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France : des restrictions d’eau inédites


Baignade interdite et surtout impossible dans ce cours d’eau à sec, dans le sud-est du pays. (Photo : afp)

La France pourrait connaître de nombreuses restrictions d’eau dès le mois de mars, après un nouveau record de 32 jours sans pluie et un hiver très sec.

Un mois qui a mis en péril le rechargement des nappes phréatiques, déjà épuisées par la sécheresse historique de l’été 2022. «La France est en état d’alerte. […] On a environ deux mois de retard de remplissage», a reconnu hier Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, en première ligne pour gérer les tensions sur l’usage de l’eau entre agriculture, production électrique, loisirs et écosystèmes. Lundi prochain, le ministre doit réunir des préfets afin de «prendre des mesures de restriction qui soient soft, dès le mois de mars, pour éviter de se retrouver dans des situations catastrophiques d’arbitrage» à l’approche de l’été.

«Il n’y a pas d’agriculture sans eau»

Pendant ce temps, les Pyrénées-Orientales sont en alerte sécheresse depuis juin, rejointes par le Var depuis vendredi. Et dans les Landes, mardi, un millier d’agriculteurs ont manifesté préventivement pour défendre leurs quotas de prélèvement et la construction d’ouvrages pour stocker l’eau. «Il n’y a pas d’agriculture sans eau», a répété mercredi le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, devant la presse, confirmant que 60 nouveaux projets d’ouvrages hydrauliques à vocation agricole allaient être «mis en service d’ici à juin». Or, ces projets suscitent de vives tensions avec les militants écologistes, qui réclament de repenser le modèle agricole pour s’adapter au changement climatique.

L’heure est donc aux économies d’eau, un thème sur lequel la France fait figure de mauvaise élève. «On a eu une culture de l’abondance», a encore déclaré le ministre Béchu, avec «moins de 1 % de nos eaux usées retraitées», alors qu’elles sont réutilisées «10 fois plus en Italie, 20 fois plus en Espagne» et près de 85 fois plus en Israël. Côté distribution, «20 % de notre eau potable part dans des fuites et on n’a pas de plan» pour stopper l’hémorragie, a-t-il reconnu, «avec des territoires qui ont parfois jusqu’à 70 % de fuite», dont beaucoup sont ceux ayant manqué d’eau potable à l’été 2022.

Le temps presse

En 2019, la France prélevait quelque 31 milliards de mètres cubes d’eau par an, quand 208 milliards de mètres cubes se renouvelaient annuellement dans les milieux naturels, selon les statistiques du ministère. Mais le plan Eau du gouvernement – une cinquantaine de mesures censées tirer les leçons de la crise inédite de 2022, quand la quasi-totalité des départements connaissaient des restrictions – se fait attendre. Prévu en janvier, il devrait désormais être dévoilé d’ici à la fin mars.

Le temps presse. La France métropolitaine n’a pas connu de véritable pluie entre le 21 janvier et le 21 février – le cumul des précipitations agrégé dans la métropole étant quotidiennement inférieur à 1 millimètre –, soit pendant 32 jours, la plus longue période depuis le début des mesures en 1959, a indiqué hier Météo-France. Cette sécheresse, qui bat le record de 31 jours établi au printemps 2020, pendant le confinement, devrait enfin s’interrompre avec le passage actuel d’une perturbation faiblement pluvieuse.

Des anomalies qui se répètent

Mais l’épisode est d’autant plus préoccupant qu’il survient en hiver, période de recharge cruciale des nappes phréatiques, beaucoup moins nourries par les pluies printanières. Celles-ci sont surtout absorbées par le retour de la végétation. «Depuis août 2021, tous les mois sont déficitaires en pluie à l’exception de décembre 2021, juin 2022 et septembre 2022», souligne Météo-France, ajoutant que «le mois de février 2023 devrait se terminer avec un déficit pluviométrique de plus de 50 %, devenant ainsi l’un des mois de février les plus secs jamais enregistrés».

À ce déficit de pluie s’ajoute une chaleur au-dessus de la norme «depuis douze mois d’affilée», février pouvant être «le treizième de cette série inédite» depuis les premières données fiables de 1947, selon Météo-France. Ces anomalies de chaleur et de sécheresse ne sont plus des événements isolés mais se répètent à plus brève échéance et avec davantage d’intensité, illustrant les prévisions du GIEC, les experts du climat de l’ONU, sur les conséquences du réchauffement climatique causé par l’activité humaine. «Le réchauffement climatique, c’est entre 15 et 40 % de réserve d’eau disponible en moins pour la France», a rappelé mercredi Christophe Béchu.

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