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Homoparentalité : elles ont fait un bébé toutes seules [dossier]


Deborah et Sandrine se réjouissent de la naissance prochaine de leur premier enfant, qui devrait naître au mois de juillet prochain.

Sandrine et Deborah, un couple homosexuel vivant au Luxembourg, ont eu recours à la procréation médicalement assistée pour faire un enfant dont elles seront, à terme, toutes les deux les mamans. De l’autre côté de la frontière, en France, c’est souvent le parcours du combattant pour ces femmes qui veulent fonder une famille. Au Grand-Duché, les choses se font plus aisément.

Deborah et Sandrine vivent à Luxembourg une belle histoire d’amour depuis quatre ans maintenant. Sur le point de se marier dans quelques semaines, elles attendent un heureux évènement pour le mois de juillet. Pour ce couple très fusionnel, le désir d’enfant s’est manifesté assez tôt, et avec cela toutes les interrogations qui accompagnent les couples homosexuels.

C’est en assistant à un véritable baby boom autour d’elles, que Deborah et Sandrine se sont mises elles aussi à rêver d’enfant  : « Il faut dire qu’on y pensait depuis le début en fait, mais tout en sachant qu’il faudrait très certainement se rendre en Belgique et que les démarches seraient compliquées », explique Sandrine. « Tout notre entourage s’est mis à avoir des enfants, et évidemment, on nous demandait quand est-ce que ça allait être notre tour », ajoute Deborah.

Avec toujours cette envie dans un coin de leur tête, c’est tout bêtement par le bouche à oreille que la solution s’est présentée à elles  : « Nous avons un couple d’amis hétérosexuel qui a dû passer par une fécondation in vitro. Ils nous ont mis en contact avec un couple de femmes qui ont fait appel à une banque de sperme située au Danemark. C’est en allant sur leur site internet quelques jours plus tard que tout s’est déclenché », poursuit Sandrine.

Là, c’est comme un catalogue de vente en ligne, il suffit de cliquer sur les trois premiers critères concernant le donneur  : race, couleur de yeux et de cheveux. Il ne reste plus qu’à faire son marché… « On avait plus qu’à choisir un donneur, ça paraissait tellement facile, on apprend beaucoup de choses sur eux, sur leurs antécédents, ce qu’ils font dans la vie, leur taille, leur pointure, il y a parfois des photos d’eux enfants. On a choisi un donneur qui a la couleur des cheveux et des yeux de Sandrine, c’est plus symbolique qu’autre chose bien sûr », raconte Deborah.

Un résultat après trois inséminations

Car c’est cette dernière qui portera l’enfant, le couple s’est décidé après pas mal de réflexions. « J’ai 15  ans de plus que Deborah, je vais avoir 40  ans cette année, alors qu’elle n’a que 25 ans. Je pensais commencer d’abord et qu’on porterait chacune un enfant, mais finalement nous avons décidé que Deborah le ferait, car vu qu’elle est plus jeune, nous mettons plus de chances de notre côté », explique Sandrine.

C’est au bout de la troisième insémination que Deborah tombe enceinte, des rendez-vous se multiplient chez le gynécologue car l’insémination se fait au pic de l’ovulation, et cela se mesure tous les deux jours. Puis, c’est à chaque fois 15  jours d’attente après l’insémination  : « L’attente était horrible, les minutes étaient des heures, c’était les 15  jours les plus longs de notre vie », indique le couple.

Et puis c’est la joie immense quand le couple apprend que Deborah est enceinte. Depuis l’annonce de la grossesse, elles nagent dans le bonheur. Dans quelques jours, l’échographie devrait déterminer le sexe de l’enfant  : « On est tellement pressées de savoir, pour commencer à acheter ce qu’il faut, décorer sa chambre », se réjouit Deborah.

Mais le fait qu’elles soient mariées d’ici à la naissance ne va pas changer grand-chose concernant la filiation. Pendant les premières semaines de la vie de l’enfant, seule Deborah sera légalement la mère. Sandrine va devoir entamer les démarches pour adopter le bébé à partir de ses trois mois. Même si, évidemment, pour ces deux futures mamans, il n’y a pas de doute, c’est leur enfant qui va naître. Un lot de démarches administratives dont se serait bien passé le couple, qui a dû contacter un avocat spécialisé pour faire les choses en ordre.

En attendant, les deux femmes apprécient l’ouverture du Luxembourg  : « On peut se tenir la main sans problème dans la rue, nous avons des sourires et des clins d’œil complices d’autres femmes dans la salle d’attente du gynécologue, l’équipe qui a procédé à l’insémination a été très enthousiaste quant à notre projet », se félicite Sandrine. « Cela me réjouit que mon pays soit aussi ouvert, c’est vraiment une belle image que renvoie le Luxembourg en nous permettant de fonder une famille », ajoute Deborah.

Audrey Somnard

Un géniteur sur catalogue

Une banque de sperme danoise permet aux femmes (homos, hétéros, seules) de sélectionner le géniteur de leur enfant.

Cryos se présente comme la plus grande banque de sperme au monde.

Cryos se présente comme la plus grande banque de sperme au monde.

C’est un peu comme commander n’importe quel autre article sur un site de vente en ligne, sauf qu’il s’agit de choisir le géniteur de son enfant. Il y a même un panier avec un logo en forme de poussette… On choisit le type de géniteur que l’on veut en commençant par des critères larges, dès la page d’accueil du site, tels que l’origine (le site livre dans le monde entier), la couleur des yeux et des cheveux. Ensuite, on affine la recherche par des données très précises.

Les donneurs anonymes, qui sont nommés par un pseudonyme, donnent beaucoup d’éléments sur leur vie, leur parcours, leur niveau d’études, leurs passions, sans compter leurs détails physiques (pointure, taille, corpulence), certains fournissent même des photos d’eux enfant, pour donner une idée de ce à quoi ressemblera la future progéniture.

Un grand éventail de donneurs

Il suffit donc de faire son choix, et l’éventail de donneurs est grand… Bien évidemment, les donneurs ont signé une décharge qui les empêche de réclamer quoi que ce soit à leur future progéniture ou aux femmes qui ont utilisé leur semence. Une fois que le couple a choisi l’élu en fonction de ses propres critères, il peut également vérifier si la semence du donneur a déjà été utilisée dans son pays.

Les chances sont infimes de rencontrer quelqu’un qui est issu de même géniteur, mais au moins le site propose d’éviter les donneurs dont la semence a été utilisée près de chez soi. Les qualités de sperme varient, et les modalités de livraison aussi. Avec trois tentatives pour une qualité de sperme moyenne, Sandrine et Deborah ont néanmoins déboursé près de 2 000 euros.

A. S.

PMA, GPA : quelle différence ?

La PMA englobe les différentes pratiques d’aide à la fécondation  : par simple insémination, in vitro ou par donneur anonyme. Elle est généralement permise, parfois depuis de longues années, aux couples hétérosexuels. Le débat porte sur le fait de la rendre utilisable pour les couples de femmes.

La GPA désigne le recours à une tierce personne pour «porter» l’enfant d’un couple (avec ou sans implantation d’un ovule fécondé in vitro), qu’il soit hétérosexuel ou homosexuel. Elle peut donner lieu à une rémunération de la mère porteuse. Il peut donc y avoir trois parties  : le futur parent qui va recevoir l’enfant, la donneuse d’ovule qui est la génitrice de l’enfant, et la mère porteuse qui, dans ce cas, n’a aucun lien génétique avec l’enfant. Pourtant, légalement, c’est cette dernière qui a le dernier mot en cas de litige.

Adopter au Luxembourg pour les couples homosexuels femmes : un jeu d’enfant

Pour les couples homosexuels femmes, adopter l’enfant biologique de sa conjointe est un jeu d’enfant au Grand-Duché.

Le mariage de couples du même sexe a amené avec lui la légitimité des familles homoparentales, du moins en ce qui concerne les femmes. Pour ces dernières, les tribunaux luxembourgeois acceptent comme une simple formalité que les conjointes adoptent de façon plénière l’enfant biologique du couple.

Que ce soit pour les couples hétérosexuels ou homosexuels, il n’existe pas de législation concernant la Procréation médicalement assistée (PMA) au Luxembourg : «Les règles sont fixées par les centres eux-mêmes qui se donnent des règles, avec des critères d’âge qui varient. Les équipes médicales étant plutôt bienveillantes au Luxembourg, les femmes homosexuelles n’ont pas de difficultés à accéder à la PMA. Cela se pratique de toute façon depuis de nombreuses années, avec des moyens « naturels » disons», explique Me Deidre Du Bois, avocate à Luxembourg. En cas de fécondation in vitro, là les choses se compliquent médicalement.

Le mariage pour personnes de même sexe a permis de faciliter les adoptions plénières au Luxembourg.

Le mariage pour personnes de même sexe a permis de faciliter les adoptions plénières au Luxembourg.

Dans les textes de loi, il faut partir du grand principe que celle qui accouche est par définition la maman de l’enfant. Pour les couples de femmes, la filiation homosexuelle n’est pas automatique à la naissance d’un enfant, que le couple soit marié ou pas. «Dans les textes de loi, l’enfant a un père et une mère, cela ne change pas. Ce qui a par contre changé avec le mariage de couples de personnes de même sexe, c’est que l’adoption plénière ne pose désormais plus aucun problème pour la conjointe. Cela arrive régulièrement au Luxembourg, et c’est l’adoption du mariage gay qui l’a rendu possible», poursuit l’avocate.

« Cela passe comme une lettre à la poste »

Concrètement, pour un couple de femmes, à la naissance, l’enfant est automatiquement lié à sa mère biologique, comme c’est le cas pour les naissances de parents hétérosexuels. C’est seulement aux trois mois de l’enfant que la conjointe, l’autre parent, peut demander un recours pour une adoption plénière de l’enfant : «Cela prend en général deux à trois mois, mais cela passe comme une lettre à la poste, cela ne pose aucun problème et je ne connais pas de cas au Luxembourg où l’adoption dans ce cadre a été refusée.»

Si les femmes ont «la chance» de pouvoir enfanter, les couples d’hommes, eux, sont toujours confrontés à l’opposition face à la GPA. Si la gestation pour autrui ne fait pas non plus l’objet d’une législation au Luxembourg, dans les faits, personne ne la pratique : «Cela concerne également les couples hétérosexuels qui n’arrivent pas à avoir d’enfant, car il n’y a pas de don d’ovule au Luxembourg, alors que le don de sperme est largement entré dans les mœurs… Dans notre inconscient collectif, il y a toujours ce mythe de la femme qui accouche, que c’est donc forcément elle la mère», regrette Deidre Du Bois qui se demande si le tout biologique ne deviendrait pas à terme la norme.

«Cela aurait des conséquences désastreuses en cas de divorce de couples de femmes avec enfant(s). Est-ce qu’on ne va pas favoriser le lien génétique de l’enfant avec sa mère biologique au détriment de l’autre parent», se demande-t-elle.

Pour l’avocate, l’interdiction de la GPA et la non-reconnaissance de la filiation des enfants qui en découle ne vont pas être tenables longtemps : «La GPA est déjà autorisée dans certains pays européens, notamment le Royaume-Uni. Si une telle famille déménage dans un autre pays européen pour des raisons professionnelles, cela veut dire que la filiation ne sera pas reconnue? C’est impossible. Il va falloir encadrer la GPA, c’est sûr, notamment sur la question des mères porteuses. Mais il faut savoir que ce sujet, qui concentre toutes les crispations, ne concerne que des cas très rares finalement.»

A.S.

PMA et adoption en Europe

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Aujourd’hui, 7  pays sur 28 dans l’Union européenne autorisent la PMA pour les couples de même sexe  : la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède. Alors que onze pays reconnaissent le mariage homosexuel  : les Pays-Bas (depuis 2001), la Belgique (2003), l’Espagne (2005), la Suède (2009), le Portugal (2010), le Danemark (2012), la France (2013), le Royaume-Uni (2014), la Finlande (2014, applicable en mars 2017), le Luxembourg (2015) et l’Irlande (2015).

La PMA constitue, avec la Gestation pour autrui (GPA), le véritable objectif des partisans les plus en pointe du projet de loi. Elle est pour eux la suite logique, voire la conséquence, de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe. Et les choses peuvent aller très vite  : il n’a fallu, par exemple, que 4  ans pour passer du mariage (2003) à la PMA (2007) en Belgique.

En France comme en Allemagne, l’Assistance médicale à la procréation (AMP) est par exemple réservée aux couples hétérosexuels souffrant d’un problème d’infertilité. De nombreuses femmes se rendent donc dans les pays voisins, dont la législation est plus souple. Mais c’est une fois que l’enfant est né par insémination que les choses se compliquent car le conjoint doit alors adopter l’enfant biologique de sa partenaire.

Aller là où la législation est plus souple

Seuls 7  pays autorisent l’adoption de l’enfant du partenaire dans les couples de même sexe  : 6 des pays qui autorisent le mariage (le Luxembourg, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, les Pays-Bas, la Suède), plus la Finlande et le Royaume-Uni. Et seuls 6  pays autorisent l’adoption conjointe par des couples de même sexe (la Belgique, le Danemark, l’Espagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède).

Mais il est intéressant d’entrer dans le détail. Prenons les Pays-Bas, souvent cités en exemple pour ses réformes «progressistes». La loi sur l’adoption y est plus restrictive que celle envisagée en France. En effet, alors qu’en France l’adoption conjointe sera permise à tout couple marié, homosexuel ou hétérosexuel (du fait du lien d’automaticité entre mariage et adoption), le mariage entre deux personnes de même sexe aux Pays-Bas ne crée pas de lien de filiation, de sorte que, dans un couple homosexuel, le conjoint ne devient parent de l’enfant de son époux que s’il l’adopte.

On peut aussi citer l’exemple du Portugal qui n’a pas créé de lien entre mariage et adoption puisque lorsqu’il a légalisé le mariage homosexuel en 2010, la loi a explicitement interdit l’adoption par les couples de même sexe, au nom de la préservation des intérêts de l’enfant.

Un commentaire

  1. dans quel monde de fous vit-on…….jusqu’ou ira donc la betise humaine!!!!!!