Le Parlement européen a donné mardi le coup de grâce au bazar de chargeurs emmêlés débordant des tiroirs: d’ici deux ans, les smartphones, tablettes et autres petits appareils électroniques vendus dans l’UE devront tous avoir le même chargeur.
Après ce vote plébiscite des eurodéputés à Strasbourg, le port de type USB-C devra devenir l’unique chargeur pour les appareils électroniques portables vendus dans l’UE d’ici l’automne 2024.
Cette législation pionnière dans le monde devient réalité au grand dam d’Apple, qui, en juin, critiquait un texte qu’elle accusait d’étouffer l’innovation et de couper l’UE -soumise à un choix de normes « obsolètes »- du reste du monde.
« C’est un grand jour pour les consommateurs, un grand jour pour notre environnement », s’est réjoui, dans l’hémicycle du Parlement européen, l’eurodéputé travailliste maltais Alex Agius Saliba, rapporteur du texte voté par 602 voix (13 voix contre, 8 abstentions).
« Ceci est le passé ! », avait-il lancé, lors d’un débat quelques heures plus tôt, agitant un enchevêtrement de chargeurs hétéroclites, comme on en trouve dans les tiroirs de la plupart des Européens.
Cette obligation va s’imposer pour les téléphones mobiles, les tablettes, les liseuses électroniques, les casques, les appareils photo numériques, les écouteurs sans fil, les consoles de jeux vidéo portables, les GPS, les claviers et souris d’ordinateurs, ainsi que les enceintes portatives. Et ce, quelque soit leur fabricant.
Les ordinateurs portables seront aussi concernés au premier semestre 2026.
« L’exemple de l’UE »
« Je suis convaincu que de nombreux pays suivront l’exemple de l’UE. Nous serons chef de file », a estimé mardi le Bulgare Andrey Kovatchev, du principal groupe politique PPE (droite).
Alors qu’il en existait encore une trentaine de modèles différents il y a une dizaine d’années, le nombre de types de chargeurs existants pour les nouveaux appareils électroniques s’est déjà progressivement fortement réduit.
Ils sont désormais au nombre de trois : le connecteur Micro USB qui a longtemps équipé la majorité des téléphones, l’USB-C, une connexion plus récente, et la technologie de chargement Lightning d’Apple.
Une fois le dernier aval purement procédural du Conseil de l’UE (États membres) et la publication de la loi au Journal officiel, les pays européens auront deux ans pour la mettre en application. Donc d’ici à l’automne 2024.
« Cette période de transition doit permettre aux fabricants d’adapter leur chaîne de fabrication », a expliqué Margrethe Vestager, vice-présidente de la Commission européenne.
Par ailleurs, les consommateurs devront désormais avoir le choix d’acheter un nouvel appareil électronique avec ou sans chargeur.
Le texte harmonise également la technologie de recharge rapide pour éviter que la vitesse de charge soit bridée en cas d’utilisation d’un chargeur d’une marque différente de l’appareil.
Alors qu’elle se répand de plus en plus, la recharge sans fil devra aussi répondre d’ici fin 2024 à des exigences d’interopérabilité, que la Commission européenne doit harmoniser.
Impact environnemental
Le déploiement d’un chargeur unique « va représenter au moins 200 millions d’euros d’économies par an pour les consommateurs européens et permettre de réduire de plus d’un million de tonnes les déchets chaque année », a souligné Mme Vestager.
Selon les institutions européennes, les chargeurs jetés ou inutilisés représentent actuellement environ 11 000 tonnes de déchets électroniques par an.
Mais « c’est la toute petite partie visible dans l’iceberg dans l’impact environnemental du numérique », a relevé l’eurodéputé écologiste français David Cormand, évoquant « l’obsolescence programmée » ou la faible « durabilité » et « réparabilité » des appareils électroniques.
« Il ne faut pas que le fil (du chargeur) soit là pour cacher la forêt du désastre écologique que représente le numérique », a-t-il critiqué.