Emmanuel Macron entame mercredi une visite d’État de trois jours aux États-Unis, qui devrait sceller de manière spectaculaire la réconciliation franco-américaine après une grave crise diplomatique entre les deux proches alliés, malgré quelques remous autour du protectionnisme commercial américain.
Le président français et son épouse, Brigitte Macron, arrivés mardi soir à Washington, sont invités par Joe et Jill Biden dans un restaurant de la capitale fédérale pour un dîner privé, prélude à l’accueil en grand apparat de jeudi à la Maison Blanche.
« USA ! Un moment pour célébrer l’amitié entre nos deux pays. Un moment pour progresser ensemble dans une période de grands défis », a tweeté en anglais Emmanuel Macron peu après son arrivée.
USA! A moment to celebrate the friendship between our two countries. A moment to progress together in a time of great challenges. pic.twitter.com/Pw5EfktFC2
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 30, 2022
Comme son prédécesseur républicain Donald Trump en 2018, le président démocrate a choisi son homologue français pour la première visite d’État de son mandat.
« Il s’agit de faire honneur à notre plus vieil allié », a dit à des journalistes français un porte-parole de l’exécutif américain, John Kirby.
« La France est littéralement l’un des fils dont est tissée notre nation », a-t-il ajouté, en multipliant les superlatifs à l’égard du « leadership », de « l’expérience » et de « la sagesse » d’Emmanuel Macron qui a notamment, aux yeux du gouvernement américain, l’avantage de la « longévité » dans ses fonctions par rapport à un chancelier allemand ou un Premier ministre britannique arrivés plus récemment au pouvoir.
Quel changement d’ambiance depuis cette grosse colère de Paris, il y a un peu plus d’un an !
En septembre 2021, les États-Unis annonçaient une nouvelle alliance, AUKUS, avec l’Australie et le Royaume-Uni, suscitant l’ire de la France qui se voyait tenue à l’écart de la stratégie américaine pour la région-clé Asie-Pacifique et perdait, au passage, un mégacontrat pour vendre des sous-marins à Canberra.
Depuis, Washington a multiplié les gestes pour apaiser son allié.
« Le niveau de coopération, sa profondeur, est assez remarquable quand on pense à l’état des relations il y a environ un an », a estimé John Kirby. « Au cours de la dernière année, la France a été littéralement au cœur de chacune des questions de sécurité nationale qui comptent pour les Américains et pour nos alliés », a-t-il insisté, évoquant un partenariat « résolument tourné vers l’avenir ».
« Exemptions »
C’est sur des thèmes d’avenir que porte la journée de mercredi. Emmanuel Macron doit enchaîner les séquences sur la coopération spatiale, avec la vice-présidente Kamala Harris et en présence des astronautes français Thomas Pesquet et Sophie Adenot, sur la biodiversité et le climat avec des parlementaires américains, et sur le nucléaire civil avec des acteurs de la filière.
Le chef de l’État s’adressera aussi à la communauté française, après la traditionnelle cérémonie au cimetière national d’Arlington.
Le dîner intime des deux couples présidentiels pourrait permettre d’aborder, de manière informelle, les principaux sujets au menu de l’entretien de jeudi dans le Bureau ovale.
Avant la visite, la France a tenté de faire monter la pression sur le plan massif de soutien à la transition énergétique voulu par Joe Biden, ou Inflation Reduction Act (IRA), qui accorde de généreuses subventions aux véhicules électriques, batteries ou énergies renouvelables à condition qu’ils soient « made in America ».
Jugeant cette loi « protectionniste », Paris a dit espérer obtenir des « exemptions » pour certaines industries européennes.
Mais la Maison Blanche, très attachée à cette pièce maîtresse du bilan de la présidence Biden, n’a pas l’intention d’annoncer des dérogations dans l’immédiat, et encore moins de détricoter sa loi — dont elle assure qu’elle bénéficiera, in fine, également à l’économie européenne.
L’Élysée met donc davantage l’accent sur l’autre volet de sa parade à l’IRA : la promotion, auprès des autres Européens, de l’adoption d’une arme commerciale comparable, un « Buy European Act » qui donnerait, aussi, la priorité aux produits fabriqués sur le Vieux Continent.
Les deux dirigeants devraient par ailleurs afficher un message d’unité sur l’Ukraine, en promettant de continuer à soutenir Kiev autant que nécessaire, tout en expliquant que des négociations avec Moscou ne pourront avoir lieu que lorsque le président ukrainien Volodymyr Zelensky le jugera opportun.
En attendant, John Kirby a accordé un satisfecit à la volonté d’Emmanuel Macron, parfois controversée, de maintenir le dialogue avec son homologue russe Vladimir Poutine.
« Nous pensons que c’est une bonne chose », « nous saluons la capacité du président Macron » de maintenir « la communication avec le président Poutine », a assuré le porte-parole américain.