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José Antonio Coimbra de Matos : « Pourquoi décourager les Portugais et pas les frontaliers ? »


"De quoi a-t-on peur ? Que le Luxembourg soit colonisé par les Portugais ?" (Photo : Fabrizio Pizzolante)

José Antonio Coimbra de Matos, le président de la Confédération de la communauté portugaise au Luxembourg (CCPL), livre un regard sans concession sur la manière dont le pays considère ses compatriotes.

L’idée du choix d’une alphabétisation en allemand ou en français fait toujours débat. Cette possibilité que pourrait offrir le système éducatif luxembourgeois représente-t-elle la solution au problème des élèves d’origine portugaise qui peinent en allemand ?

José Antonio Coimbra de Matos : Nous nous réjouissions déjà quand le nouveau gouvernement semblait vouloir aller dans cette direction. Nous étions la première organisation à revendiquer la mise en place de ce système. Nous plaidons pour une école publique où tout le monde a sa place. Les opposants à cette idée d’alphabétisation en français craignent que cela entraîne une scission entre les élèves issus de l’immigration et les autochtones, entre les francophones et les germanophones. Mais quand je vois le pourcentage très mince d’élèves issus de l’immigration qui parviennent à entrer dans l’enseignement secondaire classique, cela n’est-il pas déjà la meilleure illustration d’une scission? Il faut être réaliste, on ne voit que des élèves d’origine non luxembourgeoise dans les classes de l’enseignement technique.

Bon, il y a aussi des Luxembourgeois, je ne dois pas exagérer, mais ils sont une minorité. Dans ces lycées techniques, l’enseignement se fait bien souvent en français et ça ne pose pas de problème. C’est quand même un non-sens de dire que tout ce qui est technique peut se passer de compétences exigeantes en allemand. Le problème réside toujours dans le manque de définition de la politique linguistique du Luxembourg. Je sais que ce n’est pas simple pour un ministre de l’Éducation nationale de trancher pour ce choix de l’alphabétisation. Madame Mady Delvaux avait essayé en son temps, mais elle a dû reculer face à la levée de boucliers du corps enseignant. Je pense que les Portugais, qui représentent un quart de la population du pays, ont le droit d’être entendus.

Justement, vous vous plaignez de ne pas être entendus. Mais le CCPL se fait-il suffisamment entendre ?

Nous avons rencontré le ministre de l’Éducation nationale, Claude Meisch, au début de sa prise de fonction et nous étions plus ou moins d’accord sur tout, mais nous constatons aujourd’hui un nouveau revirement. La moindre des choses serait peut-être de nous contacter et de nous proposer de revoir le problème. On ne peut pas avoir un double discours en politique, dont un qui serait davantage réservé aux électeurs. On entend souvent dire que la communauté portugaise est le grain de sable dans l’engrenage.

Je rappelle qu’il y a eu des accords entre le gouvernement luxembourgeois et le gouvernement portugais relatifs au groupe de pilotage pour l’enseignement de la langue maternelle portugaise ici à Luxembourg. Il devait y avoir un représentant de la société civile dans ce groupe, délégué par la CCPL. Cela fait plus d’un an que nous attendons d’être contactés, alors que nous savons très bien que ce groupe se réunit. Mais le procès-verbal de cette réunion lors de laquelle il a été décidé de joindre la CCPL au groupe de pilotage n’existe plus. Nous l’avons réclamé, mais personne ne le trouve. Nous disons simplement que le minimum serait de nous accorder une voix consultative, mais qu’au moins la société civile soit représentée dans ces différents organes.

De quels autres organes parlez-vous ?

Je pense notamment au Conseil national des programmes. Trouvez-vous normal qu’au sein de ce Conseil il n’y ait aucun représentant de la communauté portugaise avec 5 ou 6 organes de presse de langue portugaise qui s’adressent à 120 000 personnes ? Le problème, c’est que cette communauté est tellement grande qu’elle doit être cachée dans un coin! Nous voulons être acteurs à part entière de cette société et pas seulement en tant que travailleurs.

Geneviève Montaigu

Retrouvez l’interview du lundi en intégralité dans le Quotidien papier de ce lundi.

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Un commentaire

  1. Baumann Brigitte

    Bonjour,
    je comprends que le luxembourgeois et l’allemand soit plus compliqué pour les résdents portugais du Luxembourg. Cependant je ne suis pas d’accord avec vos propositions publiées dans l’Essentiel du Lundi 11.4.2016 que les enseignants luxembourgeois devraient faire une immersion dans les universités portugaises pour apprendre la culture portugaise, ils devraient,

    au contraire, se familiariser avec la culture luxembourgeoise. Ils vivent dans mon pays.
    En plus , que faites vous des difficultés rencontrées par les Luxembourgeois qui doivent apprendre le Français, langue qui leur est tout aussi difficie à apprendre que l’allemand l’est pour les Portugais N’oubliez pas que le Luxembourgeois est une langue d’origine allemande.

    Question très pertinente pour vous Monsieur. Croyez vous, qu’au Portugal ces démarches seraient faites, si la situation le demandait ?
    Bien à vous
    Brigitte Baumann

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