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Covid-19 : pas de mesures plus strictes au Luxembourg


Le taux d'incidence, alors qu'il se situait à 50 il y a deux semaines, est à présent de 220 sur 100 000 habitants et rejoint celui des zones rouges chez nos voisins (Photo : Fabrizio Pizzolante).

La situation est alarmante, mais le gouvernement compte pour le moment davantage sur la solidarité citoyenne pour faire reculer le virus que sur des mesures contraignantes.

Continuer à respecter les mesures d’hygiène sanitaire, respecter la distanciation sociale et porter un masque – bref, se montrer solidaire –, le gouvernement n’en demande pour le moment pas plus aux citoyens luxembourgeois, alors que le nombre de personnes positives au Covid-19 et celui des décès ont fait un bond conséquent vers le haut en l’espace d’une semaine. 806 nouvelles infections ont été détectées entre le 5 et le 11 octobre, soit une augmentation de 47 % en une semaine. Le nombre de contacts étroits identifiés a lui aussi doublé pour atteindre le chiffre de 6 868. Le virus repart de plus belle et, pour le contrer, le gouvernement compte sur un effort de la population plutôt que sur des mesures contraignantes et imposées. «Notre but n’est pas de perdre du terrain. Il faut encore faire un effort collectif, indique la ministre de la Santé, Paulette Lenert. Une campagne de sensibilisation sera lancée la semaine prochaine. Nous voulons atteindre le résultat que nous avons atteint en été pour réduire le plus vite possible le nombre de cas de Covid-19. Si nous y parvenons, nous n’aurons pas besoin de prendre des mesures supplémentaires. Les Luxembourgeois sont en capacité d’y arriver et nos indicateurs nous montrent qu’il ne sert pour le moment à rien de mettre la charrue avant les bœufs.»

L’évolution du virus ces dernières semaines au Grand-Duché reste toutefois préoccupante et doit être freinée. «L’automne est la période la plus critique, nous en avions conscience depuis le début de la pandémie. Nous ne devons rien lâcher», insiste la ministre, qui préconise de rester vigilant et de consulter un médecin au moindre doute, «même si vous êtes quelqu’un capable d’aller travailler avec des maux de tête, le rhume ou la grippe». «Ce n’est pas le moment», poursuit la ministre. Elle conseille également de limiter les contacts, même s’ils ne sont pas interdits. 40 % des personnes positives se sont isolées avant même d’avoir obtenu les résultats de leur test et n’ont pas participé à la dispersion du virus. «Tant que nous ne disposerons pas d’un vaccin, nous serons régulièrement confrontés à des vagues successives. Il faudra les empêcher de grandir. Nous ne nous débarrasserons pas totalement du virus. Nous voulons vivre, nous voulons que le pays continue de fonctionner, c’est pourquoi nous voulons le contenir», explique Paulette Lenert.

Des indicateurs fiables

Les 15-29 ans sont deux fois plus touchés par le virus que le reste de la population et la moyenne d’âge des personnes atteintes est de 36 ans. Cependant une augmentation importante des cas chez les personnes âgées de plus de 65 ans a été constatée ces deux derniers jours. Et alors que le virus n’avait plus ôté la vie depuis la mi-août, six personnes sont décédées depuis le début du mois. Leur moyenne d’âge était de 82 ans et elles présentaient toutes des comorbidités. Les principaux foyers d’infection restent le milieu familial et l’école. Aucun véritable cluster n’a pu être identifié. Et certaines personnes présenteraient les symptômes d’une deuxième infection au virus.

Si le gouvernement ne durcit pas les mesures, comme cela a été le cas chez nos voisins, il n’en reste pas moins vigilant et agit selon une stratégie mise en place cet été. «Nous suivons les évolutions d’un certain nombre d’indicateurs pour déterminer les mesures à prendre en fonction de la situation et de l’urgence dans laquelle nous nous trouvons», rappelle la ministre. Nous ne nous contentons pas de prendre en compte le nombre de nouvelles infections, mais surveillons la situation dans les hôpitaux, le taux de positivité, les retours que les médecins nous donnent du terrain et ainsi de suite. Cela nous permet d’éviter les automatismes et d’analyser la situation de manière plus détaillée. (…) Nous déclencherons une prochaine étape quand nous estimerons qu’un des indicateurs est alarmant.»

Le taux d’incidence, alors qu’il se situait à 50 il y a deux semaines, est à présent de 220 sur 100 000 habitants et rejoint celui des zones rouges chez nos voisins. L’explosion de cet indicateur important a encouragé ministère et cellule de crise à étudier attentivement les autres indicateurs comme la présence du virus dans les eaux usées, le nombre d’hospitalisations, les urgences, le traçage et les tests entre autres.
Or les hôpitaux entrent à peine en phase 2 de leur plan Covid. En phase 3, un certain nombre d’activités et soins devraient être arrêtés au profit des soins Covid. L’activité aux urgences serait, quant à elle, normale pour la saison, contrairement au printemps dernier où des personnes présentant des symptômes sévères du Covid-19 se présentaient en nombre. «Cela repose certainement sur la différence de moyenne d’âge des personnes atteintes de Covid. La probabilité de complications liées à la maladie augmente avec l’âge», estime la ministre. La sentinelle Covid, soit un réseau de médecins généralistes, n’aurait rien signalé d’inquiétant, malgré une hausse de leur activité. Pas besoin pour le moment de prévoir de centre de consultation.

Stop aux tests sans ordonnance

Cependant, la cadence serait de plus en plus difficile à tenir en ce qui concerne le traçage. L’armée a été appelée à la rescousse. Idem en matière de tests. L’attente se multiplierait ces dernières semaines. «Nous l’expliquons par le nombre assez conséquent de personnes qui subissent des tests sans ordonnance, précise la ministre. Il est dans l’intérêt de chacun de ne pas épuiser les capacités de travail des laboratoires et que les personnes présentant des symptômes qui peuvent prêter à confusion et des ordonnances soient prioritaires pour les tests. (…) Les laboratoires ont d’autres tests que ceux du Covid-19 à effectuer.»

Le ministère cherche des solutions pour désengorger les laboratoires. L’une d’entre elles pourrait être un drive-in dédié aux personnes présentant une ordonnance. Les équipes mobiles de testeurs pourront également être sollicitées dans les entreprises ou les maisons de retraite, par exemple. Depuis mercredi, des tests rapides peuvent également être utilisés par les professionnels de la santé sur des patients présentant des symptômes.
Enfin, un vaccin devrait être disponible au mois de décembre, mais rien n’est moins sûr. Le Luxembourg devrait l’obtenir de l’Union européenne. La quantité restant floue, la ministre de la Santé n’a pas voulu s’avancer mercredi sur la stratégie de vaccination qui sera privilégiée. Cette incertitude pousse Paulette Lenert à en appeler une dernière fois au civisme et à l’altruisme de la population pour juguler le mieux possible le virus.

Sophie Kieffer