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Crises humanitaires : un sommet mondial inédit


Le vice-secrétaire général de l'Onu Jan Eliasson à l'ouverture du sommet humanitaire mondial le 22 mai 2016 à Istanbul. (Photo : AFP)

Des dirigeants et ONG du monde entier sont réunis lundi à Istanbul pour un sommet inédit, parrainé par l’ONU, visant à améliorer la manière globale de répondre aux crises humanitaires provoquées par les conflits et le réchauffement climatique.

Avec environ 60 millions de déplacés et 125 millions de personnes ayant besoin d’assistance dans le monde, de nombreux acteurs du secteur, États, organisations non gouvernementales et entreprises, estiment que le système humanitaire actuel est à bout de souffle et a besoin d’être repensé d’urgence. «Jamais depuis la Seconde guerre mondiale autant de personnes n’avaient été forcées de quitter leur foyer», a déploré le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon à l’ouverture du sommet. «Nous sommes ici pour façonner un avenir différent», a-t-il ajouté.

«Ce n’est pas une tâche aisée», a-t-il poursuivi, et atteindre les objectifs exige «une volonté politique à une échelle que nous n’avons pas vue au cours des dernières années». Le sommet de deux jours veut engendrer une série «d’actions et d’engagements concrets» pour, entre autres, prévenir les conflits, faire respecter le droit international humanitaire et garantir des sources de financement stables pour les projets humanitaires.

Hôte du sommet, le président turc Recep Tayyip Erdogan a exhorté la communauté internationale à «prendre ses responsabilités». «Le système actuel a des insuffisances (…), le fardeau n’est porté que par certains pays», a-t-il lancé, rappelant que la Turquie accueillait environ trois millions de réfugiés, dont 2,7 millions de Syriens. «Très souvent, des promesses de dons sont faites, mais l’argent ne suit pas pour être mis dans les projets», a pour sa part déploré la chancelière allemande Angela Merkel. «Cela doit cesser».

Les engagements pris lors de ce sommet ne seront toutefois pas contraignants, ce qui a suscité le scepticisme. Anticipant une «déclaration de bonnes intentions» et aucune avancée concrète, l’influente ONG Médecins Sans Frontières (MSF) a annoncé qu’elle ne participerait pas au sommet.

« Nouveau consensus international »

Le sommet, qui accueille près de 6 000 participants, dont plus de 60 chefs d’État et de gouvernement, a débuté avec la traditionnelle photo de famille, suivie d’une cérémonie d’ouverture rythmée à laquelle a pris part l’acteur Daniel Craig, qui a incarné James Bond dans plusieurs films. Ce sommet a le potentiel de «lancer le plus grand mouvement humanitaire de notre histoire», a-t-il déclaré, mettant en garde contre des «phrases creuses» qui ne seraient pas suivies d’actions.

Des rencontres bilatérales en marge de l’événement sont également attendues : Mme Merkel a fait savoir qu’elle évoquerait l’état de la démocratie en Turquie avec le président Erdogan lundi. Le choix d’Istanbul pour accueillir ce sommet inédit est aussi symbolique que controversé. La Turquie accueille 2,7 millions de Syriens, mais plusieurs ONG accusent ses autorités, qui démentent, de renvoyer des Syriens dans leur pays en guerre.

Plusieurs conflits dans la région, notamment en Syrie, où plusieurs cas de civils morts de faim dans des villes assiégées ont été rapportés, illustrent de manière criante les limites du système humanitaire actuel. «Nous avons besoin d’un nouveau consensus international en faveur du respect du droit international humanitaire», a insisté Mme Merkel. «Que ce soit en Syrie ou ailleurs, nous voyons que des hôpitaux et des centres sont systématiquement bombardés», a-t-elle déploré.

L’ONG MSF, dont 75 hôpitaux ont été attaqués l’année dernière, a indiqué qu’elle boycotterait le sommet en raison du manque d’initiatives concrètes pour mettre fin aux «graves restrictions mises en places par certains États» en termes d’accès humanitaire. Malgré tout, les participants, dont de nombreuses ONG de petite ou moyenne taille en première ligne des crises humanitaires, espèrent que le sommet impulsera au moins un élan dans la bonne direction.

Il faut que le sommet d’Istanbul soit une «étape majeure», a dit Kerem Kinik, dirigeant du Croissant rouge turc, en fixant des objectifs de développement et en consolidant le système de financements. «Aujourd’hui, ici, nous faisons des promesses. Nous devrons joindre le geste à la parole», a déclaré Recep Tayyip Erdogan. «Nous aurons alors réglé tous nos problèmes».

Le Quotidien/AFP