Alexis Tsipras doit manœuvrer pour éviter une scission de son parti Syriza avant un nouveau vote au Parlement, aujourd’hui, sur de nouvelles mesures.
Ayant éteint le feu in extremis face aux créanciers il y a dix jours pour éviter une possible sortie de la Grèce de la zone euro, le Premier ministre fait à présent les frais d’un choix difficile: accepter de faire passer les mesures douloureuses imposées en corollaire de la nouvelle aide.
Une décision qui a provoqué la plus importante crise au sein de la gauche radicale Syriza ces dernières années : la défection de 32, voire 39 en comptant absences et absentions, des 149 députés de son groupe parlementaire, hostiles à la poursuite de l’austérité.
Un nouveau vote sur un deuxième train de mesures est prévu dans la nuit d’aujourd’hui à demain au Parlement, seconde étape vers la finalisation de l’accord passé le 13 juillet entre Athènes et les dirigeants de la zone euro en vue d’un prêt de plus de 80 milliards d’euros à la Grèce. Ce vote est considéré comme un nouveau test pour le gouvernement, au pouvoir depuis juste six mois.
Les dissidents n’ont pas rendu leur siège de député et ont même affirmé «leur soutien au gouvernement» mais le Premier ministre a fustigé leur comportement, qui s’oppose «aux principes de camaraderie et de solidarité. Je lis des déclarations héroïques mais il n’y a aucune proposition alternative» au plan des créanciers, a lancé Alexis Tsipras, hier, à ses collaborateurs, selon une source gouvernementale.
«Soit se séparer, soit continuer ensemble»
Le Premier ministre avait sévèrement jugé, la semaine dernière, que ce soutien des dissidents au «premier gouvernement de gauche dans l’histoire du pays n’a pas de sens» car celui-ci sera dorénavant contraint «de continuer avec un gouvernement basé sur un nombre minoritaire de députés par rapport aux 300» de l’Assemblée.
Pour faire adopter les mesures la semaine dernière, Tsipras a dû s’appuyer sur les 13 votes de son partenaire dans le gouvernement, le parti de droite souverainiste Anel, et sur 106 voix de l’opposition.
«Il y a une pression et un embarras au sein du parti, il s’agit de situations inédites pour Syriza», juge Costas Zachariadis, membre du comité central du Syriza, remarquant qu’il «a fallu faire un choix urgent, signer l’accord, pour ne pas se trouver devant une situation incontrôlable et l’effondrement des banques».
Plus de la moitié des 201 membres du comité central, organe principal du parti, mais qui ne comprend que cinq ou six députés, avaient réclamé la semaine dernière «la convocation immédiate de l’organe pour protéger son unité».
«L’accord constitue un coup d’État contre le gouvernement grec avec, comme objectif, l’extermination exemplaire d’un peuple qui avait imaginé qu’il pourrait y avoir une autre voie en dehors du modèle néolibéral de l’austérité extrême», indiquait le communiqué.
«La distance politique et psychologique est claire entre les dissidents des différents courants et le gouvernement, dit Zachariadis. Il faut qu’on décide ce qu’on veut, soit se séparer, soit continuer ensemble», dit-il.
Pour Vassiliki Georgiadis, professeur de sciences politiques à l’université Pantehon d’Athènes, «la rupture avec les députés issus surtout de la plateforme de gauche – l’aile dure gauchiste du parti dont certains membres s’étaient même prononcés pour la sortie de la Grèce de la zone euro – serait la seule solution».
S’appuyer sur les partis d’opposition
Syriza a été élu fin janvier en promettant la fin des politiques d’austérité et de nombreux électeurs et partisans du Syriza se sentent «trahis» après le nouveau paquet de mesures de rigueur.
Vassiliki Georgiadis pense qu’Alexis Tsipras doit simplement poursuivre son mandat en s’appuyant sur les partis d’opposition pour passer les lois «difficiles». «Ce n’est pas le premier gouvernement minoritaire en Europe», dit-elle, en opposition à certains analystes qui prédisent «des élections anticipées» à l’automne.
«La politique est utile quand c’est pour l’intérêt du peuple, même au prix de faire un pas en arrière», a estimé pour sa part, lundi, la nouvelle porte-parole du gouvernement, Olga Gerovassili, rejetant également l’éventualité d’élections anticipées.
AFP