Accueil | Politique-Société | L’agriculture luxembourgeoise face à la crise

L’agriculture luxembourgeoise face à la crise


"Nous devons donner aux producteurs un signal fort, leur montrer que nous prenons des décisions mais aussi que nous mettons la pression sur la Commission", insiste le ministre de l'Agriculture Fernand Etgen. (Photo François Aussems)

Fils d’agriculteurs, Fernand Etgen se targue de bien connaître leur mentalité. Le ministre de l’Agriculture veut leur envoyer un signal fort tout en leur rappelant leurs missions.

Les agriculteurs luxembourgeois ont exprimé leur solidarité avec les agriculteurs français qui ont âprement défendu leurs intérêts. Leur situation est-elle comparable ?

Fernand Etgen : D’abord, la crise laitière est une crise européenne et ses causes sont multiples. Nous avons une production de lait plus importante en Europe, mais aussi en Australie et en Nouvelle-Zélande. Nous subissons toujours les conséquences de l’embargo russe et la demande de produits laitiers de la part des Chinois n’atteint pas le niveau qui avait été prévu en début d’année. La solidarité doit jouer entre les États membres, mais aussi entre les différents producteurs. En France, ce n’est pas seulement une crise laitière qui affecte le monde paysan, mais également une crise de la viande, notamment celle du porc.

Le prix du lait est pourtant tombé sous la barre des 30 centimes au Luxembourg contre tous les pronostics…

Oui, à partir du mois d’avril, nous avons enregistré une baisse d’un demi-cent par mois. En juillet, le prix du lait est tombé effectivement à 28,80 centimes le litre, ce qui est extrêmement bas. En décembre 2013, on était à 43 centimes le litre. Nous avions pronostiqué que le prix ne descendrait pas sous la barre des 30 centimes mais, oui, nous y sommes ! En plus, nous sommes confrontés cette année à la sécheresse. Dès que leurs réserves seront épuisées, les agriculteurs devront acheter des aliments pour les vaches qui n’ont plus rien à brouter et tout cela engendre des frais supplémentaires.

La situation vous a forcé à convoquer un Conseil européen « Agriculture » à la rentrée. Quelles sont vos attentes ?

Dès le premier conseil que nous avons présidé, nous avons placé sur l’agenda l’évolution sur le marché des prix des produits agricoles. Nous avons donc convoqué un conseil formel extraordinaire des ministres de l’Agriculture pour le 7 septembre et non pas un conseil informel, où aucune décision ne peut être prise. Nous devons donner aux producteurs un signal fort, leur montrer que nous prenons des décisions mais aussi que nous mettons la pression sur la Commission.

Quelles sont les variations nationales de la politique agricole luxembourgeoise par rapport à nos deux grands voisins, la France et l’Allemagne ?

Nous nous distinguons, par exemple, en ce qui concerne la filière porcine et bovine où nous avons mis en place des labels de qualité. Ces derniers garantissent aux producteurs un certain prix contre une qualité supérieure qui fait l’objet de contrôles rigoureux. Ce n’est pas toujours le cas dans les pays voisins.

C’est la raison pour laquelle nous essayons maintenant au niveau européen d’avoir des contacts avec toute la filière pour garantir un prix correct aux paysans, mais c’est toujours facultatif, également en France. Les accords qu’ils ont obtenus sur le prix du lait ne sont pas contraignants. Je crois qu’au Luxembourg, les filières sont mieux organisées, dans le cadre des labels de qualité que je viens de citer. Nos producteurs vendent le kilo de viande bovine 20 centimes plus cher que les Français et ça fait une grosse différence.

Autre exemple, avec la viande de porc que nos producteurs vendent 1,49 euro le kilo alors que les Belges la vendaient 1,25 euro le kilo la semaine dernière.

Entretien avec Geneviève Montaigu

A lire en intégralité dans Le Quotidien papier de ce lundi