Le futur ministre de l’économie luxembourgeois, Franz Fayot, a été plébiscité samedi en Lorraine, pour son écoute et son approche apaisée sur les enjeux transfrontaliers.
Que venait faire Franz Fayot à Saint-Charles, dans la banlieue de Longwy, un samedi matin ? Assister aux vœux peu communs d’un élu lorrain et socialiste, comme lui : le sénateur français Olivier Jacquin. «Je préfère faire parler que parler pour mes vœux, confie Olivier Jacquin. Le transfrontalier est l’un des dossiers que je suis de près. En décembre, j’ai lancé la perche à Franz, alors député, pour venir échanger nos points de vue devant des élus de gauche du territoire. Quand j’ai vu qu’il allait devenir ministre (NDLR : entrée en fonction la semaine prochaine), je me suis dis c’est plié, il ne viendra jamais !» Et bien si, Franz Fayot est venu.
Elégant dans le costume comme dans l’esprit, très à l’écoute, le futur ministre de l’économie a permis des échanges d’une ouverture rare, sur la question d’un meilleur équilibre des territoires. Les élus présents l’ont assailli de chiffres et de questions ! Voici un best-off des interventions..
• « On ne peut plus penser la croissance luxembourgeoise uniquement dans les limites du pays » (F. Fayot) : lors de sa prise de parole, Franz Fayot a expliqué qu’il suivait de près « les revendications qui montent. J’ai entendu le discours très offensive du maire de Metz sur la fiscalité sur la radio 100.7 cette semaine (NDLR : volonté d’une rétrocession fiscale vers la Lorraine pour mieux assurer le développement des communes d’habitation des frontaliers). Je suis désolé de la manière dont cette discussion est souvent menée. Mais je comprends un certain égoïsme dans la façon de piloter notre politique économique au Luxembourg. Il y a des effets bénéfiques et négatifs qui rejaillissent sur les territoires frontaliers. Et nous-même dans nos frontières, sentons que notre croissance ne peut plus être pensée que dans les limites du pays : la mobilité est difficile, le prix du logement devient exorbitant et pèse pour beaucoup de gens […] On ne peut plus mener le débat transfrontalier qu’en termes de double-convention et d’infrastructures de mobilité. »
• « Il y a trois métropoles en Lorraine » (Jean-Marc Duriez, président de l’Agence d’urbanisme et de développement de Lorraine-Nord) : Jean-Marc Duriez, s’est dit « ravi de la tonalité des propos tenus » par le ministre. « Vous serez ministre dans quelques jours, j’anticipe ! » L’élu a expliqué : « il y a trois métropoles en Lorraine : Metz, Nancy et… Luxembourg. Qui pourrait nier que le Pays-Haut et toute une partie de la Moselle sont dans l’aspiration du Grand-Duché ? Ça n’a rien de péjoratif d’être la ‘périphérie’ de Luxembourg-ville, et évidemment c’est une chance pour l’emploi. Mais il faut poser de façon apaisée la question de la péréquation fiscale et du co-développement, pour que cette métropole fasse sens justement. Donc : aborder les dossier de façon apaisée, mais pas sans conviction ! » Franz Fayot lui a répondu : « Il faut parler sereinement de tous les sujets, dont la fiscalité : il y a bien d’autres dimensions que la question du transport entre nos territoires. » Mais aussi : « nous avons cette thématique de la métropolisation de Luxembourg-ville en interne également. Par exemple, des villes du nord du pays sont mal connectées ou sont dans un dynamisme trop faible. » Remarque : ce point-là, qui n’a pas été développé, est intéressant. On pourra observer que le ministre Dan Kersch a mené une réforme fiscale communale d’ampleur en 2016 au Luxembourg, pour que des villes qui accueillent moins d’entreprises, où qui ont plus de problèmes sociaux, bénéficient d’une meilleure répartition de la fiscalité au niveau national. C’est ainsi qu’Esch-sur-Alzette bénéficie désormais de 10 millions d’euros de plus dans son budget chaque année. Comment ne pas y voir un sujet corrélé avec ce que vivent d’autres communes, également métropolisées, mais au-delà de la frontière ?
• « Nous devenons des zones dortoirs, ça ne peut plus continuer. » (Christian Ariès, président du Pôle métropolitain transfrontalier -Longwy/Thionville/frontière) : Christian Ariès a expliqué que le phénomène frontalier irait « grandissant », selon toutes les études disponibles. En toile de fond : les budgets contraints des communes frontalières (divisés par trois ou quatre par rapport aux communes luxembourgeoises) ne suffiront pas à recoller avec la locomotive. « À partir de là, je vois deux questions : 1) comment le gouvernement français peut nous aider à être plus attractif d’un point de vue fiscal, pour que des entreprises puissent s’installer aussi chez nous ? 2) Comment le Luxembourg peut nous accompagner dans notre développement ? » Christian Ariès s’est montré très attentiste à ce que pourrait proposer l’état français de façon concrète.
• « Dans cette métropolisation, l’immense défi des ressources humaines » (Louis-François Reitz, directeur général délégué au transfrontalier de la ville de Metz) : « En 2009, il y a eu une vraie volonté du Luxembourg de travailler sur l’effet de métropolisation. C’était le projet Metroborder, qui a ensuite été élargi jusqu’à Coblence et Liège, ce qui n’avait aucun sens par rapport à la réalité de l’espace transfrontalier.»
L’étude a été mise de côté et pendant ce temps, «nous savons désormais que sur notre espace Grande-Région, nous allons perdre 600 000 actifs d’ici 2040, avec un toboggan démographique du côté allemand, une stagnation de la main d’œuvre disponible du côté belge. La donne va changer… et en réalité, elle change déjà. L’an dernier, 1 500 Allemands seulement sont devenus frontaliers, 1500 Belges environ aussi, et plus de 7000 depuis le versant français. Luxembourg n’a pas la main sur la ressource humaine, et ce sont des instances comme la région Grand-Est qui ont les leviers. Vous croyez vraiment que ce sont les Champenois ou les Alsaciens qui vont accepter ad vitam aeternam de mettre la main à la poche pour financer des trains, ou des améliorations d’un territoire en réalité métropolisé par Luxembourg ? Non. C’est pour ça que la question de la péréquation fiscale (NDLR : d’un meilleur ruissellement de l’investissement public) se pose légitimement. »
• « Que voulons-nous pour notre territoire? » (Jean-Marc Fournel, maire de Longwy) : le premier magistrat de Longwy n’a pas apprécié que l’on présente sa ville comme « dortoir ». « Merci d’arrêter avec ce discours : on a une nouvelle place publique, un projet de musée, des salles de concert sur le bassin, un accompagnement des associations culturelles et sportives à tous les niveaux… » Puis il a enchaîné : « Louis-François Reitz est juste sur l’analyse et avance des chiffres qui font rêver (NDLR : 200 millions d’euros annuels de compensation pour la Lorraine, sur un modèle suisse). Mais tout cela prendrait des années, et c’est l’arbre qui cache la forêt : que voulons-nous pour notre territoire ? C’est ça la vraie question. Moi, je souhaite que l’état français fasse effectivement son travail, et que le Pays-Haut puisse bénéficier d’une politique discriminatoire de façon positive : nous éprouvons plus de besoin que Metz ou Nancy, et soyons sûrs que ces territoires feront leur chemin sans forcément faire attention au Pays-Haut. Il n’y a toujours pas de rapport du préfet sur le transfrontalier. En attendant, je dis qu’il faut être positif : l’accord de Paris (dont un P+R pour Longwy) est l’aboutissement de premières réflexions importantes. Essayons maintenant de travailler sur d’autres choses. »
• « Nous sommes coresponsables d’un territoire » (Jean-Paul Durieux, maire de Longwy) : c’est une figure politique lorraine, un grand homme qui se tient droit comme un I au moment de se lever, et qui parle d’une voix grave et posée : Jean-Paul Durieux, 90 ans, a prononcé le plus beau discours de la matinée, avec une aura qui a laissé croire qu’il y avait deux ministres dans la salle. « Nous sommes coresponsables d’un territoire, Luxembourgeois et Français. Nous sommes responsables du bien-être des habitants, de leur capacité à partager des moments avec leurs proches, à s’épanouir, à mener leurs aspirations librement. Prenons l’exemple de ce qu’il s’est passé à Saulnes récemment : nous allons prendre ensemble la gestion écologique d’une parcelle qui menaçait de devenir une décharge. C’est une belle démarche : la volonté simple d’apporter des réponses concrètes. La question des moyens financiers se pose, inévitablement. Mais de grâce, ne résumons pas notre relation à une dimension de fiscalité, d’argent. Le discours de Franz Fayot est porteur d’espoirs : il nous faut, chacun d’entre nous, sortir du cadre de nos territoires. »
Hubert Gamelon
Les rendez-vous sont pris
Olivier Jacquin a aussi pris la parole pour expliquer sa position sur le transfrontalier. « J’estime que les déséquilibres de territoires à la frontière ne sont pas acceptables, mais j’estime que mon rôle est d’abord d’être offensif vis-à-vis de l’état français. Si mon gouvernement me dit qu’il a des raisons d’accepter la situation inéquitable, alors c’est à lui de compenser sur la bande frontalière. J’ai fait de ce dossier une priorité et je ne lâcherai pas. »
À propos du Luxembourg, Olivier Jacquin a expliqué : « nous sommes voisins, nous avons une relation riche, la présence de Franz aujourd’hui est précieuse. Ta présence, ton écoute et ton discours ont rendu le débat apaisé aujourd’hui. » Les deux hommes ont convenu de plusieurs échéances à venir pour 2020 : Franz Fayot souhaite inscrire un débat d’orientation sur le transfrontalier à la Chambre, incluant des dimensions au-delà de la mobilité, telles que l’économie, la culture ou la formation. Olivier Jacquin souhaite un document « consolidé » sur la relation Lorraine-Luxembourg de la part du gouvernement français, « pour que l’on puisse discuter entre états qui se respectent de tous les sujets ». Les deux hommes ont enfin convenu d’un colloque « avant l’été » sur le transfrontalier, avec la volonté d’un futur ministre de l’économie d’intégrer un maximum de dimensions nouvelles dans les travaux.
Faux! la citation sur l’écran est de ROOSEVELT !!! c’est peut-être la nouvelle tactique de fayot pour se faire remarque: il est très très mauvais orateur, avec diction et rhéthorique misérable prouvées souvent dans la chambre, avec ses « discours » impossibles à écouter, tellement ils font mal aux oreilles ! à l’époque des réseaux sociaux à la fb, on fait au moins comme si on était cultivé, en copiant les autres… ça promet…