Les représentants des centres commerciaux ont dénoncé lundi soir l' »énorme imbroglio » induit par les annonces gouvernementales autour du pass sanitaire qui s’imposera ou pas en fonction de la présence à proximité de commerces de première nécessité.
« Tout cela est un énorme imbroglio », a lancé Gontran Thüring, délégué général du Conseil national des centres commerciaux (CNCC). « Le gouvernement a été trop vite sur cette histoire. On aboutit à une situation très complexe et ce n’est bon ni pour les Français, ni pour l’économie », a-t-il réagi. L’exécutif avait proposé dimanche de limiter l’obligation de présenter un pass sanitaire aux centres commerciaux de plus de 20 000 m2, à partir du début août.
Par la voix de son porte-parole Gabriel Attal, le gouvernement a annoncé lundi soir vouloir maintenir cette obligation, tout en tenant compte de l’avis du Conseil d’État qui a jugé que l’accès aux biens de première nécessité devait être garanti. Dans son avis rendu lundi, la plus haute juridiction administrative estime ainsi que la présentation d’un pass sanitaire dans les centres commerciaux est « susceptible de concerner tout particulièrement l’acquisition de biens de première nécessité, notamment alimentaires ». Or, la juridiction y voit « une atteinte disproportionnée aux libertés », notamment pour les personnes ne pouvant être vaccinées pour des raisons médicales et qui devront donc se faire « tester très régulièrement » pour accéder à ces centres.
À l’issue du Conseil des ministres lundi soir, Gabriel Attal a annoncé qu’il avait été « décidé d’adapter la rédaction de cette mesure dans le projet de loi » du gouvernement qui étend l’obligation du pass sanitaire. « Concrètement, l’article dans le projet de loi prévoit bien l’extension du pass sanitaire pour les centres commerciaux dont la superficie excède un seuil qui sera défini par décret », a indiqué Gabriel Attal, précisant que « la piste de travail » concernait les centres de plus de 20 000 m2, soit quelque 400 structures.
En pratique, si à « l’échelle d’un territoire, il y a des commerces qui ne sont pas dans le centre commercial, mais qui permettraient d’acheter des produits de premières nécessités, alimentaires ou pharmaceutiques, alors le pass sanitaire pourra s’appliquer dans le centre commercial de ce bassin de vie », a indiqué le porte-parole du gouvernement.
« Appréciation locale des préfets »
Mais lorsqu' »on ne peut garantir l’accès à des biens de première nécessité que dans un grand centre commercial, il n’y aura pas d’utilisation du pass sanitaire dans ce centre commercial », a ajouté Gabriel Attal. Concernant l’évaluation plus précise de ce qu’est un « bassin de vie », « on le fera en lien avec préfets et élus locaux », a-t-il poursuivi. « Le mécanisme proposé par le gouvernement ne parait pas répondre à l’avis du Conseil d’État et s’avère complexe, avec une analyse par ‘bassins de vie’ dont on ne voit pas vraiment comment elle se fera », regrette Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du Commerce.
Il s’est dit « extrêmement surpris par cette annonce, dans la mesure où le Conseil d’État a évoqué de très nombreuses atteintes aux libertés ». « Les préfets eux-mêmes vont interpréter, donc on va sans doute avoir des décisions différentes, voire contradictoires selon les départements », craint Gontran Thüring.
« Le vrai problème, c’est qu’aujourd’hui ça ne donne pas de visibilité aux acteurs sur le terrain, car tout cela est laissé à une appréciation locale des préfets », remarque Yohann Petiot, directeur général de l’Alliance du Commerce. Il espère que le gouvernement fournira une grille de lecture claire aux préfets pour minimiser les risques d’inégalités entre les différents territoires.
Un point semble cependant rassurer les professionnels du secteur : « Gabriel Attal a indiqué lundi que le pass sanitaire ne serait pas contrôlé dans chaque magasin des centres commerciaux », a mis en avant Yohann Petiot.
AFP/LQ