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France-Luxembourg : une question de bon voisinage


Le président français et le premier ministre luxembourgeois ont des gros dossiers à traiter. (Photo : Didier Sylvestre)

Une importante délégation luxembourgeoise arrive ce lundi à Paris. Il sera surtout question de gros sous : impôts, transports… Avec l’espoir d’une meilleure coopération entre voisins.

Vendredi déjà, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, a dévoilé les grandes lignes d’une nouvelle convention fiscale. L’assouplissement du télétravail est en jeu. la règle de tolérance en matière de revenus de l’emploi passe à 29 jours : si un Français employé au Luxembourg s’en va travailler en France pour une durée dépassant 29 jours, alors il sera imposé pour le total des jours qu’il a travaillés en dehors du Grand-Duché en France. Par contre, cela veut aussi dire que le télétravail est possible neuf jours de plus! Une décision qui va ravir nombre de frontaliers… si leurs employeurs jouent le jeu.

L’accord évoque également le volet des retraites : si les pensions des frontaliers continueront à être imposées au Luxembourg, le ministre annonce que la nouvelle convention baissera par contre le degré de participation requis pour bénéficier de l’exonération de la retenue à la source sur les dividendes (de 25 à 5 %).

Voilà pour les grandes lignes… sauf que des députés de l’opposition auraient bien aimé discuter des petites. Ils ont déploré avoir été mis devant le «fait accompli” et ne pas avoir été impliqués davantage dans la négociation.

Mais ce carton jaune ne sera sûrement pas le dernier! Car cette visite d’État devrait s’attaquer à un thème hyper-sensible : la compensation fiscale. Notamment dans le secteur des transports.

Le chantier de l’A31 bis

Luxembourg et France sont plus que des voisins : ils sont des partenaires. Les 95 000 Français qui empruntent les artères frontalières pour alimenter l’économie luxembourgeoise le rappellent chaque jour. Mais la saturation guette. La Lorraine peine à financer ses infrastructures de transport et le Luxembourg se refuse à allonger la monnaie au-delà de ses frontières. Du moins, sans retour prévu sur investissement. Selon nos informations, des projets de cofinancement seraient bien prévus, portant sur plusieurs centaines de millions d’euros.

Le rail serait visé (la ligne ferroviaire Metz-Luxembourg?), ainsi que la route. L’A31 bis, reliant Toul (Thionville dans le dernier tronçon) à la frontière grand-ducale est dans tous les esprits. Le Luxembourg a beau avoir déclaré récemment qu’il ne financerait pas l’autoroute côté français, ce dossier n’est pas à exclure.

Autre sujet de compensation, les impôts. Nombre d’élus lorrains plaident désormais pour «un juste échange» avec le Luxembourg, sur le modèle de compensations fiscales déjà appliqué ailleurs (entre la Suisse et la France… ou le Luxembourg et la Belgique!).

Alain Casoni, le maire de Villerupt, rappelle ainsi que les communes où logent les Français récupèrent moins d’impôts (au maximum 3 000 euros de taxes locales) que les communes luxembourgeoises où ces frontaliers travaillent (en moyenne 5 600 euros redistribués par l’état), alors que le frontalier utilise davantage les infrastructures françaises (école, services de déchets, etc.).

D’autres sujets transfrontaliers pourraient être abordés, comme la création de zones franches dans le Nord-Lorrain pour faire revenir les entreprises dans cette région sinistrée.

Ces revendications rencontreront-elles un écho favorable? Les paris sont ouverts. Une chose est sûre, la compensation fiscale est un sujet épineux pour le Luxembourg. L’idée de «signer un chèque pour le voisin» est loin d’être populaire. Il ne s’agit pourtant pas de charité. Ces millions d’euros auraient aussi vocation à «rapporter» au Luxembourg. Car la crise du logement qui déborde au-delà de nos frontières, la contribution des Français à notre prospérité (ils ne représentent pas un quart des actifs du pays sans raisons), la proximité économique, sociale et historique, rappellent qu’un trop grand déséquilibre avec notre voisin finirait inévitablement par nuire aux intérêts luxembourgeois.

Romain Van Dyck