La Slovénie, l’un des plus petits pays européens, se trouve à son tour en première ligne et «dépassée» par l’arrivée de milliers de migrants exténués et frigorifiés, qui précèdent une nouvelle vague de candidats à l’asile partis de Turquie
Le parlement de Ljubljana a donné de nouvelles compétences à l’armée, appelée à aider la police à faire face à l’afflux de migrants à la frontière, et a demandé une aide financière à l’Union européenne, au cours d’une session extraordinaire qui s’est tenue jusqu’à mercredi à l’aube.
Aux deux extrémités de la route qui mène vers l’Europe de l’Ouest, la situation est proche de la saturation. La Grèce est confrontée ces derniers jours à «un pic dans les arrivées», selon le Haut-commissariat pour les réfugiés (HCR) de l’ONU, tandis que la Slovénie s’est dite «dépassée» par le flux à ses frontières.
La hâte des migrants – hommes, femmes et enfants, surtout syriens, afghans et irakiens fuyant la guerre – d’achever ce périple avant l’hiver et la peur d’une fermeture des frontières expliquent cette accélération, selon le HCR. Le gouvernement slovène, selon lequel près de 19 500 migrants sont entrés sur son territoire depuis samedi, en a appelé au soutien de l’UE qui peine depuis l’été à se mobiliser pour faire face à cette situation sans précédent.
Après la fermeture par la Hongrie de sa frontière avec la Croatie, les migrants passent désormais par ce petit pays de deux millions d’habitants qui a décidé d’étendre de façon exceptionnelle les prérogatives de l’armée. «Le flux de migrants ces trois derniers jours dépasse toutes nos capacités», s’est alarmé le gouvernement.
Il s’agit pour les autorités de parvenir à enregistrer, héberger provisoirement, puis acheminer vers l’Autriche des milliers de personnes qui pour beaucoup empruntent désormais «la frontière verte», et non les postes-frontières officiels, à travers une nature détrempée et boueuse.
Ainsi, à Kljuc Brdovecki, à 25 km à l’ouest de Zagreb, la capitale croate, la frontière avec la Slovénie se franchissait mardi par un petit pont enjambant une rivière, le périple se poursuivant dans les champs de maïs.
Des centaines de migrants, arrivés en train, avançaient en file indienne, parfois emmitouflés dans des couvertures, les chaussures crottées, a constaté une journaliste de l’AFP. «L’espoir est par là!», voulait croire en montrant l’Ouest, Taysiir Halaby, un Syrien de 35 ans sur la route avec sa famille.
500 000 passés par la Grèce
Pour l’instant, «la frontière slovène reste ouverte» mais «si les arrivées restent aussi nombreuses, nous devrons reconsidérer la situation», a prévenu le ministère slovène de l’Intérieur. Dans le même temps, Ljubljana accuse Vienne de limiter les entrées de migrants, même si l’Autriche a démenti tout contingentement à sa frontière sud.
Une porte-parole de la Commission avait rappelé que quatre millions d’euros de fonds d’urgence avaient été octroyés à la Slovénie, à instar d’autres pays en première ligne de cette crise.
La Commission a d’ailleurs appelé ces Etats à coopérer alors que l’agacement monte entre les gouvernements slovène et croate, le premier reprochant au second d’envoyer sans coordination des dizaines de cars et de trains à sa frontière.
Les autorités croates sont elles-mêmes aux prises avec un afflux considérable de migrants remontant la route des Balkans à partir de la Grèce où le nombre des arrivées a «recommencé à augmenter radicalement», avec quelque 8 000 ces dernières 24 heures, selon une source policière.
Sur les 643 000 migrants qui ont rejoint l’Europe par voie maritime depuis le début de l’année, plus de 500.000 sont passés par la Grèce, selon des chiffres de l’ONU publiés mardi. Selon l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex, Grèce et Italie disposeront bientôt de 291 gardes-frontières supplémentaires pour gérer la crise.
A Bruxelles, une source européenne a par ailleurs confié que la répartition de réfugiés dans l’UE à partir de l’Italie et de la Grèce, initiée il y a dix jours, était déjà menacée de blocage faute de capacités d’accueil clairement identifiées. «Nous avons déjà pratiquement épuisé les places que les États membres se sont engagés à fournir», a dit cette source sous couvert d’anonymat.
AFP/M.R.