Bureau de la Chambre et, les cas échéant, une représentation de la commission afférente et à y répondre aux questions des Députés sur l’évolution de la crise sanitaire». Une première réunion de ce type a eu lieu dès lundi. Dans la même motion est rappelé «l’obligation du gouvernement de répondre aux questions posées par les députés et ceci tant dans le cadre de questions parlementaires que dans la cadre des commissions de la Chambre des députés».
Les ministres Bofferding, Meisch, Kersch, Cahen et Schneider convoqués
A priori, les partis étaient d’accord de privilégier la viséoconférence pour poursuivre leurs travaux, et le cas échéant, convoquer des ministres. Le CSV est cependant monté vendredi au front pour demander une «présence physique» des ministres ainsi que des députés pour cinq réunions de commissions parlementaires. La liste de doléances concerne les Affaires intérieures, l’Éducation, le Travail, la Famille, la Sécurité sociale et l’Agriculture et donc les ministres Taina Bofferding, Claude Meisch, Dan Kersch, Corinne Cahen et Romain Schneider.
«Notre groupe politique souhaiterait voir convoquer une réunion jointe de la Commission de la Sécurité sociale et de la Commission de la Famille et de l’Intégration, et ce en présence de Madame la ministre de la Famille et de l’Intégration et de Monsieur le ministre de la Sécurité sociale afin de faire le point sur la situation des personnes âgées notamment celles qui bénéficient des prestations de l’assurance dépendance et celles qui sont hébergées dans une structure pour personnes âgées (maison de retraite, CIPA et autre) et du personnel encadrant y relatif, et ce au vu de l’évolution de la pandémie Covid-19 au Luxembourg», écrit notamment le CSV au président de la Chambre, Fernand Etgen. Dans chaque demande de convocation on retrouve la phrase «Nous souhaiterions que cette réunion jointe se fasse avec présence physique des membres des commissions concernées et de celle des ministres en question».
«La revendication du CSV est irresponsable»
Le fait d’insister sur la «présence physique» des ministres mais aussi des députés autour d’une table de réunion provoque notamment l’ire du LSAP. Pour Georges Engel, il existe un seul mot d’ordre en cette période de crise sanitaire : #bleiftdoheem, ou traduit en français #restezàlamaison. «Il s’agit de deux mots clairs et nets. La revendication du CSV est irresponsable», fustige le chef de fraction socialiste sur Facebook. Il est rejoint par le président du LSAP, Yves Cruchten. «Si nous disons aux gens de rester à la maison et d’essayer de faire du télétravail, nous ne pouvons pas faire le contraire en tant que Chambre, d’autant plus s’il est possible de procéder autrement», écrit le chef de file du LSAP.
Toujours sur Facebook, le président du CSV, Frank Engel, se félicite d’une réunion par viséoconférence du collège échevinal de Niederanven. «Je souhaiterai que cela puisse aussi fonctionner à la Chambre», note l’ancien député européen. Aucune trace de revendication à convoquer les ministres pour une réunion «physique».
Déjà un accrochage samedi dernier
Djuna Bernard, co-présidente de déi gréng, lance aussi un appel à la raison sur les réseaux sociaux. «Oui, le camp politique doit en cette situation assumer sa responsabilité, d’autant plus que nous avons déclenché l’état de crise. La Chambre en tant que Premier pouvoir doit continuer à fonctionner, ce qui implique aussi que nous protégions nos mandataires vulnérables et tous nos collaborateurs», indique la députée. Du coup, la Chambre devrait éviter les réunions physiques et recourir aux viséoconférences. «Nous devons agir en conséquence et respecter les mêmes règles que le grand public», conclut Djuna Bernard.
Lors de la séance plénière de samedi, qui a prolongé l’état de crise pour trois mois, la cheffe de fraction du CSV, Martine Hansen, s’était déjà heurtée au LSAP et à déi gréng. Elle avait notamment reproché au gouvernement d’avoir pris des mesures trop peu cohérentes et coordonnées. C’est ainsi «avec du mal au ventre» que les députés chrétiens-sociaux ont finalement voté le projet de loi sur l’état de crise.
Deux séances plénières la semaine prochaine
Tout cela n’empêche pas que des ministres se déplacent à la Chambre. Ce vendredi, la ministre de la Justice, Sam Tanson, était présent en salle plénière pour répondre aux questions des députés, liées à l’état de crise mais aussi à la révolte des prisonniers à la prison de Schrassig. Par contre, aussi bien Georges Engel et Yves Cruchten, présidant les commissions de l’Emploi, de la Sécurité sociale et des Affaires étrangères, ont d’ores et déjà annoncé avoir convenu avec les ministres Dan Kersch (Travail), Romain Schneider (Sécurité sociale) et Jean Asselborn (Affaires étrangères) d’organiser la semaine prochaine des réunions par viséoconférence.
Mardi et jeudi, la Chambre des députés va se réunir en séance plénière. Ici, les députés et ministres sont obligés d’être présents physiquement, aussi pour procéder aux votes. À l’ordre du jour figure notamment le très attendu projet de loi pour attribuer des aides directes aux PME.
David Marques