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Esch : il avait mortellement fauché un jeune et pris la fuite


Le drame s'est produit sur la bretelle de sortie de l'A4 à Esch. L'automobiliste venant de Lallange a percuté le jeune Français sorti de son véhicule. (photo Fabienne Armborst)

Le procès du conducteur qui avait mortellement fauché un jeune de 24 ans sur la bretelle de sortie de l’A4-Monkeler s’est ouvert mardi. Après le drame, il avait pris la fuite. Outre le délit de fuite et l’homicide involontaire, le parquet lui reproche la conduite en état d’ivresse.

« Après le choc, je me suis immédiatement arrêté. J’ai allumé les warnings. Je suis sorti de la voiture. J’ai vu quelqu’un au sol. Mais à mi-chemin, j’ai fait demi-tour… Panique, black-out, stress, court-circuit… Je ne peux pas me l’expliquer.
– Vous auriez pu appeler le 112 depuis votre voiture ! Vous veniez de renverser quelqu’un.
– Je ne peux pas l’expliquer.
– Peut-être était-ce à cause de l’alcool. Quand on a bu, les décisions qu’on prend ne sont pas toujours les plus intelligentes… »

Depuis mardi après-midi, la 16e chambre correctionnelle se penche sur le tragique accident qui s’est produit cette nuit du 18 juin 2016 sur la bretelle de sortie de l’A4 menant à la zone Um Monkeler, à Esch-sur-Alzette. Sur le banc des prévenus, un homme de 48 ans. Aux alentours de 3h50, le conducteur de l’Opel Frontera venant de Lallange avait renversé un jeune Français de 24 ans sur la chaussée. Le choc avait eu lieu à une centaine de mètres de la station-service Q8.

Mais à l’arrivée de la police sur les lieux, le chauffard avait disparu. Les agents retrouveront quelques éclats de peinture, le rétroviseur d’une voiture grise… et ils tomberont sur un camionneur ainsi que les deux copains de la victime. L’un d’entre eux déclarera à la police : «Stéphane n’a même pas eu le temps de faire le tour du véhicule. Un véhicule venant de la direction de la station-service l’a renversé…»

Visiblement, une dispute verbale avec le chauffeur routier était à l’origine de l’arrêt de leur Infiniti. Le camionneur a témoigné mardi avoir reçu des appels de phares après une manœuvre au niveau du chantier sur l’A4 : «Parce qu’ils me faisaient signe, j’ai quitté l’autoroute. Dans la sortie il y avait deux voies. Je me suis arrêté sur la première, eux sur la deuxième.» Le témoin se souvient encore d’avoir parlé avec l’un des passagers à travers la vitre, quand d’un seul coup il avait entendu un choc. Il avait appelé les secours. Mais ces derniers n’avaient rien pu faire pour sauver la victime.

1,84 g d’alcool par litre de sang

Ce n’est qu’en cours de matinée que le conducteur de l’Opel Frontera s’était manifesté. Il n’avait pas téléphoné directement à la police, mais était passé par un ami. «J’ai entendu à la radio qu’une personne est décédée. Je ne savais pas quoi faire. Comme mon ami a senti que j’étais en panique, il a dit qu’il s’en chargeait», a-t-il expliqué à la barre.

«Je sais que j’ai commis une erreur, mais je ne l’ai pas vu.» À plusieurs reprises le quadragénaire a exprimé ses regrets. Lors de l’accident, il rentrait d’une soirée entre amis. Une soirée bien arrosée. En huit heures de temps, il avait ainsi descendu une quinzaine de verres. À midi, il présentait toujours un taux d’alcoolémie de 0,62 g. Ce qui donnait 1,84 g d’alcool par litre de sang au moment du drame, calcule l’expert. Celui de la victime, quant à lui, était de 1,57 g.

«Je me sentais bien pour prendre le volant», poursuit le prévenu. Il aurait bien vu les deux véhicules et aurait décéléré en les voyant à l’arrêt. Quand, d’un seul coup, il y avait eu le boum. «Il est possible que j’aie regardé sur le côté», se souvient-il.

D’après un expert, au moment du drame il roulait entre 55 et 65 km/h. Mais il n’y avait aucune trace de freinage. «Monsieur n’a même pas freiné», soulevait l’avocate de la partie civile représentant les parents, le frère et la sœur de la victime. Au total, la famille réclame 80 000 euros au titre du préjudice moral et 30 000 euros au titre du préjudice matériel.

La défense du prévenu, quant à elle, plaide l’acquittement. Me Philippe Penning ne conteste ni l’état d’ivresse ni le délit de fuite de son client. Mais l’absence de traces de freinage constituerait un élément indiquant que son client a été surpris. D’un point de vue technique, l’expert n’a pas pu prouver sans équivoque que le prévenu aurait pu éviter l’obstacle sur la chaussée. À voir quelles conclusions tirera le parquet. Le réquisitoire a lieu ce mercredi matin.

Fabienne Armborst