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Allemagne : ouverture d’un des derniers procès de gardien de camp nazi


Le procès de Bruno Day va se dérouler en douze audiences de maximum 2 heures, pour des questions de santé (Photo : AFP).

L’un des derniers procès pour les atrocités commises dans les camps de concentration nazis s’est ouvert jeudi en Allemagne, visant un ancien gardien qui affirme ne pas avoir eu le choix à l’époque.

Âgé de 93 ans, l’accusé, Bruno Dey, est entré dans la salle d’audience du tribunal de Hambourg en chaise roulante, le visage dissimulé par une dossier rouge et flanqué d’une assistante faisant office d’infirmière. « Pourquoi faire ce procès aujourd’hui ? il faut se souvenir de ce qui s’est passé la semaine dernière à Halle » avec la tentative d’attentat contre une synagogue par un extrémiste de droite allemand, a déclaré à Hambourg le « chasseur de nazis » Efraim Zuroff , le directeur du Centre Simon Wiesenthal de Jérusalem. « L’âge ne doit pas empêcher la tenue d’un procès. Il a été un rouage de la plus grande tragédie de l’Histoire et il a choisi de le faire », a-t-il ajouté.

Un procès sur douze audiences

Cette première séance, surtout consacrée à la lecture de l’acte d’accusation, n’a duré que deux heures, le temps maximal quotidien fixé par le tribunal pour les douze audiences programmées jusqu’au 17 décembre, en raison de l’état de santé de l’accusé. Il est accusé de complicité dans des milliers de meurtres lorsqu’il était gardien, « entre août 1944 et avril 1945 », au camp de Stutthof dans le nord de la Pologne, à 40 km de Gdansk. Il s’agit du premier camp nazi construit hors d’Allemagne.

Environ 65 000 personnes y sont mortes, essentiellement des femmes juives des pays baltes et de Pologne. Il a été intégré au système d’extermination des Juifs en juin 1944. La complicité de M. Dey, 17 ans à l’époque des faits, est engagée, a souligné le parquet, dans le meurtre de 5 230 prisonniers – 5 000 en « créant et maintenant des conditions qui mettent la vie en danger », 200 par gazage et 30 d’une balle dans la nuque. En tant que gardien de camp, « il a soutenu l’assassinat horrible en particulier des détenus juifs », a relevé jeudi le procureur. L’accusé nonagénaire s’est défendu en affirmant ne pas avoir eu le choix à l’époque. « Il n’est pas entré de plein gré dans la SS à l’époque, il n’a pas choisi d’être envoyé dans un camp de concentration », a assuré son avocat Stefan Waterkamp.

Sévérité accrue, mais très tardive, de la justice allemande

La tâche de l’accusé consistait selon le procureur à « empêcher la fuite, la révolte ou la libération des prisonniers » juifs du camp, condamnés à être exterminés par balle ou au gaz Zyklon B, selon l’accusation. « Ce type de procès est très important pour la mémoire » et pour « la connaissance » des atrocités nazies, a noté le petit-fils d’une survivante du camp, trop âgée pour venir à Hambourg, Ben Cohen. Ces dernières années, l’Allemagne a jugé et condamné plusieurs anciens SS pour complicité de meurtre, illustrant la sévérité accrue, mais très tardive, de sa justice.

« Pour les survivants, cela demeure un scandale qu’une toute petite partie seulement des nazis aient été poursuivis en justice et aient pu se réintégrer avec succès dans la société » après la guerre, a condamné jeudi à Hambourg le vice-président du Comité Auschwitz, Christoph Heubner. Parquets et tribunaux allemands ont élargi aux gardiens de camps le chef d’accusation de complicité de meurtre, auparavant réservé aux personnes qui occupaient des postes élevés dans la hiérarchie nazie ou directement impliquées dans des homicides.

Aucun de ces condamnés n’est cependant allé jusqu’ici en prison, en raison de leur état de santé. Le cas le plus emblématique a été la procédure engagée contre John Demjanjuk devant le tribunal régional de Munich. Ancien gardien du camp d’extermination de Sobibor, il s’est vu infliger en 2011 une peine de cinq ans de prison. Il est mort en 2012 avant son procès en appel. Il y a encore 23 affaires de ce type en cours d’instruction au sein des parquets allemands, dont 12 concernent le seul camp de Sachsenhausen.

AFP

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