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Portugal: le président pose ses conditions à un gouvernement socialiste


Antonio Costa, leader du Parti socialiste portugais, devrait être nommé Premier ministre par le président. (photo AFP)

Le président portugais Anibal Cavaco Silva a réclamé lundi davantage de garanties sur la « stabilité » d’un futur gouvernement socialiste soutenu par la gauche radicale, au risque de prolonger une impasse politique qui dure depuis les élections du 4 octobre.

Pressé de toutes parts de mettre fin à l’incertitude, M. Cavaco Silva a chargé le leader du PS, Antonio Costa, 54 ans, de « déployer des efforts en vue de la formation d’un gouvernement stable, durable et crédible », mais a demandé des « clarifications » avant de le désigner comme Premier ministre.

Faute de pouvoir dissoudre le Parlement, il a assorti une éventuelle nomination de M. Costa d’une série de conditions, notamment le respect des engagements européens en matière de finances publiques. Une alliance inédite entre le PS, le Parti communiste, les Verts et le Bloc de gauche, proche du parti grec Syriza, avait fait chuter le 10 novembre le gouvernement de centre droit minoritaire de Pedro Passos Coelho, reconduit dans ses fonctions après avoir remporté les élections.

M. Cavaco Silva, un conservateur de 76 ans en fin de mandat, n’a jamais caché sa réticence à nommer un gouvernement socialiste appuyé au Parlement par des partis de gauche « anti-européens » et « opposés à l’Otan » et a réitéré ses doutes lors d’un entretien lundi avec M. Costa.

« Clarification formelle »

Il faut d’abord donner une « clarification formelle » sur plusieurs points, dont « l’adoption des budgets de l’Etat », « le respect des règles de discipline budgétaire » de la zone euro et l’appartenance du Portugal à l’Otan, a-t-il insisté. Ce dernier avait pourtant assuré encore vendredi que le PS était en mesure de former « un gouvernement stable avec un programme crédible et cohérent, qui respecte les engagements internationaux du pays et lui permettra de se doter le plus rapidement possible d’un budget pour 2016 ».

Mais les accords signés par le PS et ses alliés eurosceptiques sur le soutien à un futur gouvernement socialiste font l’impasse sur ces questions, en raison de divergences historiques qui persistent malgré le rapprochement. « Tout dépend de savoir si le président se contente de clarifications apportées par Antonio Costa ou si au contraire il exige davantage de négociations, ce qui serait extrêmement difficile », a déclaré à l’AFP le politologue Antonio Costa Pinto.

Si le Parti socialiste a envoyé dès lundi soir une réponse écrite au président de la République, sans en divulguer la teneur, les communistes ne semblaient pas près de revoir leurs positions.

« Chercher la confrontation »

« 50 jours après les élections, M. Cavaco Silva fait un pas supplémentaire vers la dégradation de la situation politique », a aussitôt réagi le secrétaire général du Parti communiste, Jeronimo de Sousa, accusant le chef de l’Etat de « chercher la confrontation » avec le Parlement.

Plus optimiste, le président du Parti socialiste Carlos Cesar a estimé que les clarifications apportées « dissiperaient les doutes du président », créant « les conditions pour une nomination d’Antonio Costa dans les prochaines heures ». Le Bloc de gauche a cru, quant à lui, déceler « un recul » dans l’attitude du président, jusqu’ici « opposé » à un gouvernement socialiste.

Le chef de l’Etat pourrait aussi maintenir le gouvernement de droite en attendant des législatives anticipées à l’été prochain, mais cette option ne semble pas du goût du Premier ministre démissionnaire Pedro Passos Coelho, qui serait constamment confronté au Parlement à une majorité de gauche.

Malgré le scepticisme du président, le scénario le plus probable reste la nomination du chef du Parti socialiste, qui sera soutenu au Parlement par une alliance des partis à sa gauche, pour la première fois en quarante ans de démocratie au Portugal.

« Le président va finir par nommer Antonio Costa, car il n’a pas trop le choix. Laisser en place un gouvernement de droite de gestion sans marge de manoeuvre au Parlement porterait préjudice au pays », a commenté le politologue José Antonio Passos Palmeira.

 

AFP