Les forces russes ont débarqué à Kharkiv, la deuxième plus grande ville d’Ukraine, dans la nuit de mardi à mercredi au cours de laquelle Joe Biden s’en est pris au « dictateur » Vladimir Poutine, qui a selon lui sous-estimé la réaction de l’Occident.
« Des troupes aéroportées russes ont débarqué à Kharkiv », a déclaré l’armée ukrainienne dans un communiqué sur Telegram. Des combats ont été signalés dans cette ville de 1,4 million d’habitants proche de la frontière avec la Russie et qui a déjà été ciblée mardi par plusieurs bombardements, ayant fait au moins dix morts et plus de 20 blessés, selon les autorités locales.
« Pratiquement, il ne reste plus de zone à Kharkiv où un obus d’artillerie n’a pas encore frappé », a affirmé Anton Guerachtchenko, conseiller du ministre de l’Intérieur ukrainien.
Ces attaques interviennent au septième jour de l’offensive russe en Ukraine, lancée le 24 février, qui s’est encore intensifiée mardi et suscite une large réprobation. L’Assemblée générale de l’ONU est d’ailleurs appelée à voter mercredi sur un projet de résolution destiné à condamner la Russie et lui demander un retrait « immédiat » de ses troupes.
Pour le président américain Joe Biden, son homologue russe a eu tort de « penser que l’Occident et l’Otan ne répondraient pas » à cette invasion.
« Poutine est maintenant plus isolé que jamais du reste du monde » et « nous sommes prêts, nous sommes unis », a martelé le chef d’État démocrate lors de son premier discours sur l’état de l’Union à Washington.
Dans la bataille contre « l’autocratie », « les démocraties sont au rendez-vous », a ajouté le président Biden, appelant le Congrès américain à offrir une ovation debout en soutien « au peuple ukrainien » qui « n’a peur de rien ».
Problèmes « logistiques »
Le futur assaut sur Kiev fait redouter un nombre considérable de victimes dans cette métropole comptant, en temps normal, près de trois millions d’habitants et dotée d’un riche patrimoine historique.
Des photos de la société américaine d’imagerie satellitaire Maxar montraient un convoi russe s’étirant sur des dizaines de kilomètres et se dirigeant vers la capitale.
« Nous avons le sentiment général que le mouvement de l’armée russe (…) vers Kiev est au point mort à ce stade », a toutefois dit un responsable du ministère américain de la Défense, évoquant la résistance ukrainienne, mais aussi des problèmes « logistiques », d’approvisionnement en nourriture et carburant.
Les forces russes semblaient en revanche avoir progressé dans le sud de l’Ukraine, sur les rives de la mer d’Azov. Dans le port de Marioupol, plus d’une centaine de personnes ont été blessées mardi dans des tirs russes, selon le maire, Vadim Boïtchenko.
À Kherson, dont les entrées étaient déjà contrôlées par les forces russes, ces dernières ont pris dans la nuit le contrôle de la gare ferroviaire et du port, selon le maire de la ville Igor Kolykhaïev, cité par des médias locaux.
Le ministère ukrainien de la Défense a par ailleurs indiqué dans la nuit redouter une attaque du Bélarus après avoir constaté une « activité importante » des avions dans la zone frontalière, et des convois de véhicules transportant des vivres et des munitions y ont été observés.
« Arrêter l’agresseur au plus vite »
Le ministère russe de la Défense a affirmé que ses troupes progressant sur la côte à partir de la Crimée avaient rejoint celles du territoire séparatiste prorusse de Donetsk, leur donnant une continuité territoriale stratégique.
L’information était dans l’immédiat invérifiable. Peu auparavant, l’armée ukrainienne avait affirmé avoir fait échouer cette tentative. Vladimir Poutine semble déterminé à poursuivre son offensive, en dépit de la pression internationale de plus en plus forte.
La Cour internationale de justice (CIJ), plus haute instance judiciaire des Nations unies, saisie par le gouvernement ukrainien qui accuse Moscou de planifier un génocide, a par ailleurs annoncé des audiences les 7 et 8 mars. Et en dépit surtout de sanctions économiques historiques.
Il y a quelques jours « certaines banques russes » ont été exclues du système de messagerie Swift, rouage-clé de la finance internationale. Du coup, une procédure de dépôt de bilan va être ouverte concernant la principale filiale en Europe de la plus grande banque russe, Sberbank, a annoncé le régulateur bancaire de l’UE.
Les émetteurs américains de cartes de paiements Visa, Mastercard et American Express ont annoncé mardi avoir pris des mesures pour empêcher des banques russes d’utiliser leur réseau.
Et plusieurs géants de l’économie américaine, d’ExxonMobil à Apple en passant par Boeing et Ford, ont annoncé mardi qu’ils prenaient leurs distances avec la Russie.
Fermeture du ciel américain
Joe Biden a annoncé l’interdiction de l’espace aérien des États-Unis aux avions russes, comme l’ont déjà fait l’Union européenne et le Canada.
Conséquence de ces tensions, les Bourses européennes et Wall Street ont terminé en forte baisse et les Bourses chinoises ont ouvert en repli.
De leur côté, les prix du pétrole continuaient leur flambée mercredi, le baril de Brent dépassant les 110 dollars pour la première fois depuis 2014, avant la réunion mercredi de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et de ses alliés (Opep+).
Idem pour les cours du blé et du maïs, à un niveau record en Europe. Outre les sanctions économiques, auxquelles s’ajoutent les manifestations de solidarité avec l’Ukraine dans de nombreux pays, la Russie a été écartée d’une multitude d’événements, du Mondial de football 2022 à la Coupe Davis de tennis, en passant par le Festival de Cannes.
Depuis le début de l’invasion russe le 24 février, un million de personnes ont été déplacées en Ukraine même et plus de 677.000 sont parties vers les pays voisins, selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés.
La Banque mondiale a annoncé une aide d’urgence de trois milliards de dollars pour l’Ukraine, dont au moins 350 millions pourraient être débloqués dès cette semaine.
De longues files de voitures continuaient à se diriger vers la frontière polonaise, à partir de Lviv, la grande ville de l’ouest de l’Ukraine devenue porte de sortie et centre de repli pour les Ukrainiens comme pour les ambassades occidentales.