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« Le barreau luxembourgeois a besoin de plus d’avocats »


Devant les juridictions, l'avocat doit se présenter tête nue et sans signe d'apartenance, religieuse, communautaire, philosophique ou politique. (illustration Fabrizio Pizzolante)

L’ordre des avocats a déposé, avant les vacances, un projet auprès du ministre pour plus de flexibilité en termes d’exigences linguistiques pour accéder à la profession.

En 1988, le barreau de Luxembourg comptait 250 avocats. En 2001, ils étaient autour de 1 000. Aujourd’hui, près de 2 500 y sont inscrits. L’ordre des avocats ne compte pas s’arrêter là.

C’est un dossier qui mijote depuis un certain temps du côté du barreau de Luxembourg : la flexibilisation des exigences linguistiques pour accéder à la profession d’avocat (liste II). Aujourd’hui, la loi impose en effet la maîtrise des trois langues officielles : le français, l’allemand et le luxembourgeois. «Or la moitié des avocats du barreau de Luxembourg n’exercent pas au sein des tribunaux, mais dans des cabinets où ils pratiquent le droit bancaire et financier. Pourquoi les pousserait-on à apprendre le luxembourgeois ?», argue le bâtonnier. Me François Prum soulève qu’actuellement au barreau de Luxembourg, il y a plus d’avocats francophones inscrits que de luxembourgeois.

Il poursuit : «L’actuelle demande en juristes nous dicte de changer de texte. Nous sommes d’avis qu’à l’avenir nous ne devrons plus exiger la pratique des trois langues. Nous voudrions réserver aux candidats de la liste II le même sort que les candidats de la liste IV : c’est-à-dire exiger la pratique de la langue française, mais plus l’allemand et le luxembourgeois. En revanche, un avocat peut seulement accepter un dossier s’il maîtrise sa matière et sa langue.»

Assistance judiciaire : 5 000 demandes par an

Avant les vacances, l’ordre des avocats a remis son projet de réforme concret au ministre de la Justice. Le projet est actuellement analysé.

Un autre sujet abordé par le barreau est l’assistance judiciaire. Ses demandes tournent autour de 5 000 par an. Longtemps leur traitement accusait des grands retards. «L’équipe qui s’occupe de la gestion de ces dossiers au barreau a été restructurée cette année. On n’affiche plus de retard aujourd’hui», se réjouit Me Prum. Le barreau regrette toutefois que les taux horaires pour l’assistance judiciaire n’ont pas été indexés depuis 2009. Un avocat de la liste II touche ainsi toujours 57 euros et un avocat à la Cour 87 euros. Le bâtonnier indique qu’ils ont aussi engagé des pourparlers avec le ministère de la Justice pour introduire des sortes de forfaits pour les procédures standard (par exemple la défense au pénal d’un toxicomane).

Les demandeurs d’asile ont aussi droit à l’assistance judiciaire. Ceux originaires des Balkans bénéficient d’une procédure accélérée. Une liste de permanence avec une cinquantaine d’avocats spécialisés en la matière a été dressée. «D’après les retours qu’on a eus, cela fonctionne bien», indique le barreau. Pour leur travail, les avocats disposent d’une liste de la Croix-Rouge avec des interprètes assermentés.

Enfin, le bâtonnier est revenu sur l’incident survenu jeudi dernier lors de l’assermentation d’une centaine de candidats avocats. Une Française de 30 ans n’a pas été assermentée à cause du voile qu’elle portait. La candidate remplissait toutes les conditions pour pouvoir prêter serment. Mais le bâtonnier, Me Prum, lui a dit qu’il ne pouvait pas la présenter à la Cour avec son signe d’appartenance religieuse. La candidate n’a pas voulu renoncer à son voile. «La robe symbolise l’égalité entre les avocats, rappelle le barreau. L’association de tout signe distinctif est contraire aux principes essentiels régissant la profession.» «Si un candidat s’était présenté avec un pin’s de l’OGBL ou du LCGB, ou avec une casquette, il n’aurait pas pu être assermenté non plus», illustre Me Prum.

Fabienne Armborst