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Cour des métiers, CSL, ULC… : le budget 2023 passé au crible


Les avis sur le projet de budget de l’État pour 2023 sont «très importants» aux yeux du rapporteur Max Hahn. L’élu libéral a pris le soin d’échanger avec les auteurs sur les «pistes de réflexion» formulées.

La dernière ligne droite pour le budget 2023 approche. Le 13 décembre, Max Hahn va soumettre son rapport à la Chambre des députés. Au bout de deux jours de débats, le vote en plénière est prévu le 15 décembre. Jusqu’à présent, l’élu libéral a mené une quarantaine d’entrevues avec les acteurs les plus divers pour dresser un document de synthèse très complet.

Indispensables demeurent les avis des Chambres professionnelles, mais aussi ceux émanant de la société civile. «J’ai tenu à rencontrer en personne les partenaires qui ont formulé des avis. Le document écrit est une chose. Échanger de vive voix sur les positions des uns et des autres est encore plus important», affirme-t-il.

D’une manière plus globale, Max Hahn juge «très important» les avis rendus par les différents acteurs, appelés à se prononcer sur le projet de budget : «On s’aperçoit de l’énorme travail qui est investi dans ces avis. J’admire la passion avec laquelle ces personnes défendent leur cause.»

Un déficit record s’annonce

Depuis le dépôt du budget 2023 en date du 12 octobre, sept avis officiels ont déjà été rendus. S’ajoutent des prises de position d’autres acteurs, tels que l’ULC ou la Fondation Idea (lire ci-dessous). Tous se sont prononcés sur un projet qui repose, pour rappel, sur un déficit record de 2,8 milliards d’euros pour l’État central.

Ce montant est réduit à 1,8 milliard d’euros à l’échelle de l’administration publique, réunissant le budget de l’État proprement dit, ainsi que les soldes dégagés par la sécurité sociale et les communes.

Est-ce que des éléments formulés par exemple par la Chambre des salariés vont être repris par le rapporteur ? «Il faut savoir que les avis sont très divergents. Il y a des acteurs qui estiment que le gouvernement compte dépenser trop de deniers publics, tandis que d’autres clament que les dépenses sont insuffisantes. Les positions divergent aussi fortement sur la politique fiscale», répond-il dans un premier temps.

«Il existe aussi des personnes qui sont embarrassées par certains avis trop politiques. Personnellement, cela ne me dérange pas. Je considère les propositions comme des pistes de réflexion qui permettent d’élargir le débat», complète Max Hahn.

Des éléments sortis des avis pourraient trouver place dans le discours du rapporteur, qui va mettre l’accent sur un meilleur vivre-ensemble.

L’avis de la Chambre des salariés

➡ «Les mesures ne sont pas à la hauteur des défis»

La Chambre des salariés (CSL) ne cache pas que le monde traverse une «période d’instabilité et d’incertitudes économiques provoquée par la guerre en Ukraine et la hausse des prix qui en résulte». Elle défend donc la politique budgétaire contracyclique menée par le gouvernement.

Mais, considérant que la situation des finances publiques est «meilleure qu’annoncée», la CSL fustige le paquet de mesures inscrit dans le budget 2023, en le jugeant insuffisant pour soutenir les ménages : «Les inégalités sociales et la pauvreté ne (sont) pas parmi les priorités de ce (…) budget».

La CSL revendique une revalorisation des prestations familiales, un soutien renforcé aux monoparentaux et une hausse «conséquente et structurelle» du salaire minimum. En outre, elle souhaite une «adaptation complète et immédiate» du barème d’imposition à l’inflation.

«En matière de politique fiscale, le projet de budget est une déception (…) car il manque d’ambition et les mesures ne sont pas à la hauteur des défis (…)», conclut la CSL.

L’avis de la Chambre de commerce

➡ «Une remise à plat des finances publiques s’impose»

La Chambre de commerce a choisi un jeu de mots pour intituler son avis : «Les défi(cit)s s’accumulent». L’analyse s’inscrirait «de nouveau dans un contexte exceptionnel et largement incertain, qui entraîne l’accroissement des déficits et l’accumulation de défis, au gré des « polycrises«  qui affectent le Luxembourg, l’Europe et le monde (…)».

Un appel à la «prudence» est lancé, car avec une dette publique qui va avoisiner le seuil des 30 % du PIB, la marge de manœuvre ne cesserait de se réduire. Pire : «Une croissance économique moindre de 0,5 point (…) seulement, entre 2023 et 2026, suffirait à propulser la dette publique bien au-delà de ce seuil, soit à 33,4 % du PIB en 2026», venant menacer la notation AAA, «primordiale pour l’économie luxembourgeoise». 

La Chambre de commerce estime qu’«une remise à plat des finances publiques s’impose (…), afin de générer une marge de manœuvre permettant de faire face à de nombreux défis – actuellement identifiés ou susceptibles de survenir à l’avenir».

L’avis de la Chambre des métiers

➡ «Certaines des mesures auraient pu être plus sélectives»

La Chambre des métiers ne sait pas trop sur quel pied danser. D’un côté, elle affirme pouvoir «appprouver le recours à la dette (…), alors qu’il s’agit d’éviter à la fois des pertes massives de pouvoir d’achat (…) et une vague de faillites (…) d’entreprises (…)». Même si «certaines des mesures prises auraient pu être plus sélectives».

De l’autre, elle estime que «les déficits récurrents et l’augmentation de la dette ne sont pas soutenables». Dans un premier temps, elle accorde son soutien à la «politique d’investissement ambitieuse, construisant l’avenir du pays, tant dans l’intérêt du développement économique futur que dans l’intérêt du bien-être de la société tout court».

La Chambre des métiers pointe en outre le fait que le gouvernement a omis de budgétiser une probable troisième tranche indiciaire en 2023, à prendre en charge par l’État : «Ce surcoût (…) va avoir un impact non négligeable sur les finances publiques.»

En résumé : le gouvernement est face à «un exercice d’équilibriste périlleux».

L’avis de l’Union luxembourgeoise des consommateurs

➡ «Le budget reste en deçà des attentes»

L’Union luxembourgeoise des consommateurs (ULC) enregistre que «le gouvernement a l’intention de continuer à développer l’État social». Or, en y regardant de plus près, «on constate que la priorité est donnée au renforcement de l’économie». Du coup, «le budget de l’État reste en deçà des attentes» de l’ULC.

«Il semble que les responsables politiques n’aient pas encore pris conscience (…) que non seulement les personnes socialement défavorisées, dont environ 25 % des ménages se situent au seuil de la pauvreté, mais aussi de nombreux ménages de la classe dite moyenne, n’ont pas les moyens de faire face à leurs dépenses», regrette l’ULC.

Elle constate qu’une enveloppe de 2,3 milliards d’euros sera consacrée à la décarbonation du pays. L’ULC se demande «s’il ne serait pas préférable d’investir au moins une partie de cette somme colossale dans des mesures concrètes d’aides aux ménages pour (…) éviter que de plus en plus de personnes se retrouvent dans des situations financières difficiles».

L’avis de la Cour des comptes

➡ «Une transformation de la tripartite en quadripartite»

La Cour des comptes a pris tout le monde de court en proposant dans son avis d’élargir l’instrument de crise qu’est la tripartite à la société civile. L’idée part de la réflexion que «le recours à l’endettement soit orienté vers l’avenir en promouvant la transition énergétique, socio-environnementale et digitale de notre économie et de notre société».

Pour faire face à ces défis, la Cour plaide pour «une transformation de la tripartite en quadripartite intégrant les principales organisations engagées dans la lutte contre le changement climatique pour que tous les aspects écologiques, économiques et sociaux liés au changement climatique soient pris en considération lors des négociations».

La Cour estime en outre que le budget de l’État est «de moins en moins en mesure d’absorber la charge financière découlant des crises successives». Par conséquent, elle juge «utile que les autorités mènent une profonde réflexion sur la voie qui devra être tracée en ce qui concerne l’évolution de la dette publique».

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