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À peine réélu, Boris Johnson met la pression sur Bruxelles


Boris Johnson a décidé de mettre en place, dans un délai jugé très court par les responsables européens et les milieux d’affaires, les nouveaux rapports du Royaume-Uni avec l'Union européenne. (photo AFP)

À peine réélu à une écrasante majorité, Boris Johnson met la pression sur Bruxelles pour parvenir à un accord commercial post-Brexit avant la fin 2020, excluant toute prolongation de la période de transition censée adoucir la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Faisant resurgir le spectre d’une rupture brutale, le Premier ministre britannique veut interdire par une loi toute extension au-delà de 2020 de la période de transition suivant la sortie du Royaume-Uni de l’UE le 31 janvier, alors que les responsables européens jugent déjà ce délai très court pour conclure un tel accord. « Notre programme indiquait clairement que nous n’étendrions pas la période de transition et la nouvelle loi d’application de l’accord de retrait interdira légalement au gouvernement d’accepter toute extension », a indiqué une source au 10, Downing Street. Pour Boris Johnson, qui avait fait de la réalisation du Brexit une promesse phare de sa campagne, il s’agit de respecter la confiance accordée par les électeurs aux conservateurs, qui ont triomphé en raflant 365 sièges sur 650 au dépens des travaillistes.

« Les électeurs de ce pays ont changé le gouvernement et notre parti pour le mieux et nous devons récompenser leur confiance en travaillant à fond pour changer notre pays pour le mieux », avec au programme « justice sociale » et « meilleures infrastructures », a-t-il commenté en dirigeant mardi son premier conseil des ministres post-scrutin. « Nous ne devrions pas du tout être gênés de dire que nous sommes un gouvernement du peuple », a-t-il ajouté avant la première séance du nouveau Parlement dans l’après-midi.

Vers un nouveau « no deal »?

Le dirigeant conservateur présentera donc vendredi à la Chambre des communes une version révisée de cette loi d’application de l’accord négocié avec Bruxelles encadrant la sortie du Royaume-Uni de l’UE, la première version soumise aux députés avant les législatives n’ayant pas fait consensus. De quoi fâcher les europhiles, quelques jours après que Boris Johnson se fut posé en rassembleur d’un pays meurtri par ses divisions sur le Brexit, adopté avec 52% des voix en 2016.

Cette nouvelle perspective d’un « no deal » a aussitôt fait fortement baisser la livre, mettant fin à plusieurs jours d’enthousiasme. L’accord de divorce prévoit une période de transition jusqu’à fin 2020, prolongeable une fois d’un an ou deux, afin d’éviter une rupture brutale entre Bruxelles et Londres dommageable pour l’économie. Pendant cette transition, les Britanniques continueront d’appliquer les règles européennes et d’en bénéficier. Pour qu’elle soit étendue, Londres doit en faire la demande avant le 1er juillet 2020. C’est durant cette période que les négociations, qui s’annoncent difficiles, devront être menées.

Une simple posture?

Ce calendrier est jugé « très court » à Bruxelles. Beaucoup d’experts jugent ce délai insuffisant également, plusieurs années étant généralement nécessaires pour négocier un accord commercial bilatéral. Pour Sam Lowe, du groupe de réflexion Centre for European Reform (CER), il pourrait s’agir d’une posture avant le début des discussions. « Pour qu’un accord soit conclu en l’espace de 11 mois, le Royaume-Uni devra accepter la plupart des demandes de l’UE. Politiquement, Boris Johnson ne peut faire de concessions sans mener bataille d’abord », a-t-il tweeté. À défaut d’accord commercial, les relations économiques entre Bruxelles et Londres seraient régies par les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), bien moins avantageuses que le dispositif actuel car elles fixent des droits de douane pour la circulation des marchandises.

Un accord aussi avec les États-Unis

Boris Johnson souhaite un accord de libre-échange inspiré de celui conclu entre l’UE et le Canada, selon son porte-parole. Il veut également conclure un « ambitieux accord de libre-échange » avec les États-Unis. L’accord de retrait sera le premier texte examiné par le Parlement dans sa nouvelle composition, après le serment d’allégeance à la Couronne des députés nouvellement élus. Avant de se pencher sur le Brexit, la chambre basse se réunit mardi pour élire son « speaker » (président) et, sauf surprise, reconduire le travailliste Lindsay Hoyle, élu peu avant les législatives.

Jeudi, Boris Johnson déclinera son programme législatif lors du traditionnel discours du Trône lu par Elisabeth II, 93 ans. Selon Downing Street, il sera dominé par le Brexit et le refinancement du service national de santé (NHS), mis à mal par des années d’austérité conservatrice.

LQ/AFP