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Poursuite des pourparlers sur l’Ukraine où l’offensive russe s’amplifie


Des voitures bloquées sur le pont de la rivière Irpin à Irpin, en Ukraine. (photo AFP)

Les pourparlers entre délégations russe et ukrainienne doivent continuer ce mardi, une lueur d’espoir émergeant depuis quelques jours, mais en contraste avec l’élargissement de l’opération russe à travers toute l’Ukraine.

Au moins trois fortes explosions ont été entendues mardi matin dans le centre de Kiev par plusieurs journalistes de l’AFP, l’un d’eux ayant aperçu une colonne de fumée s’élever au loin. La capitale ukrainienne est sous couvre-feu jusqu’à 6 h.

Les détonations sont parfois causées par les armes de défense anti-aérienne. Aucune déclaration n’a été faite de source officielle dans l’immédiat.

Au vingtième jour de guerre à la suite de l’invasion russe lancée le 24 février, la quatrième session de négociations pour tenter de trouver une issue à cette crise doit reprendre après une « pause technique » annoncée en fin d’après-midi lundi par le chef des négociateurs ukrainiens, Mykhaïlo Podoliak.

Cette fois, les discussions se déroulent par visioconférence après trois rounds en présentiel au Bélarus voisin puis une rencontre jeudi en Turquie des chefs de la diplomatie russe et ukrainienne.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait noté samedi une approche nouvelle, « fondamentalement différente », de Moscou dans les négociations.

Dans la nuit de lundi à mardi, il a affirmé via une vidéo publiée sur sa page Facebook que les Russes avaient « déjà commencé à comprendre qu’ils ne parviendront à rien par la guerre ». « On m’a dit que (les pourparlers en cours) étaient plutôt bons », a indiqué le chef de l’État, qui ne participe pas directement aux discussions. « Mais attendons de voir ».

Irruption télévisée 

De son côté, son homologue russe Vladimir Poutine avait évoqué vendredi des « avancées » au cours de ces différentes tractations tandis que l’armée russe accroissait son action sur le sol ukrainien, y compris dans des régions jusque-là épargnées.

« L’ennemi continue son offensive contre notre État. (…) Les forces d’occupation continuent de mener des frappes avec des missiles et des bombes, de l’artillerie et des chars sur des infrastructures et des quartiers civils », a dénoncé l’état-major de l’armée ukrainienne dans la nuit de lundi à mardi.

Le Kremlin a évoqué lundi « la possibilité de prendre sous contrôle total (les) grandes villes qui sont déjà encerclées ».
Les combats se sont ainsi intensifiés ces derniers jours autour de Kiev, presque entièrement encerclée. Plus de la moitié de ses trois millions d’habitants ont fui. La capitale est « en état de siège », selon un conseiller du président ukrainien.

Par ailleurs, Volodymyr Zelensky s’est dit « reconnaissant envers les Russes qui ne cessent d’essayer de transmettre la vérité. À ceux qui combattent la désinformation et disent la vérité, les faits réels à leurs amis et à leurs proches. Et personnellement à la femme qui est entrée dans le studio de Channel One avec une affiche contre la guerre ».

(capture d’écran)

Une femme – identifiée par l’ONG OVD-Info comme Marina Ovsiannikova, une employée de la chaîne – a fait irruption lundi soir pendant le journal télévisé le plus regardé de Russie avec une pancarte critiquant l’offensive en Ukraine, une scène rarissime en Russie.

Sur sa pancarte, on pouvait lire « Non à la guerre. Ne croyez pas la propagande. On vous ment, ici ». La vidéo de l’incident s’est propagée comme traînée de poudre sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes saluant un « courage extraordinaire ».

L’utilisation du mot « guerre » par des médias ou des particuliers pour décrire l’intervention russe en Ukraine est notamment passible de poursuites. Des lois prévoient de lourdes peines (jusqu’à 15 ans de prison).

L’enjeu Marioupol 

« D’après les informations disponibles, l’ennemi prévoit de renforcer le regroupement de (ses) troupes (…) en direction de Kharkiv », deuxième ville d’Ukraine, a avancé l’état-major de l’armée ukrainienne dans son communiqué, précisant que l’armée russe tentait aussi « de capturer Marioupol ».

« Les soldats ukrainiens sont parvenus à repousser les envahisseurs » de cette ville portuaire stratégique du sud-est qui est assiégée par l’armée russe, s’est-il félicité.

Selon lui, le camp russe a perdu dans son offensive environ 150 soldats, deux chars, sept véhicules de combat d’infanterie, et « a battu en retraite ».

Un convoi d’aide humanitaire, qui cherche depuis des jours à atteindre la ville, a de nouveau été bloqué lundi par des soldats russes à Berdiansk, à 85 km de Marioupol, selon les autorités ukrainiennes.

Quelque 400 000 habitants de Marioupol vivent terrés dans des caves, privés d’eau, d’électricité, de chauffage et de nourriture. Plus de 2 187 civils y ont péri depuis le 24 février, selon la municipalité.

Les forces navales russes ont « établi un blocus à distance de la côte ukrainienne de la mer Noire », a affirmé lundi le ministère britannique de la Défense.

Plus de 2,8 millions de personnes ont fui l’Ukraine depuis le début de l’invasion, selon un décompte publié lundi par l’ONU, qui recense aussi environ 2 millions de déplacés à l’intérieur du pays.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a mis en garde contre les répercussions de cette guerre, qui risquent de se traduire par « un ouragan de famines » dans de nombreux pays.

Outre la poursuite des pourparlers, la journée de mardi devrait également marquer l’entrée en vigueur du quatrième paquet de sanctions décidées lundi après-midi à Bruxelles par les ambassadeurs des 27 Etats membres de l’Union européenne. Elles devraient être publiées mardi au Journal officiel de l’Union européenne, devenant ainsi immédiatement applicables.

Yacht bloqué 

Les précédentes visent déjà 862 personnes et 53 entités russes. Figurer sur cette liste noire entraîne une interdiction d’entrer sur le sol de l’UE et permet la saisie des avoirs.

Un yacht d’un oligarque russe d’une valeur de près de 128 millions d’euros a par exemple été immobilisé lundi à Barcelone (Espagne) dans le cadre de ces sanctions, a annoncé dans la soirée le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez. « Et d’autres sont à venir », a-t-il prévenu, sans davantage de précision.

Selon le quotidien espagnol El Pais, il s’agit du yacht Valérie, qui serait lié à Sergueï Tchemezov, patron du conglomérat russe de l’industrie de défense Rostec, et allié de Vladimir Poutine.

Les sanctions internationales adoptées auparavant ont déjà gelé quelque 300 milliards de dollars de réserves russes à l’étranger.

La Russie a accusé lundi l’Occident de vouloir provoquer un défaut de paiement artificiel par ses sanctions gelant les avoirs de Moscou à l’étranger.

Le Kremlin pourrait avoir du mal à honorer plusieurs échéances de paiement de dettes en devises étrangères courant mars-avril, ravivant le souvenir de l’humiliant défaut de 1998.

Moscou est également visé par divers recours. La demande ukrainienne de son exclusion du Conseil de l’Europe, organisation de défense des droits humaines, doit être examinée jeudi.

De son côté, la Cour internationale de justice (CIJ) a indiqué lundi qu’elle rendrait son verdict mercredi dans la procédure lancée par Kiev, qui demande à la Cour d’ordonner à Moscou d’arrêter son invasion de l’Ukraine.

Le léger vent d’optimisme entourant les pourparlers a permis aux cours du pétrole de reculer lundi, le baril de WTI –référence aux États-Unis – terminant à 103,01 dollars après avoir dépassé les 130 dollars la semaine dernière.

Et il a chuté de plus de 5 % mardi à 97,13 dollars, cette fois sur fond d’inquiétudes d’un ralentissement de l’économie chinoise à cause des mesures drastiques annoncées par Pékin face à une recrudescence des cas de covid-19 dans le pays.