L’affaire dite du «casier bis» ou «Jucha» aura conduit à remettre de l’ordre dans le dispositif permettant de contrôler l’honorabilité d’un requérant. Il y avait des lacunes à combler.
L’affaire avait fait grand bruit il y a un peu plus d’un an et tout le monde se souvient que les 29 députés de l’opposition s’étaient levés comme un seul homme pour quitter la Chambre des députés en pleine séance plénière. Le président Etgen avait, à tort, refusé d’inscrire cette discussion à l’ordre du jour.
Tout avait débuté avec l’affaire de ce candidat au poste d’archiviste-bibliothécaire à la cité judiciaire qui avait été recalé pour ses antécédents judiciaires alors qu’il n’avait au final nullement été inquiété par la justice. Une vieille affaire, classée sans suite en ce qui le concerne, avait ressurgi d’un fichier dont il ignorait l’existence et qui visiblement avait laissé des traces qui auraient dû être effacées.
Mardi, la ministre de la Justice, Sam Tanson, a reconnu sans hésiter que cette affaire avait révélé certaines lacunes dans les procédures de vérification d’antécédents, au vu notamment de la nouvelle législation européenne et nationale en matière de protection des données entrée en vigueur en 2018. Le projet de loi qu’elle a présenté a pour objet de préciser les différentes procédures de contrôle d’honorabilité actuellement prévues dans les textes de loi relevant de la compétence du ministre de la Justice. «Un cadre légal, visant à renforcer les droits fondamentaux, fixera désormais les vérifications d’antécédents afin de déterminer les finalités des traitements effectués, de délimiter la consultation aux données nécessaires, conformément au principe de proportionnalité, et de limiter la durée de conservation des données consultées par les autorités compétentes au strict besoin», a déclaré Sam Tanson.
L’exposé des motifs rappelle que certaines administrations et certains services de l’État ont besoin de connaître des informations parfois soumises au secret d’instruction ou considérées comme sensibles au vu des nouvelles règles relatives au traitement des données. C’est par exemple le cas pour l’obtention de l’autorisation de détenir une arme à feu. Il s’agit de détecter en amont «des signes potentiels de propension à la violence chez un requérant», reprend Sam Tanson.
Le ministère public doit pouvoir être saisi de demandes d’administrations afin de se voir communiquer des informations relatives aux procédures pénales ou la délivrance de copies de pièces qui en sont issues. Les administrations de l’État peuvent valablement se baser sur des faits relatés par des rapports ou des procès-verbaux dressés par des officiers de police judiciaire pour refuser une autorisation même s’ils n’ont pas encore fait l’objet d’un jugement par une juridiction pénale.
Transparence et proportionnalité
Les administrations de l’État doivent apprécier si un ou plusieurs faits commis dans le passé montrent que le comportement d’une personne est tel qu’elle ne saurait devenir titulaire de l’autorisation sollicitée, rappelle le projet de loi.
Le but du texte que la ministre a déposé est de garantir la conformité pleine et entière des vérifications d’antécédents avec la législation nationale et européenne récente en matière de protection des données. «Les nouveaux textes garantiront davantage de transparence et de sécurité juridique pour le citoyen», assure la ministre.
Les procédures de vérification des antécédents énonceront clairement la finalité et les données consultées par les autorités compétentes et seules les données nécessaires à l’appréciation d’une demande d’un citoyen seront prises en compte, conformément au principe de proportionnalité selon le projet de loi.
Pour illustrer ces nouvelles dispositions, le ministère de la Justice a pris l‘exemple d’un candidat notaire, officier public, pour expliquer que le contrôle d’honorabilité se fera sur avis du parquet général, qui pourra prendre connaissance des faits ayant conduit à une condamnation pénale pour crime ou délit. D’éventuelles poursuites pénales en cours contre le candidat seront également portées à la connaissance du ministère public, à l’exception des classements sans suite et décisions de non-lieux.
En revanche, la vérification des antécédents dans le cadre de demandes d’autorisation d’acquérir une arme sera plus poussée et permettra de retracer des faits de violence pouvant aller au-delà de 5 ans.
En tout état de cause, le candidat ou requérant doit pouvoir connaître les éléments et données qui sont soumis à vérification. «Le principe de proportionnalité doit être garanti et le droit à la protection des données doit être respecté», a encore indiqué la ministre.
Geneviève Montaigu