Quatre chapitres, quatre rapporteurs, quatre projets de loi, pas de référendum. La révision constitutionnelle n’a plus la même envergure qu’il y a quinze ans, mais elle se fait par étape.
Ce n’est pas la grande réforme promise depuis quinze ans, date du début des travaux parlementaires sous la houlette de Paul-Henri Meyers (CSV), mais les députés ont préféré finalement garder le meilleur de l’existant et procéder à une modernisation par chapitre. Quatre en tout, qui font chacun l’objet d’un projet de loi pour lequel un rapporteur a été nommé : Justice (Léon Gloden, CSV), organisation de l’État, monarchie, communautés religieuses, communes… (Mars Di Bartolomeo, LSAP), droits et libertés (Simone Beissel, DP) et enfin Chambre des députés et Conseil d’État (Charles Margue, déi gréng).
Vendredi matin, ils étaient tous présents autour du président de la Chambre, Fernand Etgen, pour présenter les changements constitutionnels et annoncer enfin que le premier chapitre consacré à la justice serait soumis au premier vote à la fin de ce mois. Un calendrier se précise enfin pour cette révision qui ne fera pas l’objet d’un référendum comme prévu. Pourquoi ? Parce que la situation n’est plus la même, justement, tente d’expliquer Mars Di Bartolomeo.
D’abord il y a eu le référendum de 2015 qui a grandement participé à orienter les travaux. Plus question de droit de vote aux non-nationaux, pas davantage de droit de vote dès l’âge de 16 ans et inutile de vouloir limiter à dix ans la fonction de ministre. À ces trois questions, les électeurs ont répondu non. Il manquait la question relative à la séparation entre l’Église et l’État mais là encore, la situation avait changé. Les parties étaient tombées d’accord avant même l’organisation du référendum. Cette délicate question a pu être éliminée de la liste ce qui a permis au gouvernement de procéder à une séparation sans consulter les électeurs et de la graver dans la Constitution.
Toutes ces grandes questions ayant obtenu une réponse, il n’était plus nécessaire de consulter les électeurs pour les retouches apportées au texte, d’autant que quelques-unes des modifications émanent des citoyens grâce à une démarche participative. La consultation citoyenne a surtout alimenté le chapitre «droits et libertés».
La reconnaissance des animaux comme êtres vivants dotés de sensibilité, l’accès à la culture et le droit à l’épanouissement culturel, la liberté de la recherche scientifique et encore le dialogue social sont désormais ancrés dans la Constitution du Grand-Duché car ainsi en a décidé le citoyen. Voilà qui devrait suffire à satisfaire aux principes démocratiques et à se passer d’un référendum qui risquait de faire capoter quinze ans de labeur.
Principaux changements
Quels sont les grands changements? Au chapitre de la justice, celui qui sera prêt à être voté à la fin de ce mois, il faut relever la création du Conseil national de la justice sans oublier que pour la première fois, l’indépendance de la justice sera gravée dans le marbre. S’y ajoutent la séparation entre la magistrature assise (les juges) et le ministère public (le parquet), la notion de «pouvoir judiciaire», la présomption d’innocence et l’élargissement des attributions de la Cour constitutionnelle.
Concernant l’organisation de l’État, la monarchie, les communautés religieuses et les communes, un vaste chapitre, les principaux changements commencent par l’inscription de la langue luxembourgeoise, du drapeau, des armoiries et de l’hymne national dans la Constitution. Concernant le Grand-Duc, le rapporteur Mars Di Bartolomeo, a déclaré que le chef de l’État ne serait pas affaibli par la nouvelle Constitution qui ne ferait que préciser ses compétences et ses moyens.
Les communes, de leur côté, voient inscrire un article qui leur garantit les ressources financières nécessaires à l’exercice de leurs missions.
Au chapitre «droits et libertés», il y a du nouveau aussi, en plus des articles issus de la consultation citoyenne. On y trouve une nouvelle section consacrée aux «objectifs à valeur constitutionnelle» qui réunit la sauvegarde de la biodiversité et la lutte contre le dérèglement climatique à côté du droit au logement.
Le président de la Chambre des députés, Fernand Etgen, était ravi d’annoncer que le Parlement voyait son pouvoir renforcé avec la nouvelle Constitution. Ancré dans la loi fondamentale, le droit des députés à l’information et l’instauration d’une commission d’enquête si 20 députés le demandent.
Une conférence d’information sera organisée au Tramsschapp le 8 octobre à 19 h avec tous les partis et sensibilités politiques. Le 18 octobre, une table ronde sera diffusée en direct sur ChamberTV et sur le site internet de la Chambre des députés.
Geneviève Montaigu