Greenpeace a lancé jeudi une action, en amont de la séance de la Chambre, afin de sensibiliser aux investissements du Fonds de compensation commun (FDC), que l’ONG estime «irresponsables».
Sept membres de Greenpeace Luxembourg, dont quatre activistes, ont déployé une banderole devant le Cercle Cité afin de dénoncer la politique d’investissement dans les énergies fossiles menée par le Fonds de compensation commun au régime général de pension (FDC). L’action coïncidait avec une demande d’interpellation à ce sujet du député déi Lénk Marc Baum. «Cette bannière que notre ONG a déployée avait pour objectif d’inciter les politiciens à se positionner, mais également à envoyer un signal clair au gouvernement ainsi qu’au conseil d’administration du FDC pour qu’il cesse d’investir dans les énergies fossiles et respecte les conditions de l’accord de Paris sur le climat», explique Myrna Koster, chargée de Justice climatique à Greenpeace Luxembourg.
L’ONG a souligné que les investissements réalisés dans les énergies fossiles, et notamment dans le charbon, ont augmenté de 60 % depuis 2015. «Or le FDC se pose comme ayant une stratégie d’investissement responsable, ce que nous réfutons, souligne Myrna Koster. Surtout que le charbon est l’énergie fossile la plus nocive vis-à-vis du climat, ce qui va à l’encontre de l’urgence climatique.» Pire, l’ONG dénonce «la position contradictoire du Luxembourg, qui se dit être une place financière verte et qui poursuit sa stratégie d’investissement dans des entreprises pétrolières notamment, après avoir établi une liste d’exclusion d’entreprises» pas entièrement pertinente, selon Greenpeace. Bref, il n’y aurait pas d’avancée sur cette question, bien que le pays ait commencé depuis 2017 à développer une stratégie qu’il qualifie de «responsable», dixit Myrna Koster.
Selon Greenpeace, le ministre de tutelle du FDC, Romain Schneider, serait parfaitement au courant des revendications de l’ONG «depuis une action en justice contre lui datant de 2019 devant le tribunal administratif». Mais il ferait la sourde oreille, tout comme le président du conseil d’administration du FDC, Fernand Lepage. Concrètement, l’ONG environnementale s’insurge contre le fait que le fonds aurait investi quelque 21 et 22 milliards d’euros en 2019 et 2020 dans des entreprises qu’elle qualifie de climaticides, bafouant l’accord de Paris sur le climat. «Il n’y a donc pas de stratégie dite responsable tant que les objectifs liés à la transition énergétique ne sont pas respectés», estime Greenpeace.
Investissements ni durables ni responsables
Certes, l’ONG sera reçue par le ministre de la Sécurité sociale, Romain Schneider et par Fernand Lepage, pour une entrevue sollicitée depuis longtemps, mais elle ne sait pas ce qu’il en ressortira. Greenpeace indique cependant que les deux autres ministres impliqués de près ou de loin, Carole Dieschbourg (Environnement) et Pierre Gramegna (Finances), se montrent relativement réceptifs à leurs doléances.
Quoi qu’il advienne, et quelles qu’aient pu être les conclusions de l’interpellation voulue par Marc Baum jeudi à la Chambre (lire encadré), l’ONG assure qu’elle continuera son combat. Car, de manière générale, elle est d’avis que «l’argent des citoyens ne doit pas être investi dans les énergies fossiles, car cela n’est pas durable et représente un risque pour leurs pensions, car il y aura forcément des pertes au moment de faire la transition énergétique». De manière générale, l’ONG estime qu’«il n’y a pas de raison de ne pas changer la politique d’investissement du FDC, car les investissements durables sont aussi rentables, voire plus, que ceux réalisés dans les énergies fossiles. Sans oublier la responsabilité certaine qu’a le FDC envers les citoyens.»
Claude Damiani
«En discuter avec les partenaires sociaux»
Le ministre de la Sécurité sociale, Romain Schneider, a largement défendu la gestion du FDC en évoquant à plusieurs reprises la transparence dont il ferait preuve, mais aussi en assurant de manière catégorique qu’il n’y avait aucun risque relatif au paiement effectif des pensions. Il a également défendu la «responsabilité sociale» dont ferait preuve le FDC et rappelé l’établissement, par l’État, d’une liste d’exclusion d’entreprises n’étant pas sur la même ligne que les valeurs liées aux objectifs de l’accord de Paris. En conclusion, le ministre de tutelle du FDC a appelé à «une discussion franche avec les partenaires sociaux», qui devra prochainement avoir lieu. De quoi satisfaire Greenpeace ? L’avenir le dira.