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Irlande du Nord : Arlene Foster, l’unioniste convaincue emportée par le Brexit


Cette unioniste passionnée a toujours donné l'image d'une femme de conviction qui ne transige pas avec ses principes. (archives AFP)

Partisane acharnée de l’union de sa province à la couronne britannique tout au long de sa carrière, la Première ministre d’Irlande du Nord Arlene Foster, 50 ans, a été emportée par le vif mécontentement de son camp sur les effets du Brexit.

La quinquagénaire aux convictions politiques forgées pendant les Troubles qui ont ensanglanté la province britannique et frappé sa propre famille a annoncé sa démission mercredi un peu plus d’un an après sa prise de fonction, incapable de maintenir la confiance des siens face au conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Cette avocate de formation pourtant rompue aux négociations n’a rien pu faire pour empêcher la mise en place de contrôles douaniers entre l’Irlande du Nord et la Grande-Bretagne, créant en mer d’Irlande une frontière virtuelle honnie des unionistes, conséquence de l’accord de Brexit conclu entre Londres et Bruxelles.

Ces dispositions spéciales visent à empêcher le retour d’une frontière physique avec l’Irlande voisine pour préserver la paix conclue en 1998 après des décennies de Troubles entre unionistes et républicains, mais elles se sont traduites par des perturbations d’approvisionnement qui ont ravivé les tensions communautaires dans une province toujours à fleur de peau.

Goutte d’eau alimentant la fronde de son parti : la décision d’Arlene Foster de s’abstenir lors du vote, en avril, par le Parlement local d’une motion appelant à interdire les thérapies de conversion de genre, une attitude jugée trop timide par les membres ultra conservateurs de son parti DUP.

Femme de conviction

Pourtant, cette unioniste passionnée a toujours donné l’image d’une femme de conviction qui ne transige pas avec ses principes. Des convictions forgées dans le sang. Elle a huit ans, en 1979, lorsque des hommes de l’Armée Républicaine Irlandaise (IRA) tirent une balle dans la tête de son père, policier à mi-temps, dans leur ferme située près de la frontière, fortement militarisée à l’époque, avec la République d’Irlande. Il survit à l’attaque.

A seize ans, elle réchappe d’un attentat contre son autobus scolaire, perpétré par l’IRA, qui visait le conducteur, membre des forces armées.

Mariée et mère de trois enfants, cette femme au caractère bien trempé est généralement en ligne avec les idées ultra-conservatrices de son parti en matière de mœurs, hostile à l’avortement et au mariage homosexuel, récemment autorisés dans la province. Elle était redevenue Première ministre d’Irlande du Nord en janvier 2020, après avoir déjà dû quitter son poste, empêtrée dans un scandale sur la gestion des subventions destinées aux énergies renouvelables.

Façonnée par les attaques

Elle a expliqué que les attentats dont elle avait été témoin dans son enfance avaient construit sa vision de la vie, dans un entretien au Belfast Telegraph. « Cela fait partie de ce que je suis, on ne peut pas me l’enlever. Cela a façonné mon adolescence, mes choix politiques mais en même temps, je ne pense pas que l’on doive laisser le passé décider du futur ».

Elle étudie le droit à la Queen’s University de Belfast avant de rejoindre l’Association des Jeunes Unionistes, l’organisation de jeunesse du Parti unioniste d’Ulster (UUP), la principale formation protestante qui a gouverné presque sans opposition en Irlande du Nord depuis la création de la province en 1921, au moment de l’indépendance de l’Irlande. Élue dans la nouvelle assemblée nord-irlandaise en 2003, elle quitte l’UUP l’année suivante pour rejoindre le DUP, car en désaccord avec les termes de l’accord de paix pour l’Irlande du Nord qui a mis fin en 1998 à trois décennies de violence, négocié par l’UUP.

Et elle a rapidement progressé dans ses rangs. Jusqu’à devenir Première ministre d’Irlande du Nord une première fois en janvier 2016. Elle a eu une relation houleuse avec son vice-Premier ministre d’alors Martin McGuiness, un dirigeant du parti républicain Sinn Fein, qui, malade, démissionne en janvier 2017 et meurt quelques semaines plus tard. Les deux partis sont en effet contraints de gouverner ensemble au terme de l’accord de paix. Non sans mal. La province va ainsi rester trois ans sans gouvernement faute d’accord entre eux, de janvier 2017 à janvier 2020.

LQ/AFP