L’archevêque de Luxembourg, Jean-Claude Hollerich, reste très pragmatique concernant la future relation entre l’Église et l’État. Avant la signature de l’accord ce soir, il souligne les chances que contient ce dernier.
« Même si je ne suis pas prêt à jubiler, je peux cependant vivre avec le résultat obtenu », souligne Jean-Claude Hollerich. (Photo : archives LQ/Hervé Montaigu)
La semaine écoulée a été marquée par l’annonce de l’accord entre l’État et l’Église qui va marquer un tournant historique dans les relations entre le pouvoir public et les cultes. L’Église catholique est celle qui, sur le papier, perd le plus avec, à terme, une réduction de sa dotation financière, qui va tomber de 24,4 millions à 6,75 millions d’euros. En plus, les cours de religion vont disparaître des écoles publiques.
Malgré ces changements majeurs, l’archevêque de Luxembourg, Jean-Claude Hollerich, n’est pas abattu. Avant la signature, ce soir, de l’accord scellé lundi dernier, le chef de l’Église catholique est revenu samedi, dans les colonnes du Wort, sur la nouvelle donne. Il y souligne les grandes chances que comporte ce nouveau départ pour l’Église catholique. « Lorsque l’accord sera entré en vigueur, notre position sur la place publique sera encore renforcée, justement grâce à la séparation qui existera. L’accord envoie en outre un signal clair (indiquant) que les différents cultes travaillent ensemble, qu’ils s’entendent entre eux et qu’ils ne vont pas tomber dans une guerre des religions », souligne même Jean-Claude Hollerich.
> Un « merci » lancé au gouvernement
Finalement, tout est allé très vite en ce début d’année. L’archevêque qualifie cependant de correcte la démarche du gouvernement. « Même si je ne suis pas prêt à jubiler, je peux cependant vivre avec le résultat obtenu. Il s’agit d’un compromis qui comprend des points qui font mal à l’Église, mais qui lui permettra d’assumer ses devoirs dans les 20 ans à venir », résume Jean-Claude Hollerich, qui tient également à souligner que les négociations étaient certes « difficiles », mais à tout moment « équitables ».
« C’est pourquoi je dois remercier le gouvernement. On a remarqué que leur intention n’était pas dirigée contre les religions. L’objectif était de redéfinir la place des religions dans la société », poursuit l’archevêque.
Jean-Claude Hollerich reste fidèle à son esprit d’ouverture en affirmant « comprendre l’argumentation du gouvernement, car la société n’est, depuis longtemps, plus exclusivement catholique. Il est tout aussi évident que les fabriques d’église ne pouvaient plus continuer à fonctionner sur la base d’une législation qui date de l’époque de Napoléon. On était obligés de se redéfinir et de se repositionner. »
L’accord scellé et signé d’ici quelques heures doit donc permettre à l’Église catholique de repartir du bon pied et de s’adapter à la société actuelle. Le point crucial reste cependant le financement. Jean-Claude Hollerich souligne que l’Église « n’est pas riche ». Même s’il se dit content que les traitements, mais aussi l’avenir des enseignants de religion et des curés restent en partie assuré par l’État. Il se dit également conscient que le financement de l’Église catholique doit être revu.
Dans ce contexte, il est prévu de créer un « fonds d’avenir » qui sera doté par des dons des croyants. « L’Église doit développer une stratégie concrète pour lever des fonds. Cette dernière doit être professionnelle et être soumise à un contrôle afin d’assurer que les donateurs puissent savoir où va leur argent. On a besoin de cette confiance pour pouvoir faire notre travail », lance Jean Ehret, directeur du centre Jean-XXIII, également interrogé par le Wort.
> Les cours de religion vont disparaître
Pour ce qui concerne les cours de religion, l’archevêque a annoncé samedi que l’Église n’allait pas continuer à offrir les cours existant actuellement entre ses murs. Elle va se concentrer, comme jusqu’à présent, sur la catéchèse. « Je regrette profondément que les cours de religion disparaissent. Je regrette également qu’on n’ait pas pu trouver d’accord sur un cours des religions. Or, je constate que, dans le nouveau cours d’éducation aux valeurs, le phénomène des religions aura toujours sa place et que ce cours sera neutre », affirme Jean-Claude Hollerich.
L’autre grande question concerne l’avenir des fabriques d’églises, qui, sous leur forme actuelle, vont continuer à fonctionner jusqu’au 1er avril 2017. Concernant la suite, l’archevêque affirme vouloir fermer le moins d’églises possible. « Si les gens souhaitent que leur église continue à exister, ce sera le cas. Il faudra cependant s’engager », souligne le chef de l’Église catholique du pays.
Il reste donc du pain sur la planche. Mais Jean-Claude Hollerich préfère voir le côté positif des choses. « Il nous faudra vivre avec nos moyens. Cela va nous responsabiliser davantage. (…) Je pense que nous allons avoir une Église vivante mais réaliste. Nous vivons un profond changement de culture généralisé. L’Église est la première à y faire face », conclut l’archevêque.
De notre journaliste David Marques