Malgré la pression d’un virus qui galope, le reconfinement en France et le durcissement en Allemagne, le gouvernement de Boris Johnson résiste aux appels à confiner l’Angleterre et défend son approche locale.
Pays le plus touché en Europe avec plus de 45 000 morts, le Royaume-Uni a vu le bilan quotidien des décès dépasser les 300 deux jours de suite mardi et mercredi, niveaux qui n’avaient plus été observés depuis le mois de mai. Selon une étude de l’Imperial College de Londres et Ipsos-MORI réalisée sur plus de 85 000 volontaires, les contaminations doublent désormais tous les neufs jours en Angleterre. Le taux de reproduction du virus a atteint 1,6 au niveau national, avec un pic de 2,86 à Londres, indique également cette étude.
Au Royaume-Uni, chaque province du pays décide de sa stratégie en matière de lutte contre la propagation du virus. Les quatre nations sont entrées en même temps dans le confinement le 23 mars, avant d’en sortir progressivement à des rythmes différents. Il en va de même pour la réponse face à la deuxième vague. Ainsi au Pays de Galles, depuis vendredi soir et jusqu’au 9 novembre, les plus de trois millions d’habitants doivent rester chez eux.
En Angleterre, les restrictions ont été durcies à partir de l’été pour des dizaines de millions de Britanniques dans les zones les plus touchées par la propagation du virus, notamment au nord, où les élus locaux pressent le gouvernement d’esquisser un allègement des restrictions face à une économie locale prise à la gorge.
Dans ces régions défavorisées, épuisées par des semaines de restrictions locales sans progrès, les services hospitaliers se remplissent et l’un des hôpitaux de campagne mis en place au printemps, depuis mis en veille, a rouvert mercredi à Manchester. « Nous devons penser à changer d’approche », a déclaré jeudi sur BBC Radio 4 le professeur Steven Riley, spécialiste des maladies infectieuses à l’Imperial College de Londres, soulignant un « changement général de contexte ».
« Le virus a engrangé une énergie extraordinaire ces trois ou quatre dernières semaines », a quant à lui observé le Dr David Nabarro, de l’Organisation mondiale de la Santé. « Il est en effet surprenant de voir la férocité de la poussée actuellement ». Selon lui, les mesures prises par le gouvernement de Boris Johnson se sont avérées « très efficaces » dans certaines des zones les plus touchées dans le nord de l’Angleterre, mais un « repositionnement national » pourrait être nécessaire.
« Fais pas ça, Boris ! »
Pressé par l’opposition travailliste de les scientifiques d’instaurer un court confinement de deux ou trois semaines au moment des vacances scolaire d’automne, le pouvoir, déjà accusé d’avoir aggravé la mortalité en tardant à confiner en mars, résiste. « Nous continuerons avec notre approche locale et proportionnée en agissant là où le virus est le plus fort », a déclaré jeudi matin sur Sky News le ministre des Collectivités locales Robert Jenrick, pour qui cette approche « continue d’être la meilleure manière d’avancer ».
Soulignant l’ampleur des perturbations induites par un confinement, il a expliqué que le gouvernement ferait « tout pour éviter cette situation », insistant sur les séquelles à long terme des mesures des confinements introduits en Europe.
« Fais pas ça, Boris ! », lance la Une du Daily mail à l’adresse du Premier ministre, relayant les appels de chefs d’entreprises et de députés conservateurs. Dans le même ton, nombre de commentaires dans la presse conservatrice appellent à la défense des libertés individuelles ou viennent au secours de Victoria Derbyshire, présentatrice de la BBC contrainte de s’excuser après avoir dit prévoir d’enfreindre à Noël la limitation des réunions à six personnes.
Selon le Times, le gouvernement pense que le vaccin allemand développé par BioNTech et Pfizer pourrait être disponible avant Noël. Ce potentiel vaccin est l’un des six que Londres a déjà commandé, avec 40 millions de doses, deux injections étant nécessaires pour chaque patient. De son côté, le Guardian révèle que le gouvernement prévoit de tester 10% de la population anglaise chaque semaine grâce à des tests salivaires dont le résultat est connu en une demi-heure.
LQ/AFP