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L’Ouzbékistan dit adieu à Karimov, son homme fort pendant plus de 25 ans


Le président ouzbek Islam Karimov le 1er novembre 2015. (photo AFP)

L’Ouzbékistan enterrait samedi son président Islam Karimov, mort à 78 ans d’une hémorragie cérébrale après avoir dirigé d’une main de fer pendant plus de 25 ans le pays le plus peuplé d’Asie centrale, sourd aux critiques des Occidentaux.

Les funérailles du premier et seul président de l’Ouzbékistan indépendant, loué par ses partisans pour avoir maintenu la stabilité dans cet Etat musulman frontalier de l’Afghanistan mais accusé par ses détracteurs de graves atteintes aux droits de l’Homme, se tiennent dans sa ville natale de Samarcande (sud), joyau historique sur la Route de la Soie.

Les autorités de l’ex-république soviétique ont décrété trois jours de deuil national à partir de samedi. L’intérim est assuré par le président du Sénat, Nigmatilla Iouldachev, en attendant la tenue d’élections dans les trois prochains mois sans qu’un successeur officiel n’ait été désigné et en l’absence de réelle tradition démocratique.

Selon les images diffusées par la télévision nationale, une cérémonie d’adieu s’est tenue sous un soleil de plomb sur la place du Régistan dominée par trois impressionnantes universités islamiques des XVe et XVIIe siècles. Le corps a ensuite été porté par des hommes à travers la foule vers la nécropole du Shah i-Zinda, où Karimov doit être inhumé selon les rites musulmans.

« Notre peuple, l’Ouzbékistan a subi une perte irréparable », a déploré le Premier ministre Chavkat Mirzioïev, cité par l’agence russe Interfax.

« La mort nous prive du fondateur de l’Etat ouzbek, du grand et cher fils de notre peuple », a-t-il ajouté. Karimov a agi « au nom de du maintien de l’indépendance de l’Ouzbékistan, d’une vie dans la paix et la tranquillité », a-t-il souligné, rappelant en particulier la menace terroriste, alors que le pays s’inquiète de la montée de l’islam radical et de l’influence de l’organisation Etat islamique.

Parmi les invités officiels figuraient le Premier ministre russe Dmitri Medvedev, ainsi que le président tadjik Emomali Rakhmon et Premier ministre kazakh Karim Maximov.

La dépouille du président défunt avait été transporté en avion dans la matinée de la capitale Tachkent à Samarcande. Avant et après le vol, le cortège a parcouru les rues des deux villes où s’étaient massés des milliers d’Ouzbeks.

« Grande perte »

« Si notre président avait vécu encore dix ans, l’Ouzbékistan aurait été méconnaissable, encore plus fort », a assuré à l’AFP un homme de 58 ans à Samarcande, où le centre ville avait été bouclé « Quand nous avons appris sa mort, avec toute ma famille nous nous sommes mis à pleurer, c’est une grande perte pour tout Ouzbek, il a rendu notre pays libre et développé ».

Islam Karimov fait figure d’archétype des dirigeants arrivés au pouvoir avant la chute de l’Union soviétique, à l’instar du défunt président turkmène Saparmourat Niazov et de Noursoultan Nazarbaïev toujours au pouvoir au Kazakhstan.

Né le 30 janvier 1938, il a gravi tous les échelons de l’appareil du Parti communiste à l’époque de l’URSS jusqu’à prendre la tête de la république soviétique d’Ouzbékistan. A l’indépendance, en 1991, il se maintient au pouvoir et s’emploie à éliminer tous ses opposants.

De nombreuses ONG accusent M. Karimov d’avoir régulièrement truqué les élections, arrêté arbitrairement des centaines d’opposants et soutenu le recours à la torture dans les prisons.

Il avait été hospitalisé le 27 août après avoir souffert d’une grave hémorragie et immédiatement placé en réanimation.

Plusieurs successeurs potentiels

Après près d’une semaine de rumeurs sur son état de santé et d’informations officielles diffusées au compte-gouttes, puis l’arrivée de premières condoléances de pays étrangers, la télévision nationale a finalement interrompu ses programmes vendredi soir.

D’un ton grave, le présentateur, assis en costume sombre devant un fond bleu, a annoncé en ouzbek puis en russe que le coeur du président avait cessé de battre vendredi à 20H15 (15H15 GMT) et qu’il avait été déclaré mort quarante minutes plus tard.

Selon les experts, au moins trois hauts responsables ouzbeks pourraient chercher à prendre la succession de Karimov.

Le Premier ministre Chavkat Mirzioïev dirige la commission chargée d’organiser les funérailles, une indication sur le rôle important qu’il pourrait désormais jouer.

Mais deux autres hommes sont également pressentis, le ministre des Finances Roustam Azimov et le puissant chef de la sécurité Roustam Inoyatov considéré comme l’un des responsables de la mort de 300 à 500 manifestants pendant une manifestation à Andijan (est) en 2005 réprimée par les forces de l’ordre.

Le Quotidien / AFP