Faute de témoins clés présents, le procès des protagonistes d’une soirée qui a mal tourné au Time Out bar à Hollerich a dû être remis à une date ultérieure. Impossible de continuer sans eux.
Chaude ambiance un soir de février 2017 au Time Out, un bar dans la rue de Hollerich à Luxembourg. Lisandro, sorti de prison jeudi dernier où il purgeait une peine pour tentative de meurtre, est soupçonné d’avoir frappé Sandro à l’épaule d’un coup de couteau ainsi que d’avoir blessé un deuxième homme de part et d’autre du cou et à la poitrine. Une victime présumée qui ne se serait plus guère manifestée depuis les faits et vivrait au Portugal. À la suite de ses blessures, elle aurait souffert de problèmes moteurs et neurologiques au bras droit. Sans papiers, le jeune homme n’oserait pas se déplacer jusqu’au Luxembourg pour assister au procès. Il n’aurait pas non plus communiqué d’informations sur d’éventuelles séquelles dues à ses blessures.
Cesar, Sandro et Samuel sont, quant à eux, suspectés de rébellion envers les policiers intervenus sur les lieux cette nuit-là. Sandro avait été le premier avec Victor Hugo à avoir été appréhendé à leur sortie du bar. Le commissaire en chef avait demandé que soient interpellées toutes les personnes présentant des traces de sang. Les deux hommes se seraient montrés dociles, selon le policier, contrairement à Samuel et à César. Ces derniers auraient tenté d’empêcher les policiers d’immobiliser et de menotter Lisandro qui se serait défendu avec véhémence. Samuel aurait tenté de déstabiliser un commissaire en chef et Cesar aurait sauté sur le dos d’un inspecteur. Cesar, absent du procès lui aussi, se trouverait également au Portugal, selon Lisandro.
Mardi, le commissaire en chef et l’inspecteur de la police grand-ducale ont relaté les faits tels qu’ils les ont vécus cette nuit du 12 février 2017. «C’était l’ambiance typique du quartier de la gare un samedi au petit matin», s’était souvenu le gradé. «Une patrouille en poste dans la rue de Hollerich avait signalé une dispute entre un des videurs de l’établissement et un homme.» Rapidement, le commissaire en chef apprend qu’un homme aurait été blessé au couteau. Victor Hugo aurait vu Lisandro brandir ce qui pourrait être un couteau en direction de la victime présumée.
«Un témoin à peu près neutre»
Mercredi, le témoin clé était très attendu. Le dénommé Victor Hugo, «un des seuls témoins à peu près neutres», selon la présidente de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, empêché par son travail, n’est pourtant pas venu. Sa présence, ainsi que celle d’un autre témoin, étant indispensable pour le bon déroulement du procès, le procès a été interrompu et refixé au 1er et au 2 février 2022. Les témoins absents vont être condamnés à une amende de 500 euros qui devrait les motiver à se présenter alors à la barre. «La citation à comparaître à un procès n’est pas une invitation à une fête foraine», a lâché le procureur.
Seul Salvador, cité comme témoin, était présent. Il s’agit du patron de Sandro. Il avait passé le début de la soirée du 12 février 2017 avec le jeune homme et des amis communs à un concert. Il se souvient avoir été bousculé tandis qu’il dansait et avoir été heurté par un verre. Mardi, Lisandro avait contesté l’ensemble des faits qui lui sont reprochés excepté celui d’avoir lancé un verre. «Je lui ai demandé de faire attention à cause du sida», explique le témoin en pointant du doigt le jeune homme vêtu d’un polo blanc et d’un pantalon de couleur sombre comme ses deux coprévenus. «Il a eu une attitude provocatrice et il a avancé vers moi. C’était disproportionné comme réaction.» Marcelino, un de ses amis, serait intervenu pour apaiser les esprits. Salvador n’aurait pas poursuivi la soirée avec les jeunes gens et serait rentré chez lui. «Le lendemain matin, Marcelino m’a téléphoné pour me raconter ce qui s’était passé pendant la nuit. J’étais étonné.» Le témoin n’aurait pas eu vent d’une altercation ou d’incidents durant cette première partie de soirée.
L’arme du crime n’ayant pas été retrouvée, le sort de Lisandro est désormais suspendu entre les mains des deux témoins clés. Leurs témoignages sont cruciaux, car ils peuvent ou non condamner le prévenu de tentative de meurtre et de coups et blessures volontaires ou le disculper. La présidente de la 13e chambre a laissé planer la menace de la contrainte par corps si les deux hommes ne payaient pas les amendes et ne se présentaient pas aux nouvelles audiences.
Sophie Kieffer