Le CSV doit renouveler ses instances dirigeantes le 24 avril. Frank Engel, candidat à sa propre succession, part à la chasse aux voix. Solo.
À six semaines de son congrès national virtuel qui verra un renouvellement des instances dirigeantes du parti, le CSV ne fait l’objet d’aucune spéculation en ce qui concerne les potentiels candidats au poste de président et de secrétaire général. Depuis mercredi, Frank Engel a cependant fait savoir qu’il briguerait bien un second mandat.
C’est dans un courrier adressé aux membres du parti qu’il a annoncé cette nouvelle, comme le révèle RTL Radio, qui publie la lettre en question. Il y déroule ses propositions pour recoller les pots cassés et mettre le parti sur de bons rails qui le mèneront jusqu’à l’échéance électorale de 2023. La toute nouvelle équipe qui sortira des urnes dans six semaines sera celle qui conduira la bataille.
L’actuel président du premier parti de l’opposition veut bien être celui qui prendra cette responsabilité et il en appelle au soutien des troupes. «Je ne peux pas continuer sans vous», écrit-il en flattant la force que représentent les milliers d’adhérents d’un parti populaire qui ne peut se positionner qu’au centre de l’échiquier politique.
Frank Engel livre l’image d’un président actif pour son parti, évoque les groupes de travail mis en place en octobre dernier qui ont attiré quelque 200 membres. Des propositions sont déjà sur la table qui témoignent, selon Frank Engel, de la volonté du parti de s’ouvrir à des alternatives. Pour l’instant, il préfère taire les résultats de ces réflexions, mais elles semblent lui redonner espoir et courage pour l’avenir.
On sait les rapports tendus qu’entretient le président avec la fraction parlementaire. Sa parole libre lui a valu quelques rappels à l’ordre, surtout quand il s’éloignait considérablement du programme électoral de 2018 qui sert toujours de référence aux députés. Justement, Frank Engel indique qu’il ne faut plus s’y «cramponner», car il est devenu caduc avec la pandémie.
«Nous devons rendre le parti à ses membres», intime-t-il en rappelant que ce sont eux qui sont les plus visibles dans les villes et les villages, les associations, les familles. Leur contribution compte et leur volonté doit être respectée, écrit en substance Frank Engel. «Si nous voulons à nouveau diriger, nous avons besoin d’un grand projet qui soit porté par l’ensemble du parti, parce que ce n’est pas l’affaire de quelques mandataires et députés», précise-t-il.
Le président, qui ne dispose d’aucun mandat électoral, veut donc revenir à la tête du parti et tente de séduire avec quelques idées qui préfigurent son programme pour le parti et pour le pays. Un papier qu’il a rédigé avec l’aide «de quelques amies et amis» du parti, comme il le précise.
Durcir le test de langue
La crise sanitaire a pu lui inspirer quelques éléments de son programme. La dépendance du pays en matière de ressources humaines dans les secteurs des soins et de la santé lui est apparue au grand jour. C’est tout le secteur de la santé qu’il faut soigner, d’ailleurs, ce doit être la priorité première de toute politique digne de ce nom.
Après les leçons de la pandémie, Frank Engel reprend sa nouvelle ritournelle sur les nouveaux Luxembourgeois et les non-Luxembourgeois. Il veut les atteindre et apprendre à les connaître. Il veut surtout qu’ils apprennent le luxembourgeois, car il estime qu’il n’y a pas mieux pour s’intégrer. Il s’en prend au nécessaire test de langue qui permet d’obtenir la nationalité luxembourgeoise, pas assez exigeant, selon lui. Il y voit un «laisser-faire» qui mènera tout droit à un communautarisme risquant de mettre en péril les fondements du vivre-ensemble.
Il propose de durcir les critères d’obtention de la nationalité, parce que 10 000 nouveaux Luxembourgeois chaque année, ce n’est pas vraiment nécessaire, d’autant qu’ils sont «si éloignés de la politique», comme l’observe Frank Engel. Selon lui, comme ils ne parlent pas le luxembourgeois, ils ne peuvent pas prendre part au débat. Voilà une situation qui inquiète bien le président, parce que ces nouveaux citoyens sont obligés de se rendre aux urnes, et comme Frank Engel ne les connaît pas, il ne sait pas comment ces gens se comporteront dans l’isoloir.
Avant de convaincre ces nouveaux électeurs, il devra d’abord convaincre son propre parti, et pour l’instant, il est le seul candidat officiellement déclaré à vouloir présider à sa destinée.
Geneviève Montaigu