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Google à Bissen : « Il faut cesser les petits jeux »


David Viaggi, Bourgmestre de Bissen, veut que les habitants soient enfin mieux informés du projet data center géant de Google à Bissen (Photo : Anne Lommel).

Google a introduit en octobre le plan d’aménagement particulier pour le centre de données à Bissen. Le bourgmestre David Viaggi réclame de voir un dossier complet et transparent.

Le reclassement le 20 juin dernier du terrain de 33,7 hectares appelé à accueillir le centre de données de Google avait déclenché une crise politique à Bissen. Le vote au conseil communal s’était soldé par un résultat étriqué : quatre voix pour le reclassement, deux votes contre et, surtout, cinq abstentions. Ces remous (lire ci-contre) n’ont cependant pas empêché Google de continuer à avancer sur son projet. «Nous sommes dans la phase du plan d’aménagement particulier (PAP). Il a été introduit en octobre. On avait un mois pour attester sa conformité. Sous peu, la procédure d’autorisation sera lancée», résume David Viaggi.
En amont d’une réunion de travail que le conseil communal aura ce soir avec le bureau d’architecture eschois WW+ et un émissaire de Google disponible par vidéoconférence, un message clair est lancé par le nouveau bourgmestre : «Il faut cesser les petits jeux. Notre volonté est que Google mette enfin toutes les données sur la table. Le PAP laisse une marge de manœuvre, mais il nous faut enfin du concret.» Il ajoute que «Google a tout intérêt à être sincère», tant vis-à-vis des responsables communaux que des habitants de Bissen, conviés à participer jeudi à une réunion d’information.
Le fait que le PAP ait été introduit signifie-t-il que le centre de données du géant américain va devenir une réalité ? «Il est difficile d’évaluer si une décision de principe est tombée. Mais c’est une bonne chose que l’on travaille sur le projet. Par contre, il faut que toute la transparence soit faite et qu’on obtienne les certitudes demandées», indique David Viaggi.

Une fois la procédure d’autorisation du PAP lancée, la commune et tous les ministères concernés (Environnement, Énergie, Intérieur, etc.) auront trois mois pour rendre leurs avis et réclamer, le cas échéant, des adaptations du projet. «Après la réunion de demain (lire ce mardi), il faudra qu’on procède au sein du collège échevinal à une analyse détaillée du PAP. Mon but n’est pas de convaincre les autres. Ce dossier est d’une telle importance qu’on ne peut pas se contenter de s’appuyer sur l’une ou l’autre fraction», met en perspective le bourgmestre.

La hauteur des bâtiments réduite

Sa volonté première est «d’enlever les craintes des gens de la commune». «Les interrogations sur les nuisances sonores, lumineuses ou écologiques doivent être levées. Google doit nous dire quels bâtiments il compte réaliser sur une fenêtre de construction de cinq à huit ans», insiste David Viaggi.
Seul élément que le nouveau bourgmestre a pu nous donner dès hier : la hauteur des bâtiments du centre de données a déjà été ramenée de 33 à 25 mètres. Mais les questions liées à la consommation en énergie et en eau sont encore ouvertes. «Il nous est important que tous ces points soient ancrés dans le PAP. Pour nous satisfaire complètement, le gouvernement doit aussi montrer qu’il ne compte pas laisser Bissen tout seul avec ce projet», souligne le bourgmestre en lançant un autre appel, cette fois à l’adresse des ministres concernés.
David Viaggi avoue toutefois ne pas encore savoir «dans quelle mesure» il aura «la main pour obtenir les concessions nécessaires de la part de Google». «Ils doivent nous convaincre en tant que conseil communal. Si le dossier ne va pas dans la direction que nous souhaitons, il faudra mener une réflexion profonde sur le prochain pion qu’on compte placer. Le projet a une grande importance sur le plan à la fois national et local», note le bourgmestre.
Des semaines et mois décisifs s’annoncent à Bissen mais aussi au niveau du gouvernement. «Ce n’est pas nous qui étions demandeurs s’agissant de la valorisation de ce champ», rappelle David Viaggi en guise de conclusion.

David Marques

Les habitants de Bissen ont été conviés par un tract à une «session d’information» que Google organisera jeudi à 18 h au Hal Frounert.

Le PAG périmé ne va rien changer

Bissen fait partie des 26 communes qui n’ont à ce jour pas encore lancé la procédure pour se doter d’un plan d’aménagement général (PAG) de nouvelle génération. La commune se voit donc bloquée depuis le 1er novembre, date limite imposée par le ministère de l’Intérieur. Plus aucun plan d’aménagement particulier (PAP) ne peut être autorisé jusqu’à ce que le premier vote pour lancer le nouveau PAG soit pris.
La bonne nouvelle est que le PAP pour le centre de données de Google a été introduit avant la date butoir. «Ce n’est pas nous qui avons précisé à Google que ce risque de blocage existait. Mais ils semblent en avoir eu vent et ont introduit le PAP dans les délais. Le seul dépôt permet d’éviter ce blocage lié au retard pris par notre nouveau PAG», explique le bourgmestre. Il déplore par contre que d’autres projets soient aujourd’hui bloqués. «Notre étude d’impact sur l’environnement, obligatoire pour lancer le nouveau PAG, est depuis un an et demi bloquée au ministère de l’Environnement. Dès qu’on obtiendra le feu vert, on lancera la procédure», annonce David Viaggi.

Refroidissement par l’eau : l’Alzette comme option

Un des enjeux majeurs qui entourent la réalisation du centre de données de Google à Bissen est le besoin en eau pour assurer le refroidissement des serveurs. Aucun chiffre précis n’a encore été donné, mais la commune de Bissen continue à réfléchir aux options envisageables pour satisfaire la demande du géant américain. «Il est hors de question que de l’eau du réseau public ou des nappes phréatiques soit utilisée», insiste le bourgmestre David Viaggi.

Par contre, pomper l’eau de l’Alzette serait une option, toutefois en s’assurant que l’équilibre écologique du cours d’eau reste garanti. «Le principe circulaire doit dominer. Si de l’eau est retirée et réchauffée, elle devra servir à d’autres effets, de préférence sur des sites voisins. La question du retour de l’eau dans l’Alzette reste aussi à clarifier.» Le bourgmestre favorise la mise en place de synergies et songe notamment à Luxlait, Goodyear et Kiowatt (centrale de cogénération).
Interrogé début juillet dans nos colonnes, le directeur général de Luxlait, Gilles Gerard, n’avait pas exclu que le producteur laitier puisse coopérer avec le géant américain. Mais il avait tenu à préciser que «Luxlait ne souhaite pas être pris en otage par Google. On ne compte pas rester figé en raison d’un manque d’eau.»

Saint-Ghislain, l’exemple à suivre ?

Un projet comme celui qui a été mis en place sur le site de Google à Saint-Ghislain en Belgique est intéressant aux yeux de la commune. Le tout premier centre de données belge de Google, construit en 2009, était novateur avec son système de refroidissement par évaporation. Ce système puise les eaux usées du canal industriel qui traverse la zone d’activités. «Cette option a été évoquée à un moment. Maintenant, il urge d’avoir une option sur la table que nous puissions défendre», conclut David Viaggi.

David Marques

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