Un fragile espoir de trêve entre Israël et le Hamas subsiste mercredi dans la bande de Gaza, toujours sous la menace d’une offensive sur Rafah, dernier refuge pour près d’un million et demi de Palestiniens.
L’Egypte, médiateur traditionnel dans le conflit israélo-palestinien, en particulier à Gaza, a accueilli mardi les directeurs du renseignement américain et israélien ainsi que le chef du gouvernement qatari pour des pourparlers sur une trêve incluant une nouvelle libération d’otages. La délégation israélienne est ensuite repartie du Caire, ont rapporté mercredi des médias israéliens.
Les discussions entre le directeur de la CIA, William Burns, le chef du Mossad, David Barnea, le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani, et des responsables égyptiens, ont été « positives, a annoncé la télévision AlQahera News, proche du renseignement égyptien. Elles se poursuivront durant « les trois prochains jours », a indiqué la même source.
Un responsable du bureau politique du Hamas, Khalil al-Hayya, va conduire une délégation au Caire pour y rencontrer les chefs des services de renseignements égyptien et qatari, probablement mercredi, a indiqué une source au sein du mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, un des dirigeants les plus critiques de l’opération israélienne, sera également reçu mercredi au Caire par son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi, sa première visite en Egypte après une décennie de brouille. M. Erdogan a expliqué ce déplacement dans ce pays, ainsi que précédemment aux Emirats arabes unis, par son souci d' »arrêter le bain de sang » à Gaza.
« Nous travaillons intensément avec l’Egypte et le Qatar à une proposition pour la libération des otages », a indiqué mardi soir à Washington le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken.
Selon Israël, 130 otages se trouvent encore dans la bande de Gaza, dont 29 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées le 7 octobre. Une trêve d’une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël.
Déplacés du nord au sud
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a récemment ordonné à l’armée israélienne de préparer une offensive sur Rafah, qui est selon lui le « dernier bastion » du Hamas.
Environ 1,4 million de Palestiniens, selon l’ONU, soit plus de la moitié de la population de Gaza, sont massés dans cette ville, piégés à la frontière fermée avec l’Egypte, la plupart ayant fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois dans le territoire assiégé par Israël.
« S’ils me demandent de retourner dans la ville de Gaza, je ne le ferai que si c’est sûr », a témoigné à Rafah une mère de famille, Ahlam Abou Assi, déplacée avec les siens toujours plus vers le sud du territoire palestinien. « Sinon, je préférerai mourir ici. Ils meurent déjà de faim là-bas », a-t-elle ajouté en pleurant.
« Les opérations militaires à Rafah pourraient conduire à un massacre à Gaza », a averti mardi le chef des Affaires humanitaires de l’ONU, Martin Griffiths, appelant Israël à ne pas « continuer à ignorer » les appels de la communauté internationale.
Le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas a fait état mercredi d’un bilan de 104 morts, en majorité des femmes et des enfants, au cours de la nuit dans des attaques israéliennes.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent de commandos du Hamas infiltrés de la bande de Gaza dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils tués ce jour-là, selon un décompte réalisé à partir de données officielles israéliennes.
Le gouvernement israélien a juré de « détruire » en représailles le mouvement islamiste, qu’il considère comme une organisation « terroriste », de même que les Etats-Unis et l’Union européenne.
L’offensive israélienne a fait 28.473 morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas.
« Mort ou vivant »
L’armée israélienne a diffusé mardi une vidéo montrant selon elle le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinouar, dans un tunnel le 10 octobre, trois jours après le début de la guerre.
La « traque » du cerveau présumé de l’attaque du 7 octobre « ne s’arrêtera que lorsque nous l’aurons capturé mort ou vivant », a affirmé le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, soulignant de facto qu’il avait réussi à y échapper depuis quatre mois.
Malgré les nombreuses mises en garde internationales, Benjamin Netanyahu s’est dit déterminé à poursuivre « la pression militaire jusqu’à la victoire complète » sur le Hamas, et la libération des otages. Il a néanmoins assuré dimanche qu’Israël ouvrirait à la population « un passage sécurisé » pour quitter Rafah, sans préciser vers quelle destination.
Les Etats-Unis, principal allié d’Israël, s’opposent à une offensive sans garanties pour la sécurité des civils. Le président Joe Biden a réclamé à Israël un plan « crédible » pour épargner la population.
La Chine a aussi exhorté mardi Israël à arrêter « au plus vite » son opération militaire à Rafah.
L’Allemagne a appelé Israël à garantir des passages sûrs pour la protection des civils à Rafah, où deux journalistes d’Al Jazeera ont été grièvement blessés dans une frappe israélienne, selon la chaîne qatarie.
D’après le Wall Street Journal, Israël proposerait de créer 15 vastes camps de 25.000 tentes chacun dans le sud-ouest de la bande de Gaza, dans le cadre d’un plan d’évacuation.
Rafah, devenue un gigantesque campement, est le principal point d’entrée de l’aide humanitaire à Gaza, insuffisante pour répondre aux besoins de la population qui vit dans des « conditions proches de la famine », selon le Programme alimentaire mondial (PAM).