Pour mieux comprendre les chômeurs et les rapprocher du marché de l’emploi, l’Adem et l’université ont instauré une convention en 2014. Elles en ont tiré le premier bilan, mercredi.
C’est en 2014 que les deux organismes ont signé une convention pour que l’Adem utilise les ressources de l’université grâce à la bonne volonté de chômeurs qui se sont soumis à une série de questionnaires. «Nous avons constaté qu’il existait au Luxembourg beaucoup d’expertise dans le domaine de la compréhension des facteurs de risque du chômage de longue durée», a expliqué Isabelle Schlesser, directrice de l’Adem. «C’est pourquoi nous nous sommes adressés à l’université du Luxembourg au moment du lancement de notre outil d’orientation destiné aux demandeurs d’emploi, le Profiling en 2014. Nous souhaitions obtenir une validation scientifique de cet outil visant à définir la proximité du chômeur avec le marché de l’emploi.»
Dans un deuxième temps, l’université du Luxembourg a contacté l’Adem par rapport à la réalisation d’une étude concernant la perception du chômage par la population. «Nous avons immédiatement accepté de collaborer une nouvelle fois avec l’université qui a pu effectuer sa collecte de données à travers des questionnaires distribués dans nos agences de Luxembourg et Esch», a conclu la directrice.
Entre réalité à l’Adem et monde scientifique
Nicolas Schmit, le ministre du Travail, s’est quant à lui réjoui de cette collaboration qui a montré un véritable pont entre le monde scientifique et la réalité du quotidien à l’Adem. «Ce n’est d’ailleurs pas la seule collaboration que l’Adem a entreprise avec l’université du Luxembourg, puisque, dernièrement, l’Adem et l’unité de recherche Inside se sont associées pour élaborer un projet concernant la formation interne des agents de l’Adem», a-t-il expliqué.
Deux études ont été présentées par le Pr Claude Houssemand, professeur de psychologie différentielle et cognitive à l’université du Luxembourg, et directeur de l’Institut LifeLong Learning and Guidance (LLLG) ainsi que le Dr Anne Pignault, maître de conférences en psychologie du travail et de l’orientation à l’université Paris Nanterre et chercheur à l’université du Luxembourg.
La première étude portait sur les différentes caractéristiques psychologiques et socio-professionnelles, de nombreux demandeurs d’emploi s’inscrivant pour la première fois à l’Adem et tout au long de leur période de chômage. Le Pr Claude Houssemand a souligné que «ce projet de recherche a été le point initial du développement d’un profilage des demandeurs d’emploi au Luxembourg consistant en un repérage précoce des personnes ayant un risque plus important de devenir chômeurs de longue durée, afin de leur proposer un parcours de réinsertion mieux adapté et plus individualisé». Il est actuellement utilisé par les services de l’Adem pour permettre aux demandeurs d’emploi de bénéficier d’un accompagnement plus efficace au cours de cette période de rupture professionnelle et correspond aux perspectives européennes en matière de chômage.
Le deuxième projet concerne la perception de la situation de chômage et a été mené en collaboration avec l’Adem, Pôle emploi en France et financé par le Fonds national de la recherche. Considérant, à un niveau international, la hausse globale des taux de chômage, le sentiment plus général d’insécurité de l’emploi et la banalisation des ruptures et des transitions professionnelles, les chercheurs interrogent l’évolution possible du rapport au chômage.
Le chômage, dans ce contexte, est-il perçu moins négativement qu’auparavant ? Cette évolution aurait-elle un impact important sur le bien-être, les stratégies de retour à l’emploi ou la réinsertion des demandeurs d’emploi ? Selon le Dr Anne Pignault, «ce nouveau sens donné à la situation de chômage et plus globalement au travail doit être l’occasion d’une réflexion nouvelle sur l’évolution des parcours professionnels des demandeurs d’emploi et leur accompagnement. L’étude actuelle permet aussi des comparaisons entre la France et le Luxembourg et montre l’importance du contexte économique national sur les représentations et le vécu du chômage.»
Audrey Somnard