L’octogénaire qui avait tiré fin octobre 2019 sur le fils de son bailleur écope de dix ans de prison, dont six avec sursis. La chambre criminelle de Diekirch n’a pas retenu la circonstance aggravante de la préméditation.
«L’âge ne donne pas le droit d’agresser une personne d’une telle manière. Pour moi, ce n’est pas une circonstance atténuante.» Le procureur d’État adjoint avait requis 20 ans de réclusion, dont au moins 12 ans ferme, contre l’octogénaire qui, le 26 octobre 2019, au petit matin, avait tiré avec son revolver sur le fils de son bailleur qui venait changer avec un ouvrier la serrure de sa porte d’entrée. La balle a traversé le corps de la victime de 48 ans. Blessée en dessous de la clavicule gauche, elle a dû être opérée d’urgence. Selon le médecin légiste, l’hémorragie aurait pu être mortelle. Il n’aurait pas non plus manqué grand-chose : à quelques centimètres près, c’est le cœur ou l’aorte qui étaient touchés.
«S’il veut juste lui faire peur, pourquoi donc charge-t-il son arme de six balles? Et pourquoi la cache-t-il si longtemps avant les faits?» Le parquet réclamait une condamnation pour tentative d’assassinat. La chambre criminelle de Diekirch n’a au final pas retenu la préméditation. L’homme de 83 ans, qui dort depuis les faits à Schrassig, a donc écopé jeudi matin de dix ans de réclusion, dont six avec sursis. Placé sous le régime du sursis probatoire pour la durée de cinq ans, il n’a pas le droit de s’approcher de la victime et il doit l’indemniser. Une provision de 1 500 euros lui a été allouée en attendant l’expertise qui doit se prononcer sur son dommage matériel, corporel et moral. Enfin, il doit lui verser une indemnité de procédure à hauteur de 1 500 euros.
«Il avait peur d’être mis à la porte»
«L’acte était disproportionné. On ne veut pas le minimiser, mais ce sont les circonstances qu’il faut prendre en compte dans ce dossier, avait plaidé son avocate Me Lynn Frank. Il avait peur d’être mis à la porte…» Pendant un certain temps, l’octogénaire avait disposé de la maison unifamiliale pour un loyer de 600 euros par mois, avant de devoir partager les lieux avec d’autres personnes. D’où la nécessité de mettre une nouvelle serrure à la porte d’entrée, selon la victime. Mais cela n’a visiblement pas plu à l’octogénaire qu’on s’introduise chez lui. Alors qu’il avait sa victime dans le viseur avec son revolver, cette dernière, armée de son portable, l’a pris en photo. Un comportement sur lequel la défense n’a d’ailleurs pas manqué de rebondir : «Vous le voyez avec l’arme devant vous. Et vous prenez le temps de sortir votre portable, de le déverrouiller… Était-ce plus important de prendre une photo que de courir?»
La photo juste avant le tir
Cette photo figurant au dossier est révélatrice, avait considéré le procureur adjoint dans son réquisitoire : «Elle prouve aujourd’hui comment il tenait son arme : avec les deux mains et pas au niveau de la hanche.» Entre 1,5 et 2 mètres le séparaient de sa victime ce matin-là. «Il a réfléchi et tiré de sang-froid!»
À leur arrivée sur les lieux, les policiers avaient découvert dans la cuisine une seconde arme chargée, cachée dans un sac à pain. L’octogénaire avait dit que c’est une chance qu’ils l’aient trouvée avant qu’il n’ait eu le temps de s’en saisir. «Sinon je ne serais peut-être plus là aujourd’hui», avait-il lâché à la barre. Selon lui, il avait eu la volonté de se suicider après le coup de feu. La chambre criminelle a également ordonné la confiscation de cette arme.
Toutes les parties ont 40 jours pour interjeter appel contre le jugement.
Fabienne Armborst