La ministre de la Justice, Sam Tanson, et le CSV sont d’accord pour abandonner le délai actuel fixé à 10 ans.
La députée Nancy Arendt (CSV) se trouve à la base du débat que la Chambre des députés a mené mercredi après-midi. Depuis de longues années, l’élue dit s’engager pour lutter plus efficacement contre les abus sexuels commis sur les mineurs, mais aussi les adultes. «Les victimes ne seront plus jamais les mêmes personnes. Elles sont meurtries pour la vie», souligne Nancy Arendt.
Les auteurs présumés de ces actes abjects échappent encore trop souvent à des poursuites sur le plan pénal. «Dans aucun autre domaine, les auteurs de crimes sur enfants sont aussi protégés», fustige la députée chrétienne-sociale. En cause est notamment un délai de prescription trop court. Au Luxembourg, ce délai est actuellement fixé à 10 ans après que la victime a atteint la majorité. Elle doit donc dénoncer les faits au plus tard à l’âge de 28 ans. Le CSV a introduit mercredi une proposition de loi pour allonger le délai de prescription à 30 ans. «Une victime pourra donc porter plainte jusqu’à l’âge de 48 ans», précise Nancy Arendt.
L’augmentation permanente du nombre de cas d’abus sexuels est la principale raison avancée pour justifier une adaptation du Code pénal. Le Conseil de l’Europe estime qu’un enfant sur cinq est, à un moment ou un autre, victime d’une forme d’exploitation ou d’abus sexuels. Dans l’Union européenne, comme dans le reste du monde, l’abus sexuel est le plus souvent commis dans l’environnement immédiat de l’enfant. Les chiffres font état de 70 % à 90 % des cas. Dans la grande majorité des cas d’abus sexuel sur un enfant, l’agresseur est connu de sa victime.
Une affaire par jour traitée par la police
Au Luxembourg, la section «protection de la jeunesse et infractions à caractère sexuel» a traité 882 nouvelles affaires en 2019. Dans le domaine des abus sexuels et des infractions graves contre mineurs, 304 nouvelles affaires ont été traitées en 2019, ce qui représente une augmentation immense de 36 % par rapport à l’année dernière (223 affaires). «Autrement dit, la police traite quasiment une affaire de ce genre par jour», écrit Nancy Arendt dans sa proposition de loi.
Même si l’allongement du délai de prescription ne rend pas plus simple l’élucidation des faits, un consensus se dégage entre gouvernement et opposition sur la question. Mercredi, la ministre de la Justice, Sam Tanson, est ainsi venue confirmer qu’elle travaille sur un texte de loi comprenant «une prolongation substantielle, voire une levée du délai de prescription» pour abus sexuels. «Il est primordial d’accorder à la victime ce droit. Et les auteurs présumés doivent savoir qu’ils risquent gros jusqu’au bout», fait remarquer Sam Tanson.
La Chambre a en outre appelé, mercredi, le gouvernement à mettre en place un Office national d’aide et de soutien pour abus sexuels, dirigé par un représentant permanent aux questions d’abus sexuels.
David Marques