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Tué par un camion dans une cour de ferme à Roedt : l’heure du procès


La victime est décédée après avoir été écrasée par l’avant du poids lourd qui manœuvrait dans la cour de ferme à Roedt le 31 janvier 2018. (Photo : police grand-ducale)

Le tribunal s’est penché vendredi sur le tragique accident survenu fin janvier 2018 dans une cour de ferme à Roedt. Un agriculteur de 68 ans est mort écrasé lors des manœuvres du camionneur.

Il était autour 8 h ce matin du 31 janvier 2018. Le camion venait récupérer du bétail dans cette ferme à Roedt. L’homme au volant était en train de terminer sa manœuvre pour se garer dans la cour.«Je suis rentré dans la maison pour aller chercher des documents», se souvient le frère de l’agriculteur, également présent pour accueillir le camionneur. C’est durant les quelques minutes de son absence que le tragique accident s’est produit. Avant même qu’il ne revienne, le conducteur du camion avait sonné à la porte : «Mamma mia, j’ai tué quelqu’un…»

Le 112 avait immédiatement été appelé. Mais les secours dépêchés sur les lieux n’avaient rien pu faire. L’agriculteur de 68 ans avait succombé à ses blessures. L’autopsie retient qu’il a été partiellement ou entièrement écrasé par l’avant du camion.

La position exacte du choc n’a pas pu être déterminée. À l’arrivée de la police, la victime se trouvait déjà dans l’ambulance. Aussi, le camion avait-il changé de position. Car après avoir senti que quelque chose n’allait pas – il parle d’un «léger ébranlement», le conducteur dit avoir fait marche arrière. L’absence de traces de sang n’a pas facilité la reconstitution de l’accident.

Il dit avoir voulu reculer, mais le camion a avancé

L’alcootest s’est révélé négatif. Lors de son audition à la police, le camionneur a expliqué avoir enclenché la marche arrière, mis le pied sur l’accélérateur, mais que le camion aurait fait un bond en avant. Il avait précisé que cela était lié à la mécanique de la boîte automatique, quand on n’appuyait pas à fond sur l’accélérateur. Une explication qui n’a pas pu être confirmée par l’expert qui a analysé le véhicule début 2020. Lui-même a manœuvré l’engin. Aucun défaut technique à signaler. Et il n’a ressenti ni secousses, ni bonds.

Est-il envisageable que le camionneur ait actionné la marche avant au lieu de la marche arrière? Cette hypothèse ne peut pas être exclue par l’expert. La carte tachygraphe a également été saisie après l’accident. Mais visiblement, toutes les données de la boîte noire non pas été extraites par la police. De sorte que l’expert ne dispose d’aucune indication sur la vitesse enregistrée.

Un camion sans rétroviseur frontal

Ce que l’expert constate toutefois c’est que le camion, d’un poids autorisé de 18 tonnes, ne disposait pas de rétroviseur frontal. Ce dernier, imposé par une directive européenne, permet de voir juste devant le camion. Il faut savoir que la cabine du conducteur est surélevée. À supposer que la victime, qui mesurait 1,82 m, se trouvait directement devant le camion, elle n’était donc pas visible. Si pour une quelconque raison elle était au sol – à cause d’une chute par exemple –, elle était encore moins visible par le conducteur. Et cela jusqu’à 4,70 mètres de distance.

Le camionneur sur le banc des prévenus poursuivi pour l’accident mortel a aujourd’hui 53 ans. Le tribunal n’a toutefois pas pu l’interroger vendredi matin sur ce qu’il a constaté en sortant du camion. Malade depuis le début du mois, le prévenu s’est fait représenter par son avocat lors des débats. «Il maintient sa version», a fait savoir Me Daniel Baulisch. «D’un point de vue humain, il se sent coupable. Il regrette profondément ce qui s’est passé. Mais la responsabilité pénale, c’est une question d’appréciation.» La défense parle d’un «évènement imprévisible». On ne pourrait reprocher aucune faute au prévenu. Et d’ajouter : «On se demande, si le camion avait été équipé d’un rétroviseur frontal, l’accident aurait peut-être pu être évité.»

Le «comportement fautif» du camionneur

Ce n’est pas la position du parquet. D’après son représentant, la présence d’un tel rétroviseur n’aurait pas amélioré la situation, si le conducteur indique s’être «concentré à 100 % sur ce qui se passait l’arrière du camion». Il constate également que lors de sa toute première audition à la police, il avait dit avoir voulu avancer un petit peu…

Le parquet exclut que la victime est responsable de l’accident. Il ne serait pas pensable qu’elle se trouvait longtemps immobile dans la portion non visible par le conducteur : «Elle n’avait aucune raison d’y être. Ce n’est pas là qu’elle peut faire des signes au conducteur, si elle ne peut pas le voir.»

Toujours selon le parquet, l’accident est bien dû au «comportement fautif» du camionneur. «En regardant en avant, il y aurait eu une grande probabilité qu’il voie la victime. Et il y aurait eu une grande probabilité que l’accident soit évité», conclut le parquetier. «La situation n’était pas si imprévisible que cela.» Voilà pourquoi il requiert contre le quinquagénaire une interdiction de conduire de 24 mois, une amende et trois mois de prison qui peuvent être assortis d’un sursis. Il n’a pas de casier judiciaire.

L’assurance indemnisant la famille de la victime, il n’y a pas eu de constitution de partie civile au procès. La 9e chambre correctionnelle rendra son jugement le 24 mars.

Fabienne Armborst

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